Enlèvement de Santiago : des procès-verbaux contradictoires sur l'état de santé du nourrisson

La maternité de l'hôpital Robert Ballanger, le 22 octobre 2024 à Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, où Santiago, un nourrisson de 17 jours, a été enlevé par ses parents - Dimitar DILKOFF © 2019 AFP
Retrouvé en vie aux Pays-Bas le 25 octobre dans un état décrit comme "bon", Santiago a été pris en charge dans un hôpital d'Amsterdam pour recevoir les soins dont il avait besoin en raison de sa prématurité. Son état de santé s'est retrouvé au coeur des préoccupations, les autorités craignant que celui-ci ne se dégrade lors de la fuite de ses parents.
BFMTV a pu consulter deux procès-verbaux rédigés par les enquêteurs qui rapportent le diagnostic posé sur l'urgence vitale du nourrisson, et ceux-ci présentent de grosses différences.
Un premier constat alarmiste
Un premier procés-verbal, rédigé le 22 octobre à 00h58, soit une à deux heures après l'enlèvement de Santiago, décrit son état comme "précaire". Les officiers de police relèvent qu'il est "dans l'impossibilité de s'alimenter lui-même" et qu'il se trouve "dans l'incapacité de maintenir lui-même sa température corporelle".
Ils indiquent en outre que le bébé âgé d'une dizaine de jours doit boire du lait adapté, qu'il est "sous surveillance cardiaque et respiratoire constante afin de prévenir toute défaillance" et que "la mère toxicomane semble avoir consommé pendant sa grossesse puisque l'enfant a des traces de stupéfiants constatées à l'hôpital".
D'après ce procès-verbal, Santiago aurait été nourri pour la dernière fois le 21 octobre, à 21 heures, et devait manger à nouveau à minuit. Sans cette alimentation, il risque "une hypoglycémie sévère, voire un coma".
Les policiers précisent qu'ils ont fait estimé la "durée de vie" de l'enfant en l'absence de soin. Un pédiatre annonce "une espérance de vie de douze heures, qu'il ramène ensuite à 2 ou 3 heures en l'absence de surveillances et de soins".
Ce constat alarmiste et a été suivi par le déclenchement de l'alerte enlèvement, qui fut effective quelques heures plus tard.
Un autre diagnostic "plus nuancé"
Un second procès-verbal, rédigé cette fois le 23 octobre à 19h10, soit deux jours après l'enlèvement de Santiago, rapporte un échange téléphonique avec un médecin en sa qualité de "responsable du service pédiatrique de l'hôpital Robert Ballanger".
Le spécialiste se veut cette fois plus rassurant. L'écrit indique qu'il est "plus nuancé que les premières informations reçues".
D'après le médecin, le nourrisson, avant son enlèvement, "commence à s'alimenter en tétant de très petites quantités de biberon", dispose d'une prescription médicamenteuse "non vitale" et qu'il n'a pas besoin d'assistance respiratoire ni ne présente de problème cardiaque.
Le médecin remet en cause le pronostic vital engagé sous 12 heures. A ses yeux, il n'avait lieu d'être uniquement si Santiago "n'avait pas été alimenté par un biberon et n'avait reçu aucune alimentation par voie gastrique".
Il s'inquiète toutefois et précise que le nourrisson n'est pas capable de prendre assez de biberon "pour se développer convenablement". Il prévoyait de le laisser sortir de l'hôpital sous 4 semaines.
Ces différents procès-verbaux soulèvent plusieurs questions, notamment sur le déclenchement de l'alerte enlèvement sans le premier diagnostic. Aussi, le procureur avait indiqué ouvrir une enquête pour enlèvement de mineur de moins de 15 ans contre les parents au nom de "l'usage abusif de l'autorité parentale" en raison de la mise en danger que constituait son enlèvement de l'hôpital.
Si l'enfant n'était pas en danger de mort, l'usage de l'autorité parentale est-il toujours considéré comme abusif ? Ce changement pousse à l'interrogation, notamment sur une éventuelle requalification de l'enquête. Contacté par BFMTV, le parquet de Bobigny n'a pour l'instant pas répondu.