Attentats de Bruxelles: où en est-on du registre européen des voyageurs?

Des députés européens dénoncent un outils qui ne protège pas les données personnelles. - Bertrand Langlois - AFP
"Le terrorisme a frappé la Belgique, mais c'était l'Europe qui était visée." François Hollande, au moment d'exprimer son soutien à la Belgique, a rappelé la nécessité de prendre des "dispositions indispensables" au niveau européen. L'une d'entre elle passerait par l'adoption définition du Passenger Name Record (PNR), un registre commun portant sur les données des passagers aériens.
Cette nécessité, c'est Manuel Valls qui l'a rappelé quelques heures plus tard devant l'Assemblée nationale. "Il est temps de l’adopter", a martelé le Premier ministre dans l'Hémicycle. Et de poursuivre: "On a assez perdu de temps sur cette question. Le gouvernement de la France a besoin du soutien du Parlement européen et de tout le monde". Le chef du gouvernement a rappelé alors que "tout le monde doit prendre ses responsabilités", visant explicitement le groupe socialiste et écologique au Parlement européen.
Outil invasif
Au lendemain des attentats du 13 novembre à Paris, le Premier ministre avait déjà insisté sur la mise en place de ce PNR européen, réclamé depuis les attaques du 11 Septembre 2001 aux Etats-Unis. Ce fichier permettrait de recenser l'identité de tous les passagers d'avions circulant, entrant ou sortant de l'espace européens. Si un PNR entre l'Europe et les Etats-Unis a été ratifié en 2012, rien n'avance au niveau continental.
"Seuls les derniers attentats semblent faire bouger les choses", concède Jacques Poinas, ex-chef Unité de coordination de lutte anti-terrorisme. En décembre dernier, le PNR européen a été adopté par la commission des libertés civiles au Parlement européen. Sa ratification en séance plénière était annoncée pour le début 2016 mais certains députés et certains pays s'y opposent toujours parlant d'outil invasif.
Une mise en place complexe
"Ce fichier PNR est pour le moment bloqué au Parlement européen et c’est inadmissible, confirme sur BFMTV Sébastien Pietrasanta, secrétaire national en charge de la sécurité au Parti socialiste. Certains députés européens pensent qu’il faut adopter le PNR mais en contrepartie qu'il faut un texte protecteur sur les données personnelles." Pour exemple, Mario Oetheimer, en charge de ce dossier pour l’agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, s'interrogeait en janvier dernier sur la nécessité "d'une collecte de données aussi importante pour lutter contre le terrorisme".
"La collection massive et la rétention des données de tous les passagers aériens n’est rien de plus qu’un placebo. Nous n’avons pas la moindre preuve que cela permette d’améliorer réellement la sécurité", dénonçait l'eurodéputée écologiste Eva Joly.
Concrètement, ces informations personnelles seraient conservées cinq ans et transmises entre les différentes compagnies puis entre les différents Etats. Mais outre la difficulté de trouver un accord politique sur cette question entre les 27 Etats-membres, c'est un défi technique qui attend l'Union européenne. "Il s'agira d'un outil technique extrêmement complexe, insiste Jacques Poinas. Même s'il était voté, sa mise en place prendrait au moins trois ans."