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Palestine

Offensive, évacuation massive et "inévitable", renfort de réservistes... Que sait-on du projet d'Israël pour Gaza-ville?

Un soldat israélien opère un char à une position le long de la frontière sud d'Israël avec le nord de la bande de Gaza le 19 mars 2025.

Un soldat israélien opère un char à une position le long de la frontière sud d'Israël avec le nord de la bande de Gaza le 19 mars 2025. - Jack GUEZ

Après la validation du plan de l'armée israélienne, les Gazaouis se préparent à une offensive de l'armée israélienne, qui a pour objectif la prise de contrôle de la bande de Gaza. Une opération qui nécessite, en amont, l'évacuation massive de la population palestinienne.

Une offensive qui semble de plus en plus imminente. Depuis que le plan de l'armée israélienne visant à prendre le contrôle de la ville de Gaza a été approuvé à la fin du mois d'août, les préparatifs vont bon train, à l'approche du troisième anniversaire des attaques du 7-Octobre. Ce mardi 2 septembre, des milliers de réservistes ont été réintégrés aux rangs de l'armée israélienne dans ce but.

L'armée israélienne se prépare "sur le plan logistique et opérationnel à des opérations de combat étendues", indique un communiqué de Tsahal.

"Les troupes suivent une série d'entraînements au combat à la fois en milieu urbain et en terrain vague pour améliorer leur préparation aux missions à venir", ajoute l'armée, à l'heure où les frappes israéliennes se poursuivent sur la bande de Gaza.

Selon les termes du plan, qui a pour but de "vaincre le Hamas", Israël souhaite mener à son but l'opération, baptisée "Chariots of Gideon II" à Gaza, dévastée après plus de deux ans de guerre et l’intensification des bombardements israéliens et dont 75% de l’enclave est contrôlée par Tsahal.

• Vers un assaut généralisé

Le plan israélien tient en cinq principes devant aboutir à la fin de la guerre: l'État hébreu entend obtenir le désarmement du Hamas et le retour de tous les Israéliens pris en otage le 7 octobre 2023, qu'ils soient vivants ou morts. Israël compte également "démilitariser" la bande de Gaza tout en y assurant le "contrôle sécuritaire" et établir, en finalité, une "administration civile alternative qui ne soit ni le Hamas ni l'Autorité palestinienne".

Le gouvernement de Benjamin Netanyahu assure vouloir un assaut généralisé sur Gaza-ville, avec 60.000 réservistes appelés en renfort.

Cette nouvelle offensive sur Gaza-ville s'est décidée malgré une pression croissante, tant à l'étranger qu'au sein de la population israélienne, pour mettre fin de façon pacifique à la guerre en cours depuis près de trois ans et qui a entraîné un désastre humanitaire dans la bande de Gaza. Alors que l'offensive se prépare, Emmanuel Macron a prévenu mardi que l'offensive ne ferait pas obstacle à la reconnaissance de la Palestine voulue par la France.

• Plusieurs mois avant une prise de contrôle totale

Il faudra cependant des mois avant que ce plan ne puisse parvenir à exécution. Les opérations militaires au sud de Gaza-ville, ainsi que la récente progression de Tsahal vers Jabalia, au nord de la ville, forment une sorte de préambule menant à la prise de contrôle de la ville, rapporte le Jerusalem Institute for Strategy and Security.

Selon The Institute for National Security Studies, un groupe de réflexion spécialisé sur la politique israélienne en matière de sécurité, l'armée israélienne aura besoin de plusieurs semaines pour préparer ses forces à cette opération qui pourrait par ailleurs prendre des mois avant d'aboutir à la prise de contrôle totale de Gaza-ville.

Cette main-mise implique de facto l’évacuation du reste de la population gazaouie. L'opération pourrait se dérouler "dans les deux prochains mois en direction des camps de réfugiés situés dans le centre de la bande de Gaza et d'autres endroits", selon la radio publique israélienne Kan.

• Une évacuation massive redoutée

L'évacuation massive de la population est à craindre, selon Mirjana Spoljaric, présidente du Comité international de la Croix-Rouge, dans un communiqué. Or, elle estime qu’il est "impossible" que cette évacuation "puisse être menée à bien de manière sûre et digne dans les conditions actuelles", alors que l’état de famine a été déclaré par l’ONU à Gaza-ville, une première au Moyen-Orient, selon le rapport de l’IPC.

Malgré ces risques, plusieurs élus israéliens d’extrême droite, membre de la coalition gouvernementale israélien, dont le ministre des Finances Bezalel Smotrich, ont plaidé en faveur d’une occupation israélienne permanente de la bande de Gaza.

Le ministre a affirmé qu’Israël devait "exercer un contrôle total sur l’ensemble de la bande de Gaza, pour toujours" et a dit sa volonté d’annexer "un périmètre de sécurité” et d’ouvrir "les portes de Gaza à l’immigration volontaire".

Lors d'une réunion du cabinet de sécurité organisée dimanche 31 août, des échanges houleux ont opposé d'un côté Benjamin Netanyahu et ses ministres, qui souhaitent poursuivre l'offensive sur la ville de Gaza, et de l'autre le chef d'état-major de l'armée Eyal Zamir, qui a appelé les dirigeants politiques à parvenir à un accord de cessez-le-feu.

• Des négociations pour envoyer les Gazaouis à l'étranger

Benjamin Netanyahu a assuré début août auprès de Fox News, qu'Israël ne "conservera" pas le contrôle de la bande de Gaza. "Nous voulons la remettre à des forces arabes qui la gouverneront correctement, sans nous menacer, et offriront aux Gazaouis une vie agréable”, a-t-il déclaré, ajoutant vouloir "libérer" le territoire du Hamas.

Israël est donc "en pourparlers avec plusieurs pays" au sujet de l'accueil des Gazaouis déplacés, selon le Premier ministre. La Libye, l'Éthiopie, le Soudan du Sud, l'Indonésie et le Somaliland ont été mentionnés comme options possibles.

Ce possible déplacement de population est cependant fermement condamné par les Nations unies. "Un grand nombre de personnes seraient confinées dans des espaces encore plus réduits, avec des restrictions de mouvement. Donc, non, ce n’est certainement pas acceptable", a dénoncé la porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, Ravina Shamdasani.

"En tant que puissance occupante, Israël doit se conformer à toutes ses obligations en vertu du droit international, notamment du droit international humanitaire", a jugé de son côté le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.

• Un plan américain pour l'après-Gaza

De leur côté, les États-Unis s’intéressent eux aussi au futur de la bande de Gaza. Selon les informations du Washington Post, qui a consulté un prospectus de 38 pages sur un plan nommé GREAT Trust (pour Gaza Reconstitution, Economic Acceleration and Transformation Trust), l'administration Trump construit un plan pour faire de l’enclave palestinienne largement couverte de décombres un territoire sous tutelle à vocation touristique.

Depuis plusieurs mois, le plan est vanté par le président américain qui parle d'une volonté de construire une "Côte d'Azur du Moyen-Orient".

Donald Trump avait d'ailleurs été salué par Benjamin Netanyahu qui estimait que ce projet pourrait "changer l'Histoire".

Arthus Vaillant