De "Mourir peut attendre" à "Ballerina": Ana de Armas, nouvelle figure féminine du film d'action

Des telenovelas espagnoles aux plus grandes productions hollywoodiennes, Ana de Armas s'est imposée ces dernières années comme l’une des étoiles montantes du cinéma d’action.
Après avoir marqué les esprits dans Mourir peut attendre ou dans À couteaux tirés, la comédienne cubaine, qui a quitté La Havane pour l'Espagne à 18 ans avant de s'installer à Los Angeles, s'offre le premier rôle de Ballerina, spin-off au féminin de la saga John Wick, en salles ce mercredi 4 avril. Retour sur son ascension hors norme.
Une enfance marquée par la Période Spéciale à Cuba
Rien ne prédestinait Ana de Armas au cinéma. Née à La Havane d'une mère en charge des ressources humaines au ministère de l’Éducation et d'un père tantôt directeur de banque, d'école, professeur et adjoint au maire, la future actrice grandit dans un milieu bien loin des tapis rouge et des paillettes d'Hollywood.
Enfant, Ana de Armas vit chez ses grands-parents et reçoit une fois par semaine la visite de ses parents et de son frère qui habitent dans la ville balnéaire de Santa Cruz del Norte.
Son enfance est notamment marquée par la Période Spéciale, terrible crise économique qui ravage Cuba au début des années 90, après la chute de l'URSS. En interview, elle raconte ainsi avoir vécu des périodes de rationnement alimentaire ainsi que des coupures d'électricité fréquentes.
"Nous vivions sans luxe, avec le strict nécessaire, juste de quoi manger tous les jours et aller à la plage l'été", expliquait-elle en 2019 dans l'édition espagnole du magazine Vanity Fair.
Mais la comédienne assure n'avoir jamais été privée de rien grâce au soutien sans faille de ses parents "très travailleurs et pleins d'abnégation". "Grâce à la franchise de mes parents, j'étais toujours consciente de ce que nous pouvions et ne pouvions pas avoir. Mon frère et moi sortions dans la rue et jouions comme des fous. J'avais beaucoup de liberté", se souvient-elle.
Pas d'accès à Internet ni de lecteur DVD
Pendant son enfance, Ana de Armas pas non plus d'accès à Internet, ni de lecteur DVD. Seul divertissement autorisé: 20 minutes de dessins animés le samedi et le cinéma le dimanche matin.
"D'une certaine manière, ça rendait le moment encore plus spécial. On avait si peu de temps pour regarder quelque chose. On savait qu'il fallait faire ses devoirs et aider à nettoyer la maison à temps pour regarder notre film. Quand on arrivait enfin devant la télé, on ne voulait pas être dérangé", confiait-elle au média Net à Porter en 2020.
C'est chez son voisin que l'adolescente se prend de passion pour le cinéma. Fascinée par les long-métrages qu'elle visionne, la jeune Ana s'amuse à apprendre par cœur les répliques de certaines scènes pour les rejouer devant son miroir. À 12 ans, elle découvre ainsi sa vocation: devenir actrice.
"Si je regardais un film à la télévision et que je voyais une scène qui me plaisait, peu m'importait que ce soit un homme ou une femme, je courais vers le miroir et je l'imitais", affirme l'actrice auprès du média espagnol La Vanguardia.
"Un jour, je regardais un film, je crois que c'était 'Matilda', et en rentrant, j'ai rejoué le film en entier à mon frère, qui ne l'avait pas vu. J'imitais toujours les scènes les plus émouvantes des films que j'aimais", ajoute-t-elle.
Madrid avec 200 euros en poche
Plus motivée que jamais à devenir comédienne, Ana de Armas rejoint à l'âge de 14 ans le Théâtre national de Cuba à La Havane, où elle se rend chaque jour en auto-stop pour suivre ses cours. Puis, à 18 ans, elle s'envole pour Madrid avant la fin de ses études "avec 200 euros en poche" afin de poursuivre son rêve.
"Techniquement, je n'ai pas terminé l'école, j'ai dû partir avant de présenter mon mémoire de fin d'études. J'avais 18 ans et j'ai senti que le moment était venu de passer à autre chose", précise l'actrice au média On Cuba.
"Je suis partie avec 200 euros en poche, que j'avais économisés grâce au dernier film que j'avais réalisé à Cuba, 'El edén perdido', et j'ai dit à mes parents que je reviendrais quand je n'aurais plus d'argent", poursuit-elle.
"Bien sûr, cela ne s'est pas produit. Mon argent s'est épuisé en une semaine et je ne suis pas rentrée. Heureusement, tout s'est très bien passé pour moi et j'ai travaillé sans relâche pendant les huit années que j'ai passées en Espagne", ajoute la comédienne.
En Espagne, Ana de Armas tourne ses premiers long-métrages. Elle joue notamment dans le drame romantique Una rosa de Francia en 2006 et dans la comédie Mentiras y gordas. À la télévision, elle est choisie pour jouer Carolina Leal Solís dans El Internado, un feuilleton pour ados qui se déroule dans un pensionnat.
Cette série, populaire en Espagne, permet à Ana de Armas de se faire un nom dans le milieu. Après un court séjour à New York pour apprendre l'anglais, elle décroche un rôle dans la série Hispania, la leyenda et dans le film d'horreur El callejón d'Antonio Trashorras.
Mais, malgré son succès en Espagne, la comédienne vise plus haut et s'envole pour Los Angeles en 2014. "Je voulais autre chose. Je voulais être dans un endroit où j'avais plus d'opportunités. L'Espagne était en pleine crise et les films qui y étaient tournés ne me motivaient pas. C'est pourquoi je suis allée à Hollywood", précise Ana de Armas auprès du média espagnol La Vanguardia.
Début de carrière à Los Angeles
À Los Angeles, Ana de Armas repart de zéro pour construire sa carrière. Mais avant de se précipiter vers les castings, la comédienne fait le choix stratégique de perfectionner son anglais, refusant d’être cantonnée aux rôles stéréotypés de femmes latinos.
C'est en apprenant ses répliques phonétiquement qu'Ana de Armas décroche en 2015 son premier rôle dans un film américain, le thriller psychologique Knock Knock d'Eli Roth, où elle partage l’affiche avec Keanu Reeves.
Ce dernier, devenu par la suite son mentor, l’invite à jouer en espagnol dans le thriller Suspicions (2016), qu’il produit et dans lequel il tient un rôle. La même année, la comédienne fait également une apparition remarquée dans la comédie dramatique War Dogs de Todd Phillips.
Si le succès commence peu à peu à lui tendre les bras, Ana de Armas se heurte rapidement aux clichés: on ne lui propose que des rôles de femmes fatales latinos, cantonnées à être jolies et sexys. Elle parvient cependant à en sortir, et joue en 2017 dans le film de science-fiction Blade Runner 2049 de Denis Villeneuve, incarnant Joi, la compagne virtuelle de Ryan Gosling.
"C'est l'un des rôles les plus difficiles que j'ai eus en tant qu'actrice jusqu'à présent", confiait-elle au média Flaunt en 2023. "Son personnage est très complexe. C'est une femme très forte, mais aussi très émotive et très joyeuse, comme son nom l'indique".
Briser les stéréotypes du film d’action
Bien que secondaire, ce personnage va toutefois ouvrir à Ana de Armas les portes d'Hollywood. En 2019, le grand public la retrouve dans le thriller policier américain À couteaux tirés aux côtés de Daniel Craig, film pour lequel elle sera nommé au Golden Globe de la meilleure actrice dans un film musical ou une comédie.
La consécration arrive deux ans plus tard lorsqu'elle est choisie pour être la prochaine James Bond Girl dans Mourir peut attendre. Un rôle que le réalisateur, Cary Joji Fukunaga, lui a écrit sur mesure. Elle y incarne une James Bond Girl loin des clichés de la potiche, une véritable héroïne d'action.
Déterminée à renverser les stéréotypes du film d’action, Ana de Armas franchit une nouvelle étape de sa carrière en 2022 et décroche un rôle dans la superproduction Netflix The Gray Man, aux côtés de stars telles que Ryan Gosling et Chris Evans.
Elle confirme son ascension la même année avec Blonde, biopic controversé de Marilyn Monroe réalisé par Andrew Dominik, dans lequel elle incarne la célèbre actrice américaine, qui lui a valu une nomination aux Oscars.
Mais, ce mercredi 4 juin, Ana de Armas passe un nouveau cap dans son ascension. À l'affiche de Ballerina, spin-off de la saga John Wick portée par Keanu Reeves, la comédienne incarne Eve Macarro, une jeune criminelle traumatisée par la mort de son père, décidée à se venger. Un rôle, pour lequel elle s'est entraînée sans relâche pour faire elle-même ses cascades, sans doublure.
"C'était un niveau de discipline que je ne connaissais pas. Avant le tournage, ça a été trois, quatre mois d'entraînement tous les jours, presque comme une athlète. Ça a été beaucoup de boulot avec mon entraîneur, avec l'équipe de cascadeurs. Il a fallu apprendre le maniement des armes et chorégraphier les combats. Il ne fallait rien lâcher", assure l'actrice au micro de BFMTV.
Avec Ballerina, Ana de Armas ne se contente plus d'être au second plan ou de jouer des personnages clichés. Elle s’impose désormais comme une véritable héroïne badass, prête à écrire sa propre histoire dans le cinéma d'action.