Cannes 2022: le grand retour de Michel Hazanavicius avec "Coupez!", une délirante comédie de zombies

Affiche de "Coupez!" de Michel Hazanavicius - Wild Bunch
Le festival de Cannes ne pouvait pas trouver meilleur film pour ouvrir ce mardi sa 75e édition. Comédie délirante de Michel Hazanavicius (OSS 117, The Artist) sur une invasion de zombies qui perturbe le tournage d'un nanar, Coupez! est une vibrante déclaration d'amour au cinéma et aux gens qui le fabriquent.
"On est plus proche de La Nuit américaine que du Dernier train pour Busan", s'amuse le réalisateur oscarisé, qui s'inspire ici d'un grand succès du cinéma japonais, Ne Coupez pas! (2017, disponible sur Filmo). "Il se trouve que l'action se déroule sur un tournage de film de zombie, mais personne ne va avoir peur, car ce que raconte le film va au-delà du cinéma: c'est un film sur la bienveillance."
Dans les salles obscures, cette réjouissante comédie devrait rencontrer un franc succès: "Ce n'est pas un film qu'on a envie de faire découvrir derrière les ordinateurs, chacun dans son coin", acquiesce Michel Hazanavicius. "Le film se comporte mieux devant une salle remplie de gens. C'est une comédie qui a vraiment l'objectif de faire rire."
"Profondément poétique et absolument ridicule"
Coupez!, qui s'amuse avec le procédé de la mise en abyme et les discours métafictionnels omniprésents dans le cinéma contemporain, déjoue sans cesse les attentes du public, qui pense voir un authentique mauvais film. "Vous commencez le film en regardant un film raté et vous ne pouvez pas vous empêcher de vous dire qu'ils l'ont raté. Mais dans la 2e partie, vous vous rendez compte qu'ils ont réussi quelque chose de bien plus important. On va du jugement à l'acceptation. Je trouve ça joli." Et le cinéaste d'ajouter:
"Il y a quelque chose de profondément poétique et en même temps d'absolument ridicule [dans ce genre de série Z]. D'un côté, on ne peut pas s'empêcher de se foutre de leur gueule et de l'autre il y a un truc qui force le respect. Les mecs ne s'arrêtent pas au manque de budget. C'est touchant, c'est hyper beau."
Un remake très personnel
Michel Hazanavicius a conçu Coupez! assez rapidement, en quelques mois seulement, au début de la pandémie. Le cinéaste, dont la majorité des films explorent les coulisses du 7e Art, rêvait depuis longtemps de réaliser un film de tournage. "Je travaillais là-dessus lorsque le producteur Vincent Maraval m'a dit qu'il venait d'acheter les droits de remake de Ne coupez pas! Je ne suis même pas sûr qu'il pensait à moi pour le faire. Mais dès que je l'ai lu, je me suis dit que je devais le faire."
Michel Hazanavicius, qui s'est souvent inspiré d'autres œuvres pour ses propres films, assume le statut de remake de Coupez!, dont il se moque avec ses personnages contraints de s'appeler avec des noms japonais bien qu'ils soient tous français. "Je trouvais ça chic d'intégrer le travail de l'original. Le fait de faire un remake me permettait aussi de rendre un peu crédible ces histoires de zombies et d'assumer le décalage à faire un film de zombies un peu foireux en France aujourd'hui."
Réaliser pour lui un remake n'a rien de honteux: "Partir d'un film, d'un scénario qu'on me propose ou d'un livre, ça ne change pas énormément de choses pour moi. Quel que soit le point de départ, vous réécrivez toujours un scénario. Il y a un long travail de digestion, d'appropriation. Je ne considère pas du tout Coupez! comme un film moins personnel que les autres, quand bien même c'est un remake."
"Spectateurs complètement désarçonnés"
On le voit avec les thématiques abordées, de l'amour du cinéma au relation père/fille, au cœur de la majorité de ses films. On retrouve aussi dans Coupez! son goût pour le pastiche et le mélange des genres. Coupez! débute comme une série Z, avant de bifurquer vers des situations de comédie plus classiques et un vaudeville "qui va dans tous les sens". "Les premiers spectateurs qui ont vu le film sans rien savoir ont été complètement désarçonnés", se réjouit-il.
Après les zombies de Coupez!, Michel Hazanavicius change de registre. Il réalise son premier film d'animation, La Plus Précieuse des marchandises. Il en présentera les premières images mi-juin au festival d'Annecy. Dans cette adaptation d'un best-seller de Jean-Claude Grumberg, un couple de bûcherons qui sauve un orphelin juif en pleine Seconde Guerre mondiale.
Hazanavicius se consacre entièrement au projet. "On veut le terminer début 2024", annonce-t-il. "J'ai terminé Coupez! fin septembre puis j'ai enchaîné avec le film d'animation." Pas question pour lui de tourner un autre film en attendant. "Je pourrais peut-être l'écrire éventuellement, mais je dois être disponible avant tout pour La Plus Précieuse des marchandises."