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Pression de Trump, indépendance... Les habitants du Groenland appelés aux urnes à un moment crucial

Une vue d'un quartier de la ville de Nuuk, au Groenland, le 10 mars 2025.

Une vue d'un quartier de la ville de Nuuk, au Groenland, le 10 mars 2025. - Odd ANDERSEN / AFP

Convaincu de pouvoir s'emparer "d'une manière ou d'une autre" du territoire autonome danois, Donald Trump a tenté jusqu'à la dernière minute de peser sur le scrutin.

Un scrutin aux enjeux majeurs. Mardi 11 mars, les presque 57.000 habitants du Groenland sont appelés aux urnes dans le cadre d'élections législatives qui doivent renouveler les 31 sièges de l'Inatsisartut, le Parlement local de ce pays constitutif du royaume du Danemark.

Alors que le président des États-Unis Donald Trump a multiplié les appels du pied plus ou moins grossiers pour que cette île d'une superficie de plus de 2 millions de km² ne rejoigne le giron américain, le vote de ce mardi doit surtout tracer les grandes lignes du futur du Groenland, où les velléités d'indépendance du Danemark se font de plus en plus fortes.

Vers une indépendance?

Le verdict des urnes établira un rapport de forces entre ceux qui la veulent rapidement comme les nationalistes de Naleraq, principale force d'opposition, et ceux qui la conditionnent aux progrès économiques du Groenland comme les deux composantes de la coalition sortante, Inuit Ataqatigiit (IA, gauche écologiste) et Siumut (sociaux-démocrates).

Sur ces terres où les habitants, à près de 90% inuits, déplorent souvent avoir été traités comme des citoyens de second rang par l'ex-puissance coloniale danoise, tous les principaux partis souhaitent l'indépendance, mais ils divergent sur le calendrier.

Pour les indépendantistes les plus impatients, le Groenland pourra voler de ses propres ailes grâce à ses ressources minérales, notamment ses terres rares, essentielles à la transition verte.

Mais le secteur minier reste pour l'heure ultra-embryonnaire, plombé par des coûts élevés dus notamment à un climat inhospitalier et l'absence d'infrastructures.

Les Groenlandais contre le rattachement aux États-Unis

Alors que se profilaient les législatives, une nouvelle inconnue est venue se mêler à la vie politique locale: les États-Unis de Donald Trump.

Après avoir déjà lancé l'idée d'acheter le Groenland durant son premier mandat, s'attirant une fin de non-recevoir des autorités danoises et groenlandaises, le président américain martèle ces derniers mois sa volonté de mettre la main, sans exclure la force, sur le territoire jugé important pour la sécurité américaine face à la Russie et à la Chine.

Convaincu de pouvoir s'emparer "d'une manière ou d'une autre" du territoire autonome danois, Donald Trump a tenté jusqu'à la dernière minute de peser sur le scrutin, provoquant stupéfaction, rejet et, plus rarement, enthousiasme parmi les 57.000 habitants.

Selon un sondage paru en janvier, quelque 85% des Groenlandais excluent l'éventualité d'être rattachés aux États-Unis.

"Fuck Trump!"

Les déclarations du président américain, qualifié d'"imprévisible" par le Premier ministre groenlandais sortant Mute Egede (IA), ont brouillé les cartes pendant la campagne électorale. "C'est un choix fatidique que nous avons à faire", ajoute-t-il.

"Fuck Trump! On ne veut pas être américains. Il est tellement arrogant", réagissait lundi Rene Olsen, 58 ans, un employé de réparation navale.

Les nationalistes de Naleraq y voient toutefois des armes confortant les Groenlandais avant l'ouverture de négociations avec le Danemark.

"Le message de Trump est positif car il offre un cadre plus sûr et plus stable pour le mouvement indépendantiste", a affirmé un cadre du parti, Juno Berthelsen. "Nous avons besoin des États-Unis pour notre sécurité nationale et vice versa", a-t-il souligné.

Ces sorties ont aussi parfois pour effet de refroidir les ardeurs indépendantistes et d'encourager au maintien de liens avec Copenhague. Employée municipale du village de Qaqortoq (sud), Kornelia Ane Rungholm ne veut pas de "l'indépendance aujourd'hui parce que Trump s'emparera de nous aussitôt".

Reste que, même minoritaire, la parole de Donald Trump trouve un certain écho au Groenland, notamment via Jorgen Boassen, un ancien maçon considéré comme le relais du mouvement "Make America Great Again" sur l'île signale Le Monde. C'est d'ailleurs lui qui a accueilli il y a quelques semaines le fils de Donald Trump lors d'un séjour sur l'île très médiatisé.

https://twitter.com/Hugo_Septier Hugo Septier avec AFP Journaliste BFMTV