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Les pluies intenses et durables en France renforcées par le réchauffement climatique?

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Alors que les averses sont nombreuses ces dernières semaines, les scientifiques rappellent que la variabilité du climat peut occasionnellement causer des printemps pluvieux. En raison du réchauffement climatique, les pluies intenses sont cependant amenées à se multiplier.

Des pluies probablement loin de s'arrêter. Alors que l'Hexagone connaît actuellement un temps maussade en ce printemps, la tendance ne semble pas indiquer une évolution positive. De fait, le réchauffement climatique contribue en partie à l'augmentation des fortes averses, selon les scientifiques.

"On a une succession de perturbations depuis le mois d'octobre, il n'y a pas eu de pauses sèches durables", avec "des cumuls de pluies qui s'approchent des records sur plusieurs mois notamment aux régions nord", soulignait cette semaine auprès de BFMTV le prévisionniste chez Météo France François Jobard.

Mais attention aux conclusions hâtives. "Ça fait partie de notre climat d'avoir des séquences de temps plus perturbé, instable (...) en soi, il n'y a rien d'inhabituel", rappelle-t-il. "Ce qui est notable, c'est le côté durable".

La France a connu des précipitations plus élevées que la normale en mai 2024
La France a connu des précipitations plus élevées que la normale en mai 2024 © Météo France

Le directeur adjoint scientifique de la climatologie et des services scientifiques à Météo France Jean-Michel Soubeyroux souligne de son côté auprès de BFMTV.com que "le lien de la situation actuelle avec le changement climatique n'est pas facile à établir et relève avant tout de la variabilité naturelle des précipitations en France, après deux années marquées par les sécheresses".

"Des situations de printemps très humide ont été aussi observées en 2018, 2016 (inondations de la Seine), 2013 (inondations dans les Pyrénées) ou 2008", note-t-il.

Les pluies intenses plus fréquentes

En revanche, le changement climatique a, selon les scientifiques, un rôle sur les phénomènes météorologiques extrêmes, comme l'expliquait jeudi à Libération le climatologue Robert Vautard.

"Les pluies intenses sont l'un des deux visages météorologiques du changement climatique, moins connu que la hausse des températures", indique Robert Vautard.

"Le changement climatique peut accentuer l'intensité des précipitations extrêmes, notamment lors des orages", abonde Jean-Michel Soubeyroux.

Concrètement, le réchauffement global moyen entraîne une hausse de l'humidité, évaluée à environ "7% d'humidité supplémentaire" pour 1 degré d'augmentation. Les nuages se retrouvent gorgés d'eau et les pluies sont donc plus nombreuses.

Un phénomène plus intense qu'attendu

Parmi les travaux consacrés à ce sujet, une étude publiée en novembre dernier par l'Institut de Potsdam pour la recherche sur l’impact climatique (PIK) établissait bien un lien entre réchauffement climatique et pluies intenses, indiquant que le phénomène est même plus intense qu'attendu par les experts.

"Notre étude confirme l'augmentation exponentielle de l'intensité et de la fréquence des fortes précipitations extrêmes avec l'accroissement du réchauffement climatique", indiquait dans un communiqué le principal auteur de l'étude, Max Kotz.

"Les pluies extrêmes seront plus fortes et plus fréquentes. La société doit s’y préparer", prévenait par ailleurs le chercheur Anders Levermann. L'Asie du Sud-Est et l'Amérique du Nord devraient être les régions les plus touchées bien avant la France, estiment cependant les chercheurs.

Les régions sèches aussi touchées

En avril dernier, une étude du réseau World Weather Attribution (WWA) avait également estimé que le réchauffement climatique était l'explication "la plus probable" aux pluies diluviennes survenues dans les Émirats arabes unis et à Oman dernièrement. 

Les précipitations durant les années marquées par le phénomène El Niño ont augmenté de 10 à 40% dans ces pays pétroliers du Golfe, notaient les chercheurs.

Les inondations records survenues dans les pays du Golfe montrent "que même les régions sèches peuvent être fortement touchées par les précipitations, une menace qui augmente avec le réchauffement climatique dû aux combustibles fossiles", soulignait Sonia Seneviratne, professeur à l'université ETH de Zurich et membre du WWA.

L'augmentation des fortes pluies n'est pas la seule conséquence du réchauffement climatique. Sur les 26 événements climatiques extrêmes survenus en 2023 et identifiés par des chercheurs européens du consortium XAIDA, 23 sont attribuables au changement climatique d'origine humaine, selon des conclusions rendues en février dernier. Parmi eux la tempête Ciaran en France ou les inondations en Libye.

Juliette Desmonceaux