En visite à Londres, le Pape appelle à la protection des enfants

par Philip Pullella et Maria Golovnina

LONDRES (Reuters) - Benoît XVI a rappelé vendredi à Londres que l'Eglise avait pour priorité d'assurer un environnement sûr aux enfants, alors qu'avait lieu la première manifestation importante contre sa visite d'Etat au Royaume-Uni.

Un complot a en outre été déjoué à Londres, où la police a procédé à cinq arrestations sans fournir de précisions.

Plusieurs centaines de personnes se sont mises à siffler et à crier "Le pape doit démissionner" et "Honte" au moment où le convoi pontifical est entré au St. Mary's University College de Twickenham, dans le sud-ouest de la capitale britannique.

Elles brandissaient des pancartes sur lesquelles on lisait "Hypocrisie et mensonges" et "Pédophilie catholique étouffée".

Les cris des manifestants rivalisaient avec les cantiques chantés à l'intérieur de l'enceinte scolaire et universitaire, où étaient réunis le pape et plusieurs milliers de jeunes catholiques de toute la Grande-Bretagne.

S'adressant à des professeurs et à des administrateurs dans la chapelle de l'établissement, le souverain pontife avait déclaré plus tôt que les écoles catholiques devaient garantir "un environnement sûr aux enfants et aux jeunes".

"Notre responsabilité à l'égard de ceux qui nous ont fait confiance pour leur formation catholique n'exige rien de moins. En effet, la vie dans la foi ne peut s'entretenir avec efficacité que dans un climat où prévaut une confiance respectueuse et affectueuse", a-t-il souligné.

L'épiscopat britannique s'est attaqué au problème des affaires de pédophilie plus tôt, plus rapidement et de façon plus décisive que ce n'a été le cas dans des pays comme l'Irlande ou les Etats-Unis. Le pape n'a pas manqué de le noter.

"Je prie pour que cela reste la marque des écoles catholiques de ce pays", a dit le pape durant sa visite à Twickenham, que des dizaines de milliers d'autres écoliers catholiques du Royaume-Uni ont suivi à la télévision dans leurs salles de classe.

CINQ SUSPECTS ARRÊTÉS À LONDRES

La police britannique a annoncé l'arrestation, jeudi matin en plusieurs points de Londres, de cinq hommes soupçonnés de préparer un attentat. Elle n'a ni confirmé ni démenti des informations des médias selon lesquelles ces arrestations seraient liées à la présence du souverain pontife.

"Nous faisons entièrement confiance dans la police et il n'est pas prévu de modifier le programme", a déclaré le père Federico Lombardi dans un communiqué.

Le scandale des abus sexuels sur mineurs, marqué par le fait que des prêtres pédophiles sont passés de paroisse en paroisse au lieu d'être défroqués et remis à la police, est venu hanter le pontificat de Benoît XVI bien que la plupart des faits remontent à des décennies.

"Le traitement de ce scandale par l'Eglise est choquant parce qu'il montre que ses priorités vont dans le sens inverse, à savoir protéger les auteurs plutôt que les enfants", a fait valoir un manifestant de 38 ans, Ben Carey.

Jeudi, dans l'avion qui l'emmenait en Ecosse, le pape avait déclaré à des journalistes qu'il déplorait le manque de vigilance et de réactivité de l'Eglise face à ce scandale, en parlant d'une "perversion" de la prêtrise.

Les défenseurs de victimes demandent depuis longtemps aux dignitaires ecclésiastiques d'endosser une plus grande responsabilité judiciaire et morale pour avoir laissé les affaires de pédophilie échapper à leur contrôle aux Etats-Unis et dans plusieurs pays d'Europe.

Certains ont accusé Benoît XVI d'avoir appartenu, dans les fonctions qu'il exerçait avant d'être élu pape, à un appareil qui a fermé les yeux sur ces abus durant des décennies.

L'Eglise catholique de Grande-Bretagne administre 2.800 écoles, dont 22 universités. Le pape a vanté les mérites de ces établissements que fréquentent de nombreux non-catholiques.

L'un des objectifs de sa visite, la deuxième d'un pape dans le pays, est d'inciter les Britanniques à redécouvrir leurs racines chrétiennes et à préserver leur tradition de tolérance devant la menace d'un "sécularisme agressif" qui exclut Dieu de la sphère publique.

Le pape accomplit une mission délicate en Angleterre et en Ecosse, le Vatican ayant proposé en octobre dernier aux anglicans opposés à l'ordination des femmes et des prêtres homosexuels de se convertir dans un cadre conçu pour eux.

Ces relations pourraient être placées sous les projecteurs dans la journée de vendredi, à l'occasion d'une rencontre au palais de Lambeth (Londres) entre Benoît XVI et l'archevêque de Cantorbéry, Robin Williams, chef de l'Eglise d'Angleterre.

Philippe Bas-Rabérin pour le service français