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Après la mort d'une femme retrouvée dans le coffre d'une voiture, la colère de sa famille

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Adeline Leroy est morte dix jours après avoir été extraite du coffre d'une voiture, en hyperthermie. Sa mère et sa sœur pointent du doigt son compagnon qu'elles accusent de violences conjugales. L'intéressé nie.

"Pourquoi est-il encore en liberté?" La mère et la sœur d'Adeline Leroy poussent un cri du cœur après la mort de la jeune femme de 30 ans. Celle-ci a été transportée le 15 septembre dernier au centre hospitalier de Perpignan (Pyrénées-Orientales) après avoir été extraite du coffre d'une voiture, en état d'hyperthermie. Son compagnon a donné l'alerte aux pompiers en les informant qu'elle avait fait un malaise dans le véhicule. Tombée dans le coma lors de son hospitalisation, Adeline Leroy est morte quelques jours plus tard, le 25 septembre.

Depuis, la justice tente d'éclaircir les contours de ce drame. La version présentée par le compagnon de la victime ne convainc pas. Car dans le coffre de la voiture, les enquêteurs ont découvert des coussins et une couette, faisant ainsi émerger une question: Adeline a-t-elle été séquestrée dans l'habitacle?

"Elle est où la justice?"

Rapidement, l'homme de 37 ans est placé en garde à vue avant d'être remis en liberté sous le statut de témoin assisté, une position visant une personne mise en cause dans une affaire judiciaire mais à qui il n'est pas directement reproché la commission de l'infraction. Pour Mélanie, la sœur, et Ghislaine, la mère de la victime, c'est l'incompréhension.

"On ne veut pas qu'il soit en liberté. C’est comme si c’était normal qu'il l’ait mise dans le coffre. Elle est où la justice?" lance Ghislaine Gauthier interrogée par BFMTV.com.

"Le magistrat instructeur a ses raisons d’avoir placé cet homme - présumé innocent - sous le statut de témoin assisté, mais ce statut intermédiaire a du mal à passer auprès de la famille. Elles ont perdu un être très cher et un sentiment d’injustice vient s’ajouter à la peine", commente leur avocat, Me Julien Audier-Soria. D'autant que la mère et la sœur de la victime sont persuadées qu'elle subissait des violences depuis de nombreuses années.

"Il nous a éloigné d'elle"

Le couple se rencontre en 2011 à Vierzon, dans le Cher. Rapidement, ils tombent amoureux et s'installent chez la maman d'Adeline. Très proche de sa mère et de sa sœur depuis toujours, la jeune femme se renferme peu à peu, selon le récit de ses proches.

"On était tout le temps ensemble, avec ma sœur et ses copines. Mais quand elle l’a rencontré, toutes nos sorties étaient finies, elle ne voyait plus que lui. Il nous a éloigné d’elle, il lui disait qu’on ne l’aimait pas, qu'il n'y avait que lui", témoigne Mélanie Leroy.

Après quelques mois passés chez Ghislaine Gauthier, le couple déménage dans le quartier Saint Martin, à Vierzon, puis s'installe près de Perpignan, dans les Pyrénées-Orientales. Leurs liens s'étiolent encore, mais la mère et la sœur disent avoir tenté d'entretenir la relation et de rendre visite à Adeline.

"Quand on allait chez eux, on ne pouvait rien dire. Elle nous disait qu’il la tapait, qu’elle n’avait le droit de parler à personne...", assure la mère de la victime.

Elle dit avoir un jour contacté le 3919, un numéro d'urgence pour les femmes victimes de violences conjugales. Elle conseille également à sa fille d'aller voir un psychologue, comme un sas de décompression - une recommandation qu'Adeline a suivie, selon elle.

Le compagnon nie toute violence

"Je n'ai jamais tapé ma femme, je ne l'ai jamais touchée, c'était l'amour de ma vie", se défend le compagnon d'Adeline, auprès du journal Le Berry.

Mais Adeline, selon ses proches, passe des journées enfermée dans le coffre de la voiture. "Elle m’a déjà dit qu’elle attendait longtemps dans la voiture", affirme Ghislaine. Lui-même m'a dit un jour au téléphone que ma fille aimait aller dans le coffre. Il m'a expliqué: 'Quand je vais au travail, elle s'y installe, je lui baisse les sièges de la plage arrière, j'ouvre les fenêtres et elle m’attend."

Pour Ghislaine et Mélanie, le scénario est clair: le 15 septembre, Adeline est montée dans le coffre, "comme d'habitude", mais cette fois-ci, "ils se sont disputés et il n’a rien ouvert". Pour l'heure, ce déroulé demeure purement hypothétique, l'homme niant toute implication dans la mort de sa compagne.

Il explique au Berry que la jeune femme était "très possessive", c'est la raison pour laquelle elle passait ses journées à l'attendre dans la voiture. "Je ne sais pas pourquoi elle n'est pas sortie ce jour-là, la voiture n'était pas fermée, elle pouvait sortir", assure-t-il, tandis que son avocat n'a répondu à nos sollicitations.

Quoi qu'il en soit, pour Me Audier-Soria, "il y a eu une alerte sur des violences conjugales et ça n’a pas été assez pris au sérieux". "Cela montre que notre société doit encore faire des efforts là-dessus", estime l'avocat.

Si Ghislaine Gauthier reconnaît que de nombreux processus existent pour alerter sur ces drames, elle estime qu'ils ne sont pas adaptés aux victimes. "Adeline n’avait pas de téléphone portable et son compagnon etait toujours avec elle. Elle n’était jamais seule et elle avait peur de lui. Comment pouvait-elle faire?"

3919: le numéro de téléphone pour les femmes victimes de violence

Le "3919", "Violence Femmes Info", est le numéro national de référence pour les femmes victimes de violences (conjugales, sexuelles, psychologiques, mariages forcés, mutilations sexuelles, harcèlement...). C'est gratuit et anonyme. Il propose une écoute, informe et oriente vers des dispositifs d'accompagnement et de prise en charge. Ce numéro est géré par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF).

Ambre Lepoivre Journaliste BFMTV