Agressée par sa famille pour avoir refusé un mariage forcé

Une lycéenne de 18 ans d'origine algérienne a été victime de violences aggravées de la part de sa famille, parce qu'elle ne voulait pas du mari que celle-ci lui imposait. La jeune femme a été séquestrée pendant plusieurs heures et blessée à l'arme blanche le 4 novembre dernier à Toulon (Var).
D'après la victime, ce sont sa mère, âgée de 52 ans, et ses deux soeurs mineures, âgées de 14 et 16 ans, qui sont les auteurs de son agression. Toutes trois nient pour l'heure les faits. Interpellées en fin de semaine dernière, les trois accusées ont été déférées dimanche devant le parquet de Toulon, puis mises en examen pour « enlèvement, séquestration et violences aggravées ». Elles ont été remises en liberté sous contrôle judiciaire avec obligation de pointer toutes les semaines au commissariat et confiscation de leurs passeports.
La jeune fille avait déjà plus ou moins coupé les ponts avec sa famille. Elle vit avec un lycéen de son âge, qui n'est pas musulman, très loin des projets qu'on avait faits pour elle, à savoir se marier en Algérie, avec un homme de 30 ans. Mardi dernier, ses parents l'ont attirée dans la rue et l'ont l'enlevée. C'est au domicile familial qu'elle aurait subi le pire, se retrouvant le visage et l'abdomen lacérés au couteau. C'est au commissariat, où elle a déposé plainte, qu'elle a trouvé refuge.
« Elle a bien réagi »
Alex Massari, le président de la section toulonnaise de la Ligue des Droits de l'Homme, réagit à cette affaire : « Ca me choque, mais c'est malheureusement quelque chose qui arrive souvent, car ce mélange à l'intérieur une histoire d'honneur de la famille qui est remis en cause. Le seul côté positif que je vois dans cette affaire, c'est que la fille a compris qu'en France on ne tolérait pas les mariages forcés et qu'elle s'est placée sous la protection de la police. Elle a très bien réagi, c'est, si on peut dire, une preuve d'intégration que les gens ne subissent pas et que les filles arrivent maintenant à refuser quelque chose qui leur est imposé ».
Selon Christine Jama, qui dirige la Voix des Femmes, une association qui milite contre les mariages forcés, « cette jeune femme a évidemment eu raison de se défendre. Même si ça ne va pas être facile pour elle, d'ici quelques temps elle ne regrettera pas. Elle a gagné sa liberté. J'espère que ses parents réfléchiront, qu'ils ne feront pas ça à ses frères et sœurs. J'espère que ça va la protéger et qu'elle est dans un lieu en sécurité, parce que ce n'est pas toujours le cas ».
« Il faut la protéger »
Alex Massari profite de cette affaire pour se faire entendre sur le manque de moyens pour accompagner ces victimes : « C'est vrai qu'il n'y a pas un dispositif assez important pour récupérer, aider, protéger, des filles qui sont dans ce cas-là. Elles risquent de se trouver mélangées avec des jeunes délinquants, alors que ce n'est pas du tout leur cas. Je crois qu'on n'est pas assez conscient de l'effort et de la volonté qu'il faut avoir pour arriver à s'élever contre la famille. Car là on ne se lève pas contre son père ou sa mère, mais contre toute sa famille. Cette fille-là par exemple, il va falloir absolument lui montrer qu'elle a pris la bonne décision ».