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Seine-Saint-Denis

Saint-Denis: le lycée Paul-Éluard menacé de fermeture après un rapport alarmant sur la sécurité incendie

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Depuis un contrôle de sécurité effectué en décembre, l'établissement fait l'objet d'un avis défavorable à la "poursuite de [ses] activités". La région dispose de six mois pour effectuer des travaux. Elle promet que les délais seront tenus.

Quelque 2.000 élèves arpentent chaque jour les couloirs vétustes du lycée Paul-Éluard de Saint-Denis. Cet effectif fait de lui le plus important de Seine-Saint-Denis. Mais il pourrait être contraint à fermer ses portes dans six mois, comme l'ont révélé nos confrères de Mediapart.

Au mois de décembre, les pompiers ont effectué un contrôle de sécurité au sein du lycée dionysien. À partir de leurs observations, ils ont rendu un avis défavorable à la "poursuite des activités" dans l’établissement pour cause de manquements à la sécurité.

Absence de diagnostics électriques, dysfonctionnement des systèmes de désenfumage, surbranchement, portes coupe-feu manquantes, câbles en pagaille, etc. Autant d'élément alimentant la perspective d'un incendie à grande échelle.

Quatre départs de feu depuis septembre

Depuis la rentrée de septembre, pas moins de quatre départs de feu ont été comptabilisés au lycée Paul-Éluard. Le dernier remonte au 8 janvier. L'incendie s'est déclaré dans les toilettes d'un des bâtiments. Certains élèves ont dû être évacués.

Au sein de l'établissement, l'inquiétude est palpable. "Je ne me sens pas trop soulagé déjà. Le danger peut-être imminent", alerte un jeune homme sous couvert d'anonymat. "Ça fait peur", confirme une adolescente.

"S'il y a un incendie dans le lycée, il va brûler tout le lycée", redoute un étudiant en BTS. "Et en moins de cinq minutes, tout [serait] brûlé. Il faut savoir que quand on prend la sortie de secours, on prend huit minutes à la prendre. Ça veut dire qu'on serait tous morts."

La peur ne gagne pas l'ensemble des élèves pour autant. "On en a parlé un peu en cours de français. [...] Mais sinon, ça ne nous inquiète pas plus", assure un lycéen. "On ne va pas plus en rajouter. Juste, on fait attention."

L'"indignation" du personnel

Comme un symbole, la veille du dernier départ de feu, 57 professeurs et agents avaient exercé leur droit de retrait, précisément pour pointer du doigt les failles dans le système de sécurité de l'établissement.

Le conseil régional, à qui revient la compétence des lycées, affirme que le lycée Paul-Éluard "fait l'objet d'une attention totale" de la part des élus. Dans un communiqué datant de début janvier, il s'insurge de l'exécution du droit de retrait du personnel, le jugeant "injustifié". Sa justification: "Les défaillances pointées relèvent de manquements du lycée ou de dégradations volontaires inacceptables pour lesquelles la région Île-de-France porte plainte".

"Il apparaît que de multiples désordres sont causés par de très nombreuses dégradations graves et volontaires ou par des manquements des enseignants, dont certains fumaient par exemple en salle des professeurs le jour de la commission de sécurité", déroule l'exécutif régional, piloté par Valérie Pécresse. "Les dégradations volontaires sont par exemple à l’origine de la nécessité du remplacement de 25 portes coupe-feu, d'éléments d'éclairage, de dalles de faux plafond..."

À ce document, dont certaines lignes ont provoqué l'indignation" au sein du corps enseignant, les syndicats ont répliqué, eux aussi par voie de communiqué. Ils accusent Valérie Pécresse de fuir ses responsabilités.

Des fonds débloqués

Depuis, le climat semble s'être progressivement apaisé. Deux réunions mêlant élus syndicaux et direction académique, se sont déjà tenues.

Selon l'antenne du SNES-FSU en Seine-Saint-Denis, des fonds ont été débloqués par le conseil régional pour prendre des mesures avant la fin du premier semestre. Les portes coupe-feu doivent être remplacées et du personnel dédié doit être mobilisé pour assurer la sécurité en cas de départ de feu.

"On va effectivement se retourner vers le lycée pour voir si les personnes seront là", promet Caroline Marchand, co-secrétaire d'un autre syndicat, le FSE-SNUIPP. "On va vérifier que les portes coupe-feu arrivent et soient bien installées. Et toutes les installations électriques, prises de courant, pour éviter les surcharges, etc. [...] Il faut vraiment que toutes les mesures soient prises pour assurer la sécurité des personnels."

Vers une "rénovation d'envergure"

Ce n'est pas la première fois que le lycée Paul-Éluard se retrouve malgré lui au cœur de l'actualité. En 2023, l'établissement avait fait l'objet d'importantes fuites d'eau, causées par sa vétusté. Au pont que des plafonds s'étaient effondrés, rendant les conditions d'enseignement spartiates.

Alors que le lycée célèbre cette année son 60e anniversaire, la région promet de lui administrer "une opération de rénovation d'envergure", pour un montant excédant légèrement les 40 millions d'euros. Elle doit débuter au printemps 2026 et prévoit en plus l'installation de caméras intérieures dans les bâtiments, conformément à l'avis du conseil d'administration.

Sollicité par BFM Paris Île-de-France, le rectorat n'a, à ce stade, pas réagi.

Yeliz Kirazli et Lino Viale avec Florian Bouhot