Centenaire de 14-18: "Ce n'est pas le discours d'un président de gauche"

L'historien Nicolas Offenstadt, spécialiste de la Grande guerre, invité de Jean-Jacques Bourdin le 8 novembre 2013. - -
Pour l'historien Nicolas Offenstadt, spécialiste de la Grande guerre invité vendredi matin sur BFMTV, François Hollande a livré jeudi, à l'occasion de l'ouverture des commémorations pour le centenaire de la première guerre mondiale un "discours très consensuel et assez banal".
"Ce n'est pas le discours d'un président de gauche", a ajouté l'historien. "Il y a très peu de références de gauche, il a cité de Gaulle, il a cité Péguy, tout cela ne marque pas une volonté réformatrice, ou de s'inscrire dans la tradition de la gauche".
"On aurait pu attendre un nouveau discours sur les soldats coloniaux"
"Cette mise en série des différents moments de l'Histoire, c'est exactement ce que faisait Nicolas Sarkozy, a ajouté Nicolas Offenstadt. "D'ailleurs, quand il a évoqué la question des fusillés de la Frande guerre, il s'est mis lui-même dans les traces de ses prédécesseurs. Il cité Lionel Jospin et Nicolas Sarkozy. Donc là aussi, il n'y a pas de rupture".
"On aurait pu attendre un nouveau discours sur les soldats coloniaux, explique encore l'auteur de La Grande guerre, carnet du centenaire. Environ 430.000 soldats coloniaux sont venus se battre ou s'occuper de l'intendance, pendant la première guerre mondiale.
"L'engrenage des sentiments nationaux"
Soulignant l'aspect international de ce conflit, l'historien a égalemenent rappelé l'ampleur des pertes australiennes. Un pour cent de la population australienne de 1918 est enterrée en France. "Cela fait des années que l'Australie prépare le centenaire, parce que pour eux c'est vraiment un événement colossal". Fédérée depuis quelques années seulement, en 14-18, c'est "la première fois qu'elle se bat en tant que nation".
Les Kanaks, comme les Néozélandais, sont aussi venus nombreux prendre part à cette guerre.
Sur les origines de cette guerre, Nicolas Offenstadt évoque "l'engrenage des sentiments nationaux qui se sont heurtés en 1914", bien plus que les intérêts économiques. "Beaucoup d'industries avaient autant intérêt à la paix qu'à la guerre, donc elles n'ont pas spécialement poussé".
"On ne se serait pas battus juste pour reprendre l'Alsace et la Lorraine"
Remettant en cause l'idée que la France avait une revanche à prendre sur l'Allemagne, vainqueur de 1870, Nicolas Offenstadt a expliqué "on ne se serait pas battus juste pour reprendre l'Alsace et la Lorraine". "C'est vraiment la construction de nations et de blocs de nations. A la fois un engrenage des alliances, d'un côté l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, de l'autre côté, la France, l'Angleterre et la Russie.
Ce qui marque la guerre des tranchées, ce ne sont pas "les combats à la baïonnette", précise encore l'historien, mais plutôt "le pillonnage de l'artillerie. Ce qui est effrayant, ce sont des millions d'obus qui tombent sur les soldats avant les batailles. Plus des deux-tiers des pertes, c'est les bombardements."
"Les soldats meurent sans voir leurs adversaires."