Panama papers: la presse panaméenne grince des dents

Le Panama est dans l'oeil du cyclone à cause des "Panama papers" - Joe Raedle - AFP
Le couperet est tombé lundi, quand les médias de plus de 80 pays ont publié une enquête tentaculaire sur laquelle 400 journalistes ont travaillé durant neuf mois. Si l'affaire d'évasion fiscale est d'envergure mondiale, le scandale éclabousse surtout le Panama. Relativement absent des médias internationaux, le petit pays se retrouve dans l'œil du cyclone et son nom se retrouve sur toutes les lèvres. La pilule passe mal dans la presse panaméenne qui se fait l'écho d'un sentiment d'humiliation et d'injustice.
Un sentiment d'honneur bafoué
Les médias nationaux relaient une certaine colère et surtout le sentiment d'un honneur bafoué. Le site Panama America estime que l'affaire a causé "un tort terrible à l'image du pays et a jeté, de manière négative, le nom de Panama dans les principaux médias du monde". Plus encore, les journalistes qui ont travaillé sur l'enquête auraient fait un mauvais choix éditorial :
"C'est une erreur de nommer "Panama papers" ce travail, quand en réalité il aurait dû s'appeler Mossak Fonseca Papers (…) C'est un manque de respect envers les panaméens de mettre en doute la réputation de tout un pays à cause des activités d'une compagnie privée d'avocats".
Dans Dia a dia, c'est l'impression d'être jeté en pâture aux loups de la presse internationale, qui domine. Le média rapporte un appel de la Chambre de Commerce, des industries et de l'Agriculture du Panama, à une "unité nationale pour la défense du nom du pays". Le pays payerait les pots cassés d'une affaire dans laquelle il ne serait qu'un acteur parmi d'autres. "Dans l'information divulguée sous le nom de Panama Papers, 20 autres pays sont impliqués et pourtant seul le Panama est nommé".
Même son de cloche du côté du site El Siglo, qui insiste sur l'idée que la principale victime du scandale serait l'honneur du Panama. "Le pays passe maintenant pour un paradis fiscal, dans le monde entier".
Les Panama Papers, un scandale sous forme de représailles?
La Estrella de Panama va même plus loin et sous-entend que cette affaire n'est que représaille. Si le site déplore le fait que la réputation de paradis fiscal va coller à la peau de l'Etat, l'accent est surtout mis sur une certaine duplicité de la part d'un "groupe de pays plus développés qui désirent nous imposer sa volonté tout en prêchant un double discours".
"Le Panama papers s'inscrit dans la continuité des attaques lancées par l'OCDE au Panama, pour n'avoir pas signé le compromis d'accord automatique d'information fiscale. Ceci n'est pas une attaque contre la firme Mossack y Fonseca, mais contre la plateforme de services internationaux que Panama offre depuis plus de 50 ans et qui inclue tout le système financier."
"Le monde n'est pas parfait, nous n'avons pas de baguette magique"
Parmi les différents médias panaméens, La Prensa est celui qui s'intéresse le moins l'image écornée du pays plutôt qu'aux dessous du scandale. Le titre propose une interview exclusive de Ramon Fonseca Mora, cofondateur du cabinet d'avocat Mossack Fonseca, au cœur de l'affaire. S'il a voulu jouer la carte de la transparence en se disant "totalement franc", l'homme reste vague lorsqu'il est interrogé sur son implication dans l'affaire des "Panama papers".
"La plupart de notre clientèle est professionnelle et parfois elle revend les sociétés à des clients finaux qui parfois se mettent dans des problèmes. Le monde n'est pas parfait et nous n'avons pas de baguette magique pour savoir qui se met dans des problèmes et qui ne le fait pas".