Québec : l'explosion d'un train rempli de pétrole fait au moins 5 morts

Le conducteur du train affirme avoir mis les freins des locomotives et des wagons à l’extérieur de la ville. - -
C’est un véritable train fou qui a traversé la ville de Lac-Mégantic, au Québec, avant d’exploser. Cinq morts ont été jusqu'ici retrouvés dans cette petite ville où le train transportant du pétrole brut a déraillé et explosé samedi, a annoncé la police canadienne qui fait également état d'une quarantaine de disparus. « On a encore trouvé deux corps, ce qui porte le total à cinq morts, et il y a une quarantaine de personnes qui sont portées disparues - c'est peut-être moins, peut-être plus », selon le porte-parole de la police, Michel Brunet. Alors qu'il était stationné en dehors de la ville et que son conducteur n'était pas à bord, le convoi composé de cinq locomotives et de 72 wagons-citernes s'est mis, pour une raison encore inexpliquée, à rouler à grande vitesse vers le centre-ville. Chaque wagon-citerne transportait 113 000 litres de pétrole brut du Dakota du Nord vers l'est du Canada.
Emporté par sa vitesse, le train a déraillé et au moins quatre wagons ont explosé vers 01h00 du matin samedi, provoquant une gigantesque boule de feu au cœur de cette petite ville de 6 000 habitants à 250 kilomètres à l'est de Montréal, en bordure d'un grand lac. Près de 2 000 habitants ont été évacués.
La ligne de chemin de fer appartient à la compagnie Montreal, Maine & Atlantic (MMA). Dimanche matin, deux wagons étaient encore en feu et des nuages de vapeur s'élevaient du centre-ville bouclé par la police. Les pompiers ont annoncé que deux autres wagons-citernes risquaient d'exploser.
« Ce sont nos garçons et nos belles-filles qui y sont passés »
Raymond Lafontaine est habitant de Lac Mégantic. Dans le drame, il a perdu ses deux fils et ses deux belles filles et à la tristesse s'ajoute la colère. « Il n’y avait aucune raison qu’on laisse passer une bombe atomique chez nous. Il doit y avoir d’autres endroits, où il n’y a pas de civilisation », demande-t-il. « Il ne faut plus que ça passe chez nous, ça arrivera d’autres fois. Aujourd’hui, ce sont nos garçons et no belles-filles qui y sont passés, ce sont nos vies coupées à moitié. Il va falloir que ça arrête, que nos dirigeants écoutent, je suis dégouté par des évènements qui auraient pu être évités. Nos politiciens sont là pour nous protéger, ils ne nous protègent pas, c’est une course à l’argent ».
« Je viens de perdre 15 ans de travail »
Si Daniel Larochelle a la chance de ne pas avoir perdu de membres de sa famille, ce propriétaire de plusieurs commerces dans la zone sinistrée en revanche l’impression d’être ruiné. « La première chose qu’on se dit, c’est "tu es en vie". Moi, j’avais quatre commerces en bas, un salon de coiffure, un salon de massage, une autre boutique, il n’y a plus rien. Je n’ai plus de bureau, plus de dossier. Là je suis au repos, je me demande si je vais avoir la force de recommencer. Je viens de perdre 15 ans de travail ».
Le centre-ville très fréquenté au moment de l'accident
Des photos publiées par les autorités montrent des bâtiments détruits, des amoncellements de gravats et des souches d'arbres calcinées. Les livraisons de brut par voie ferrée sont en constante augmentation en Amérique du Nord à mesure que la production pétrolière des régions de l'Ouest, comme l'Alberta et le Dakota du Nord, augmente. Le Premier ministre canadien Stephen Harper est attendu dans la journée dans la ville sinistrée.
Le pétrole en feu s'est répandu dans les égouts et a propagé l'incendie dans plusieurs rues, a précisé le président de la MMA, Edward Burkhardt. Selon lui, le mécanicien avait garé le train à l'extérieur de la ville plusieurs heures avant le drame. « Il assure avoir enclenché les freins des cinq locomotives. Il affirme aussi avoir enclenché les freins de suffisamment de wagons du train », a dit à Reuters Edward Burkhardt. Le vice-président de MMA, Joseph R. McGonigle, avait auparavant estimé que le chef de train avait « respecté les règles ». « Nous ne savons pas encore ce qui s'est passé », a-t-il toutefois admis.
Le centre-ville était très fréquenté au moment de l'accident, notamment un bar très apprécié par les jeunes. « De nombreuses personnes sont inquiètes car elles n'ont pas de nouvelles de leurs proches », a dit Colette Roy-Laroche, maire de Lac-Mégantic, sur Radio Canada.