Le "rapport César", document clé de l'enquête sur le régime syrien pour crimes contre l'humanité

L'information a été révélée ce mardi. Le 15 septembre dernier, le parquet de Paris a ouvert une enquête pour "crimes contre l'humanité", visant le régime du président syrien Bachar al-Assad. Si la justice française a décidé de se saisir de cette question, c'est parce qu'elle soupçonne la présence d'un Franco-Syrien parmi des victimes de torture en Syrie entre 2011 et 2013. Un soupçon motivé par la lecture d'un document horrifiant : le "rapport César".
Nom de code: "César"
Le 20 janvier 2014, la chaîne de télévision CNN et le quotidien The Guardian publiaient un rapport, commandé par le Qatar et rédigé par un cabinet d'avocats londoniens assistés de spécialistes de la justice internationale, accusant le régime de Damas d'avoir recours à la torture dans ses prisons. Ce rapport s'appuyait sur un lot de 55.000 photographies, authentifiées par des experts, de corps sans vie de personnes mutilées, décharnées, ainsi que celle d'un hangar où s'entassait une centaine de cadavres.
Ces photographies avaient été révélées par un ex-photographe de la police militaire syrienne. Son nom de code: "César". Comme l'expliquait Le Monde au moment de la révélation du rapport, "César" avait été chargé, dès le début de la révolte syrienne, de capturer les cadavres des opposants au régime tués ou torturés à mort. Jusqu'à cinquante morts par jour, dont l'image était conservée tant pour délivrer des certificats de décès aux familles que pour permettre à la hiérarchie de vérifier la bonne exécution des consignes.
11.000 victimes
Face à cette tâche, il ne faut pas beaucoup de temps à "César" pour décider de passer à la rébellion. En dix mois, une filière est mise en place pour récolter les preuves photographiques et exfiltrer leur auteur et sa famille. "César" fuit la Syrie, emportant avec lui une carte mémoire chargée d'environ 55.000 fichiers, soit au moins 11.000 victimes.
La révélation de ces documents, ainsi que la rédaction du rapport, devaient au départ servir à la constitution d'un dossier pour crimes contre l'humanité par l'ONU. Un groupe de juges et de juristes s'était d'ailleurs lancé dans la conception d'une cours pour permettre aux familles des victimes de se faire entendre, sans suite à l'heure actuelle. Alors que la crise syrienne est au centre des discussions de l'Assemblée générale des Nations unies, l'ouverture de cette enquête par la justice française permettra peut-être de faire avancer sa résolution.