Abus sexuels dans le sport: une ex-cavalière porte plainte pour viols contre des entraîneurs

Longtemps murée dans le "silence, la honte et la culpabilité", Amélie Quéguinier croisait encore deux de ses agresseurs sexuels dans les allées des terrains de concours d'équitation il y a quelques semaines.
Mais au terme de plusieurs années de thérapie, cette gérante d'écurie et ancienne cavalière, violée par son beau-père et coach sportif pendant dix ans, a finalement décidé de briser le dernier tabou qui l'empêchait de prendre la parole.
"Ce monsieur avait accès à moi 24h/24"
Alors que le milieu du sport français est bouleversé depuis quelques semaines par des accusations de viols et de harcèlement sexuel de plusieurs athlètes dans le patinage artistique, cette gérante d'écurie témoigne à son tour de la difficulté de s'exprimer dans le milieu du sport équestre.
Il y a deux ans, Amélie Quéguinier avait porté plainte contre son beau-père mais l'affaire est désormais prescrite. Il y a une semaine, cette ancienne cavalière a décidé de saisir la gendarmerie contre ces deux autres agresseurs sexuels. Elle accuse un ex-cadre fédéral et un entraîneur sportif de plusieurs viols commis lorsqu'elle avait entre 15 et 17 ans, dans le cadre de stages de détection.
Elle raconte: "C'est lui (son beau-père) qui gérait les sorties d'école. Après ça on allait monter à cheval, donc j'avais la double peine car ce monsieur avait accès à moi 24h/24". Pire, Amélie Quéguinier a du croiser le chemin de ces hommes pendant de longues années avant de pouvoir briser l'omerta.
"J'étais quelqu'un avec qui ils avaient de très bons souvenirs, donc c'était toujours des gens très agréables avec moi et il fallait que je fasse comme si moi j'avais des bons souvenirs aussi. On sait qu'une victime qui croise son agresseur c'est très traumatisant, et moi j'ai vécu ça pendant trente ans ...", se souvient-elle.
La FFE "embarrassée" et "inquiète"
Amélie Quéguinier raconte avoir eu un déclic récemment, lorsqu'une jeune fille de son écurie est venue la voir le visage dissimulé sous un vêtement pour lui confier avoir été victime de sévices sexuels.
"Elle me parle mais ne peut pas regarder quelqu'un en face, elle ne peut pas citer le nom de son agresseur, que je connais et qui vit à 50 km de chez moi", rapporte sur notre antenne la gérante d'écurie.
Face à ces révélations, la Fédération française d'équitation a choisi de réagir. "Embarrassée" et "inquiète", Sophie Dubourg, la directrice technique nationale de la FFE, explique avoir fait imprimer des affiches de sensibilisation à l'attention des centres équestres. Sur ces visuels destinés à libérer la parole d'éventuelles jeunes victimes, sont inscrits des messages tels que: "En parler, c'est se libérer", ou encore "N'en parle pas qu'à ton cheval".
"Il est temps de redoubler de communication, pour que ça n'arrive pas. 80% des licenciés sont des femmes, des jeunes filles. Notre grosse population de licenciées ont entre 8 et 12 ans, donc ce sont des personnes vulnérables."