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"J'ai fait la démarche d’être entendu partout": comment Stromae est devenu une star mondiale

Stromae revient ce vendredi avec son troisième album, le très attendu “Multitude”. Un album attendu dans le monde francophone, mais aussi outre-Atlantique.

Coachella en Californie, le Madison Square Garden à New York… Mais aussi Lisbonne, Amsterdam, Milan. Le "Multitude Tour" de Stromae va le conduire dans toute l’Europe et même outre-Atlantique. Le chanteur belge, qui revient ce vendredi avec Multitude, son premier album depuis Racine Carrée en 2013 a une fois encore vu les choses en grand.

Cet album aux influences cosmopolites, le musicien l’a voulu international. C’est d’ailleurs à l’Amérique et au Tonight Show de Jimmy Fallon, que Stromae a réservé sa première apparition télévisée, en décembre dernier.

Il est en effet l'un des rares artistes francophones à avoir conquis l'Amérique. Et pas seulement. Sa musique s'écoute en France, bien sûr, mais aussi en Allemagne, aux Pays-Bas, et aux Etats-Unis, selon le classement de Spotify des pays dans lequel l'artiste est le plus écouté. Il a également généré plus de 4 millions d'écoutes en Amérique du Sud.

"Au cours de la dernière décennie, Stromae est devenu une star mondiale avec une musique qui mêle l'urgence poétique du hip-hop et l'allure dansante de la musique électronique", note ainsi le New York Times à l'occasion de la sortie de Multitude.

"De la musique pour des gens qui ne comprennent pas mes paroles"

Très tôt, Stromae a compris qu'il n'avait pas besoin de chanter en français pour s'exporter. "Mes premières ambitions, quand j'ai commencé ma carrière solo, c'était de me dire 'si ça peut marcher en francophonie ou en France, ce serait super", confiait-il le 11 février dernier sur France Inter.

Il envoie alors sa chanson Alors on danse à "plein de DJ", dont DJ Snake, "qui l'a envoyé à un autre DJ allemand", qui l'a joué en Allemagne. Il comprend alors, que même chantés en français, ses sons peuvent toucher n'importe qui dans le monde.

"Je me suis dit que j'écoutais de la musique en anglais depuis des années, que je ne comprends pas et ça ne me pose pas de problème, je peux les apprécier aussi. (...) Je me suis dit, 'je peux faire de la musique pour des gens qui ne comprennent pas mes paroles'."

"Combinaison de Michael Jackson et Jacques Brel"

Galvanisé par le succès de Alors on danse, Stromae décide de partir, en 2013 à la conquête de l’Ouest, son album Racine Carrée en bandoulière. Dès 2014, il livre sa première prestation américaine dans le "Late Show" de Seth Meyers et fait la une du magazine Time Out, qui titre "Mais qui diable est Stromae?".

Le New York Times voit en lui une "combinaison de Michael Jackson et Jacques Brel". Le Time parle de son talent pour tricoter les "chansons de fête les plus dépressives du monde".

Repéré par des artistes comme Madonna, Will.i.am, ou Lorde - qui le convie sur la bande originale de Hunger Game en 2014 -, Stromae franchit les frontières et les océans à grandes enjambées. Racine Carrée est à l'époque l'album francophone "le plus écouté de tous les temps en streaming dans le monde avec 203 millions de streams", selon son label.

En 2015, le fantasque Kanye West vient esquisser avec lui, sur la scène de Coachella, quelques pas de danse sur Alors on danse. Le rappeur est le premier à avoir remixé dès 2010 le tube mondial du musicien belge, extrait de son premier album Cheese.

Du Madison Square Garden à l'Amérique du Sud

C'est en 2015 également que Stromae devient l'un des rares chanteurs francophones, avec Charles Aznavour, à se produire au Madison Square Garden de New York, devant 20.000 personnes. Ces concerts symboliques sont les étapes d'une ambitieuse tournée mondiale, qui le mène de Seattle à Los Angeles, au festival de Glastonbury au Royaume-Uni, à travers l'Amérique du Sud, mais aussi dans plusieurs pays d'Afrique, et le laisse exsangue.

Cette approche internationale ne doit rien au hasard. Elle est le fruit d'une véritable stratégie. "Avoir un projet comme Stromae est rarissime", expliquait en 2014 aux Echos Olivier Nusse, alors patron de Mercury, le label de Stromae. Pour son développement à l'international, il doit nourrir le Web et expliquer sa démarche, via notamment le live, car, pour les Anglo-Saxons, il constitue véritablement un ovni".

Stromae en couverture de l'édition new yorkaise du magazine "Time Out" en mai 2014.
Stromae en couverture de l'édition new yorkaise du magazine "Time Out" en mai 2014. © Time Out

"Dès Racine carrée, j’ai fait la démarche d’être entendu partout, et ça a marché", expliquait Stromae début février dans une interview à Télérama. "Je me rappelle très bien mes premiers rendez-vous aux États-Unis. J’avais signé avec ma maison de disques pour être distribué dans le monde entier."

"Sans me comparer à Beyoncé ou Rihanna, je tenais à savoir quelle était sa stratégie pour y parvenir, car souvent tous les territoires ne sont pas vraiment 'travaillés'."

"Il avait ce look totalement international"

Car Stromae a su développer, en plus d'une musique qui donne furieusement envie de danser, un univers visuel identifiable au premier coup d'œil. Silhouette dégingandée, bermuda, nœud papillon, et chorégraphies signées Marion Motin (pour Papaoutai, Tous les mêmes et la tournée de Racine carrée), clips marquants... Stromae frappe les esprits. À commencer par celui de Will.i.am et des Black Eye Peas, qui l'ont découvert dès Alors on danse et l'ont convié à faire leur première partie au stade de France.

"J'étais dans un hôtel à Paris. On avait un jour off. J'ai allumé la télé, le clip de Alors on danse passait. Il avait ce look totalement international. Et je me suis dit: 'ce mec est cool'", raconte-t-il ainsi dans Stromae vu par, sur Youtube.

Entre ses deux albums, Stromae a certes pris du recul et du temps pour vivre et soigner sa dépression, mais il a continué d'étendre son aura internationale, cosignant en 2019 avec Coldplay la chanson Arabesque. Et imprimant sa patte artistique sur les clips de Major Lazer, Run Up, de la Britannique Dua Lipa, IDGAF, et de l'artiste la plus scrutée du moment, Billie Eilish, Hostage.

Pendant son absence, sa réputation n'a fait que grandir, souligne le New York Times. Et l'Amérique, comme la France, l'a attendu de pied ferme.

Magali Rangin
https://twitter.com/Radegonde Magali Rangin Cheffe de service culture et people BFMTV