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"Avec ma fille, on dort dans les gares": à Paris, la détresse des familles à la rue

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Les Jeux de Paris sont terminés, mais les sans-abris, souvent avec des enfants, sont toujours aussi nombreux dans les rues de la capitale. Même si la préfecture dit agir en réalisant des mises à l'abri, les familles restent sans logement ou avec des solutions inadaptées.

Chaque soir, c'est la même incertitude. Après l'école, les enfants attendent avec leurs parents devant l'hôtel de ville de Paris dans l'espoir de trouver un toit pour passer la nuit. Souvent en vain.

Lors des Jeux olympiques de Paris les campements de personnes sans abri s'étaient faits très rares dans les rues de la capitale mais depuis, les associations constatent le retour à la rue des populations les plus précaires. En ce mois de rentrée scolaire, des dizaines d’enfants se retrouvent sans abri avec leurs parents.

"Avec ma fille, on dort dans les gares. On a déjà dormi à la gare de Nice. Ici, j'ai déjà dormi à la gare de Lyon", raconte à BFM Paris-Ile-de-France Esther Bance, une sans-abri venue du Burkina Faso

"Je téléphone au 115. Ça sonne. Occupé, occupé, occupé. Il n'y a pas d'hôtel. Il n'y a pas d'endroit pour dormir. On doit dormir dans les parkings, dans la rue, avec les cartons, avec le bébé. Franchement, ce n'est pas bien", dénonce Boucria Nadjib, un sans-abri tunisien, père d'un nourrisson.

"Constamment dans une incertitude"

Ces familles se retrouvent sans solution d'hébergement. Une situation inacceptable, selon l'association Médecins du Monde. "Le fait d'être à la rue, d'être constamment dans une incertitude de l'endroit où l'on va pouvoir dormir ce soir fait que les questions de suivi médical, de rendez-vous sont forcément dans un plan qui est secondaire parce qu'on s'occupe avant tout de sa survie", explique Milou Borsotti, chargé de projet pour Médecins du Monde.

Pourtant, la préfecture de région assure déployer les grands moyens. D'après elle, 256 personnes ont été relogées de façon pérenne à l'issue des Jeux olympiques.

"L'État a des actions, des mises à l'abri chaque semaine, tous les quinze jours. En 2021, nous avons eu 28 mises à l'abri, 7.000 personnes. En 2022, à peu près les mêmes chiffres. Nous avons continué cette année, ce n'était pas lié aux Jeux olympiques. C'est une action qu'on doit mener pour éviter que cette situation perdure", a indiqué Marc Guillaume, préfet de la région Ile-de-France et préfet de Paris, au micro de BFM Paris-Ile-de-France.

En 2023, 167 familles sans réponse favorable

Et même lorsque la préfecture propose des solutions d'hébergements aux familles, celles-ci ne sont pas toujours satisfaisantes. Akaene Seri est maman de deux fillettes de 4 et 5 ans. Depuis plusieurs mois, avec ses enfants, elle dort dans la rue ou dans le métro. Il y a quelques jours, la préfecture lui a enfin proposé une alternative et les a orientés vers Besançon.

"Laëticia doit se faire opérer dans tout au plus un mois et la préfecture de Paris me dirige à 4 heures de Paris. C'est compliqué pour moi. Je ne sais pas ce qu'il faut faire au juste", se désole la mère de famille sans-abri.

Une situation qui constitue une atteinte grave à la dignité humaine, selon son avocat qui en appelle à l'État. "Je souhaite que la préfecture de la région prenne en compte, lorsqu'on saisit un juge, la situation particulière et individuelle de chaque famille et qu'elle n'oriente pas de façon automatique des familles vers des sas", prévient Samy Djemaoun.

L'année dernière, à Paris, 167 familles, dont 250 mineurs, n'ont pas eu de réponse favorable à leur demande d'hébergement auprès du 115.

Constance Bostoen, Rémi Sanlis avec Emma Forton