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Angèle, Aya Nakamura, Selah Sue... Pourquoi Damso enchaîne les collaborations loin du rap

Damso et Angèle aux Victoires de la musique 2022

Damso et Angèle aux Victoires de la musique 2022 - Bertrand Guay - AFP

Les derniers featurings du rappeur belge affolent les charts. Ces collaborations, avec des artistes féminines aux antipodes du rap, illustrent une évolution dans la trajectoire musicale de Damso.

En l'espace de trois mois, Damso n'a cessé d'enchaîner les collaborations avec des artistes féminines. Le dernier en date est Wanted You to Know, avec la chanteuse belge néerlandophone Selah Sue dévoilé vendredi 25 mars sur son album Persona.

Ce nouveau morceau, accompagné par un clip, vient s'ajouter à la liste naissante des featurings de Damso avec des chanteuses souvent éloignées de son univers, à l'instar d'Angèle, Aya Nakamura ou encore Louane pour qui le rappeur belge a écrit le titre Donne moi ton cœur en 2020.

"Quand la musique parle il n'y a plus de code"

Cette démarche artistique illustre la volonté de Damso d'être là où on ne l'attend pas et de briser les barrières entre les genres musicaux, comme il le précisait dans une interview au Parisien en 2018, à propos de ses collaborations avec la chanteuse Angèle.

"Angèle, on me conseillait de ne pas l'inviter car elle ne venait pas du hip-hop et n'était pas encore connue, raconte Dem's (son surnom). Quand la musique parle, il n'y a plus de code. Ce sont les autres qui nous enferment dans des cases", confiait-il.

Wanted You to Know s'inscrit également dans la dynamique de Damso d'élargir ses horizons musicaux pour aller chercher un public hors rap. Certains fans de l'artiste lui avaient même reproché cette ouverture sur d'autres genres, lors de la sortie, en 2021, de son album QALF, réédité ensuite, soulignant les sonorités pop très présentes, voire proches de la chanson française sur un titre comme 911.

"Il n'y a pas de frontière. Moi je fais du rap mais si tu viens de la techno ou quoi tant que j'aime bien ce que tu fais bah allez on y va", assurait Damso dans une interview pour Skyrock.

Briser les clichés

À l'image d'Orelsan et son duo avec le groupe Ibeyi, d'Hamza avec Christine & the Queen ou encore de Nekfeu et sa collaboration avec Vanessa Paradis, de plus en plus de rappeurs en tête des charts n'hésitent pas à convier sur leurs albums, des artistes féminines étrangères à leur univers.

"Pourtant dans l'univers, y'a des milliards de vies sur terre, sept milliards d'êtres humains, peut-être trois milliards de filles mais c'est toi qu'j'veux", rappe Nekfeu dans son featuring avec Vanessa Paradis Dans l'univers.

Grâce à ces featurings, ces rappeurs s'affranchissent des "codes" du rap et se laissent aller à l'émotion, brisant ainsi certains clichés et reproches de sexisme et misogynie attribués au rap depuis la nuit des temps, dont Damso est d'ailleurs régulièrement la cible.

Mettre fin à une sempiternelle polémique

Ainsi, en 2018, alors qu'il est annoncé pour interpréter l'hymne de l'équipe belge pour la Coupe du monde de football, Damso se retrouve embarqué dans une polémique qui continue, encore aujourd'hui de lui coller à la peau.

De nombreuses associations, majoritairement féministes, pointent du doigt le caractère misogyne de certains de ses textes, notamment ceux de son premier succès commercial Pinocchio, collaboration sur l’album Nero Nemesis de Booba.

Face à l'ampleur de la controverse, le rappeur, en accord avec la Fédération belge de football, préfère alors de se retirer du projet.

Si depuis, Damso n'a pas spécialement édulcoré son propros dans ses textes, il a en revanche pris du recul sur la question et montré publiquement sa volonté de se défaire pour de bon de cette réputation de rappeur qui "hait les femmes".

Quelques mois après cette polémique, il confiait son désir d'apprentissage sur le feminisme, notamment à travers les livres: il dévore les ouvrages de Simone de Beauvoir ou encore de Belle Hooks, une féministe américaine.

"Il est en train de se remettre en question"

Dans le même temps, Damso multiplie également les apparitions aux côtés d'Angèle. Cette dernière, qui revendique ouvertement son féminisme dans son titre Balance ton quoi, a d'ailleurs été à de nombreuses reprises questionnée sur sa proximité avec le rappeur, jugée contradictoire.

"À la différence de Damso, j'ai été attendue les bras ouverts en Belgique parce que je suis une fille, blanche, blonde avec des petites paroles gentilles. Damso c'est le "rappeur noir" qu'on réduit à être sexiste et mysogine. C'était un peu les deux opposés mais j'avais envie de montrer qu'on pouvait faire quelque chose ensemble , explique-t-elle dans une interview pour l'émission Sept à Huit.

"S'il fait appel à moi c'est aussi parce que, peut-être, il est en train de se remettre en question et qu'il a envie de s'ouvrir à d'autres choses, poursuit la chanteuse.

En effet, dans le titre Silence, collaboration entre les deux artistes belges, présente sur l'album Lithopédion de Damso, le rappeur aborde pour la première fois avec une certaine vulnérabilité son rapport aux relations amoureuses.

"Vous les femmes, c’est toujours pareil: quand le drame s’abat, vous pleurez. Vous les hommes, c’est toujours pareil: quand le drame s’abat, vous courez", rappe Damso dans le titre Silence.

Si on prend un peu de hauteur pour lire entre les lignes du texte, on se rend compte que la tirade de Damso dans ce morceau est une réponse habile aux reproches sexistes qui lui ont été adressés sur sa vision des femmes.

Ainsi, l'artiste, souvent qualifié de cru et de dégradant prouve qu'il est capable d'évoluer. Et de faire preuve de poésie vis à vis de la gente féminine.

Il l'illustre à nouveau sur le morceau Démons, aux côtés d'Angèle, montrant qu'il a parfaitement compris les enjeux de ses propos: "J'feat avec Angèle, pas d'gros mots, radio, faut qu'on passe. Au lieu d'un "nique ta m-" non, non, j'dirai grand bien leur fasse."

C.L