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Syrie : l’ONU peut-elle régler le conflit ?

Kofi Annan, l'émissaire de l'ONU pour la Syrie, se rend ce mardi à Téhéran en Iran, pour demander un soutien à son plan de paix.

Kofi Annan, l'émissaire de l'ONU pour la Syrie, se rend ce mardi à Téhéran en Iran, pour demander un soutien à son plan de paix. - -

Les violences s’intensifient en Syrie, peu avant l’application du plan de Kofi Annan. En Turquie, les réfugiés et blessés s’entassent « dans des conditions sanitaires minimales ». Et pour certains spécialistes, « tout dérapage militaire serait une véritable catastrophe »…

Ce mardi, le plan de Kofi Annan, l'émissaire de l'ONU pour la Syrie, doit en principe être mis en place. Il prévoit le retrait de l'armée des villes, en préalable à un cessez-le-feu 48 heures plus tard. Mais, après avoir accepté ce plan début avril, Damas a exigé ce dimanche des « garanties écrites » de l'opposition. Et sur place, les violences s’intensifient.
Après la Chine et la Russie, Kofi Annan se rend ce mardi à Téhéran en Iran, pour demander un soutien à son plan de paix.

« 25 000 réfugiés, dont des blessés graves… »

Des heurts ont éclaté à la frontière entre la Syrie et la Turquie, où « environ 25 000 réfugiés [du régime de Bachar al-Assad], y compris ces derniers jours des blessés parfois graves » s'entassent dans des campements, témoigne Didier Reynders, le ministre belge des Affaires Etrangères, sur place la semaine dernière : « Ce sont des villages, des conteneurs installés dans les zones frontalières, pour accueillir des populations dans des conditions sanitaires minimales, mais la région n’est évidemment pas équipée pour accueillir et loger des populations de réfugiés. Je comprends l’inquiétude des autorités turques qui voient arriver sur leur territoire, jour après jour, des milliers de personnes ; et ça risque de s’intensifier si les violences continuent ».
Ces dernières 48 heures, les bombardements de l'armée syrienne ont tué au moins 115 personnes, uniquement dans la province d'Idlib, dans le nord du pays. On parle de plus de 300 morts depuis trois jours. Et ce mardi matin, des chars syriens ont ouvert le feu dans le centre de la ville de Hama et certains quartiers de Homs subissent des tirs de mortiers. Depuis le début de la révolte en Syrie, en mars 2011, le bilan est lourd : plus de 9000 morts et des dizaines de milliers de blessés, selon l’ONU.

« Bachar al Assad a compris qu’il n’y aura pas d’intervention militaire »

Pour Didier Billion, directeur des publications de l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) et rédacteur en chef de La revue internationale et stratégique, si le plan Annan n’est pas respecté par Damas, c’est « pour deux raisons : Bachar al Assad a compris depuis des mois qu’il n’y aurait pas de sanctions réelles de l’ONU, pas d’intervention militaire, donc il gagne du temps, il essaie de "nettoyer" les villes qui ont été aux mains des insurgés, pour être en position de force lors des pourparlers. Et parce que l’opposition syrienne, très divisée, est plutôt en perte de vitesse ». Convaincu qu’on est « obligés d’en passer par le niveau politique et diplomatique », Didier Billion ajoute : « Tout dérapage militaire serait une véritable catastrophe, pour la Syrie et qui constituerait une onde de choc de déstabilisation régionale ».

« Ne pas attendre des miracles de l’ONU »

Richard Labévière est journaliste, spécialiste de la Syrie, et auteur l'an dernier du livre Quand la Syrie s'éveillera… Cette crise syrienne n'est-elle pas la preuve de l'incapacité de l'ONU à régler les conflits internationaux ? « Dans le grand public, il y a une fausse perception des Nations Unies. L’ONU n’est pas un gouvernement mondial qui règle les crises à coups de baguette magique. L’ONU a la force et les faiblesses de son Conseil de sécurité. Les Etats-Unis, la Russie, la France, la Grande-Bretagne et la Chine sont souvent en désaccord sur la gestion des crises internationales, dans la mesure où ces 5 pays défendent principalement leurs intérêts. L’ONU n’y arrive pas parce que ça n’est pas un exécutif compact ; donc il ne faut pas en attendre des miracles ».

La Rédaction, avec Benjamin Smadja