Aéroport de Roissy: des oeuvres d'art en provenance de Syrie saisies

Les douaniers de Roissy viennent de mettre la main sur un trafic d'œuvres d'art qui pourrait bien financer les activités de Daesh. Deux bas-reliefs en marbre, vraisemblablement en provenance de Syrie, ont été découverts par les douaniers à l'aéroport Charles-de-Gaulle en mars dernier. Jusqu'alors restée secrète, cette saisie a été rendue publique mardi. Et pour cause: les enquêteurs ont désormais la certitude que ces œuvres proviennent de la moyenne vallée de l'Euphrate, dans la région du Levant Nord, qui s'étend de l'Irak à la Syrie.
Un caisson en bois très solide, un colis très lourd, des précautions exceptionnelles pour des objets présentés comme de simples "panneaux décoratifs de jardin"... autant d'éléments qui ont éveillé les soupçons des douaniers. "Pour expédier de simples éléments décoratifs de jardin, on emploie rarement de telles précautions", explique au Parisien Christophe Verbois, chef de la cellule de ciblage du fret aux douanes. "Il y avait de fortes suspicions qu'il s'agisse de biens culturels."
"Pillages en zone de guerre"
Les deux bas-reliefs, qui provenaient du Liban, pays frontalier de la Syrie et de l'Irak, ont été confiés pendant quelques mois aux experts du département des antiquités du Louvre. Il s'agit d'œuvres sculptées dans le marbre, une plaque contenant des grappes de raison ainsi qu'une jarre surmontée d'une croix chrétienne qui "apparaît dans les églises paléochrétiennes", confirment les experts. Ces pièces ont été datées entre le 14e et le 16e siècle.
Alors qu'ils avaient pour destination de la Thaïlande, les deux-bas reliefs ont été mis en lieu sûr et devraient être restitués aux autorités de son pays d'origine, ce qui est impossible pour l'heure, avec les combats qui font rage en Syrie. "Il y a de fort soupçons qu’ils soient issus de pillages en zone de guerre", précise Christophe Verbois, expliquant ne pas pouvoir à l’heure actuelle en donner la certitude, compte tenu du fait qu’il "faudrait aller sur place pour vérifier".
Daesh en manque d'argent
Outre ces soupçons de pillages de guerre, cette découverte alerte les spécialistes des trafics d'œuvres d'art. "C’est à notre connaissance la première fois qu’une saisie de cet ordre est réalisée en Europe", estime sur LCI Edouard Planche, en charge du programme de lutte contre les trafics illicites de biens culturels à l’Unesco. Ce dernier espère que ce n'est que le début et que d'autres pièces de valeur architecturale et historique de cette région réapparaîtront.
Pour d'autres, la saisie de ces deux bas-reliefs est un signe de la recherche active d'armes menée par Daesh. "L'organisation Etat islamique a beaucoup perdu avec le tarissement de la manne pétrolière", confirme Jean-Paul Balzamo, sous-directeur en charge de la lutte contre la fraude et fin connaisseur des réseaux de trafiquants de biens culturels. "Il se trouve à court de financement. Jusqu'alors, ces pièces circulaient à travers des réseaux plus complexes".