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Sous-marins: comment les autorités françaises régulent le boom des submersibles privés

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Le marché des submersibles est en pleine expansion sur le littoral méditerranéen français. Un essor que les autorités ont décidé d'accompagner en adaptant la régulation, plutôt que de tenter de l'enrayer.

C'est une économie en plein développement. Le sous-marin disparu avec ses cinq membres d'équipage à proximité de l'épave du Titanic, dans le nord-ouest de l'océan Atlantique, témoigne du développement de l'usage de ce type d'appareils privés qui permettent à ceux qui en ont les moyens d'accéder à une expérience jadis réservée aux usages militaires et scientifiques: l'exploration des fonds marins. Les entreprises en tête du marché des sous-marins ont presque toutes été créées dans la dernière décennie et multiplient aujourd'hui les projets ambitieux.

Une tendance à laquelle n'échappe pas la France, selon l'amiral Thierry Duchesne, commissaire général de la Marine et directeur du département maritime de la Fondation méditerranéenne d’étude stratégique. Pour Le Titre à la Une, le podcast de BFMTV, il détaille le phénomène et surtout la réponse des autorités sur le volet de la régulation.

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"Très fort développement des sous-marins privés"

"Ce qui m’a beaucoup frappé en Méditerranée française, c’est le très fort développement des sous-marins privés, des sous-marins de plaisance", partage cet expert basé à Toulon (Var).

Selon lui, ce développement est dû à l'arrivée "d'opérateurs qui rendent accessible la capacité d’aller sous la mer", même si les prix des appareils de loisir restent très élevés et que le prix d'une place se chiffre toujours en milliers voire dizaines de milliers d'euros. Pour le Titan, vanté comme capable d'évoluer en eau particulièrement profonde (jusqu'à 4000 mètres, pour atteindre le paquebot Titanic, à environ 3800 mètres), le ticket valait 250.000 dollars.

"[Pour] 3800 mètres, c’est un coût élevé, en revanche la plongée à 100 mètres est beaucoup moins onéreuse et vous pouvez acquérir un sous-marin pour 500.000€ donc ça va se démocratiser énormément", estime l'amiral.

Il évoque à ce titre la société U-Boat Worx, "qui est en train de développer un sous-marin qui va transporter 120 personnes". L'entreprise a en effet présenté en juin 2022 les plans de sa "Plate-forme de divertissement sous-marine", un sous-marin de 35 mètres doté de hublots de deux mètres de diamètres et capable de plonger jusqu'à 150 mètres de profondeur pendant 18 heures au maximum.

Nouvelle réglementation en 2016

Thierry Duchesne raconte que c'est en 2016, alors que le marché des sous-marins privé était en plein boom (plusieurs entreprises devenues aujourd'hui les poids lourds du secteur ont été fondées dans la décennie précédente) que l'idée qu'une régulation était nécessaire s'est imposée en France.

"On s’est posé ces questions: est-ce qu’on résiste à ces avancées qui sont un peu inéluctables ou est-ce qu’on essaie de l’accompagner. C’est la deuxième partie qui a été choisie", explique l'amiral.

Plusieurs points de régulation ont ainsi été formalisés et "aujourd’hui, il n’est plus interdit de plonger dans la mer territoriale française".

Les sorties en appareil sous-marins de loisir sont toutefois très encadrées, explique l'amiral : "un sous-marin privé ne pourra le faire que s’il a l’accord de l’autorité maritime, comme le préfet maritime en Méditerranée, et s’il plonge sur des sites qui ont été identifiés à l’avance. Et dans les sites identifiés à l’avance, il y a la profondeur : c’est-à-dire qu’on sait qu’à cette profondeur-là, le sauvetage est encore possible. À d’autres profondeurs, ce n’est plus possible".

Et pour les contrevenants, les peines peuvent s'élever jusqu'à 1 an de prison et 150.000€ d'amende.

Les fonds marins, objets de convoitise

Cette nouvelle réglementation n'a pas uniquement été mise en place pour permettre la sécurité des amateurs de sensations fortes, mais aussi pour permettre de garantir l'intégrité des "trésors" des fonds marins.

"Vous avec beaucoup de sociétés qui sont intéressés par le fait d’aller piller des épaves grecque, romaines ou du XVIIe siècle qui gisent sur nos fonds marins", expose Thierry Duchesne, "vous avez des trésors en termes de biologies: le corail rouge intéresse beaucoup en Méditerranée" pour la fabrication de bijoux et de pièces ornementales.

"Il faut aussi protéger les fonds marins de certaines intrusions qui pourraient aussi les perturber", rappelle l'amiral, car les submersibles ne passent pas inaperçus, notamment à cause de leur moteur.

Glenn Gillet