Philippines: la "guerre contre la drogue" prolongée jusqu'en 2022

Le président philippin Rodrigo Duterte lors d'une conférence de presse, le 30 janvier 2017 à Manille - NOEL CELIS, POOL/AFP
Le président philippin Rodrigo Duterte a qualifié lundi la police luttant contre le trafic de drogue de "corrompue jusqu'à la moelle", mais a néanmoins prorogé sa sanglante campagne contre les stupéfiants jusqu'en 2022.
L'avocat populiste a annoncé qu'il entendait "nettoyer" la police, mise en cause depuis plusieurs semaines dans de sordides affaires d'extorsion, dont celle d'un homme d'affaire sud-coréen enlevé par des agents des stups et assassiné au sein même du siège de la police nationale (PNP).
"Vous, les policiers, vous êtes les plus corrompus. Vous êtes corrompus jusqu'à la moelle. C'est dans votre sang", a-t-il dit aux journalistes en parlant des policiers accusés de l'enlèvement et du meurtre du Sud-Coréen.
Plus de 6.000 morts
Depuis son investiture fin juin, les policiers ont tué plus de 2.500 "suspects". Dans le même temps, près de 4.000 personnes ont péri dans des circonstances inexpliquées, leur dépouille étant souvent retrouvée abandonnée dans la rue près d'un bout de carton accusant la victime d'être un toxicomane ou un trafiquant.
Après avoir déjà repoussé en mars le terme de cette campagne, Rogerio Duterte a annoncé lundi qu'il ne l'arrêterait pas.
Les opérations de police suspendues
"Je vais la prolonger jusqu'au dernier jour de mon mandat", a-t-il dit aux journalistes. Aux Philippines, le président est élu pour un mandat unique de six ans.
Après les déclarations du président, le chef de la PNP Ronald Dela Rosa a annoncé que les activités de toutes les unités de la police des stupéfiants seraient suspendues le temps que soit mené le "nettoyage" annoncé par le président.

Début janvier, Rogerio Duterte a même affirmé qu'il acceptait que les policiers se livrent à des activités illégales pour arrondir leurs fins de mois, tant que celles-ci n'étaient pas liées aux stupéfiants.
"Faites des trafics si vous voulez, mais pas de drogue", a-t-il dit, avant de déplorer que les policiers ne soient pas suffisamment payés.
"Si quelqu'un vous propose de l'aide, acceptez là"
"Je ne dis pas qu'il faut nécessairement faire des choses illégales, je dis que, tant que le gouvernement ne vous paie pas plus, si quelqu'un vous propose de l'aide, acceptez-la."
La complaisance du gouvernement vis-à-vis de la police suscite l'indignation de mouvements de défense des droits de l'Homme.
"Comment une force de police fasciste et corrompue, où l'impunité est la loi, pourrait venir à bout du trafic de drogues?", demandait lundi dans un communiqué le secrétaire général de la coalition de gauche Bayan, Renato Reyes.
"Le bilan va continuer de grimper, davantage de criminels en uniforme continueront de semer le chaos dans nos rues", a t-il ajouté.