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Egypte: le chef des Frères Musulmans et 682 partisans condamnés à mort

Gilles Kepel,  politologue, enseignant à Sciences Po, spécialiste de l'Islam et du monde arabe.

Gilles Kepel, politologue, enseignant à Sciences Po, spécialiste de l'Islam et du monde arabe. - -

Le chef des Frères musulmans en Egypte, Mohamed Badie, a été condamné à mort, hier. Avec lui, 682 partisans du président islamiste destitué Mohamed Morsi ont écopé de la peine capitale. Pour Gilles Kepel, "c'est un coup de com'".

Il s'agit du plus grand procès de masse de l'histoire récente, selon l'ONU. 682 partisans des Frères Musulmans, organisations considérée comme terroriste, ont été condamnés à mort en Egypte tout comme leur chef, Mohamed Badie. Dans le même temps, le tribunal de Minya, dans le centre du pays, a confirmé la peine de mort de 37 autres partisans de la confrérie dans le cadre d'une autre affaire jugée en mars. Dans cette affaire, 529 condamnations à mort avaient été initialement prononcées. Les 492 autres condamnés ont vu leur peine commuée en réclusion à perpétuité.

Mohamed Badie est accusé d'avoir été l'un des instigateurs des violences qui ont suivi le renversement de Mohamed Morsi par l'armée le 3 juillet. L'ex-chef de l'Etat, premier président démocratiquement élu en Egypte, est lui aussi en cours de jugement.

Le mouvement du 6-Avril, l’organisation ayant contribué au renversement d'Hosni Moubarak est désormais interdit dans le pays.

Qui sont les accusés ?

Les accusés sont un peu plus de 1 200. Selon l'accusation, ils ont participé à des manifestations violentes à Minya, le 14 août, le jour où quelque 700 manifestants pro-Morsi sont tombés sous les balles au Caire. Parmi les détenus figure Mohamed Badie, guide suprême des Frères musulmans, qui avaient remporté toutes les élections depuis la chute du président Hosni Moubarak début 2011, avant d'être déclarée "terroriste" en décembre. Il encourt la peine de mort dans plusieurs autres procès et est incarcéré au Caire.

Risquent-ils vraiment la peine de mort ?

Ces condamnations à mort en première instance n'ont aucune chance d'être confirmées en appel, selon les experts, tant la procédure judiciaire et les droits les plus élémentaires de la défense ont été bafoués par la justice. C'est d'ailleurs ce que confirme sur RMC ce mardi matin, Gilles Kepel, politologue, enseignant à Sciences Po, spécialiste de l'Islam et du monde arabe. Pour lui, "c'est un coup de com'. Je ne crois pas qu'ils seront condamnés", a-t-il répondu à Jean-Jacques Bourdin. Conformément à la loi égyptienne, ces peines capitales doivent être soumises à l'avis du mufti, représentant de l'islam auprès de l'Etat. Mais cet avis n'est pas contraignant.

Dans quel contexte intervient cette décision de justice ?

L'élection présidentielle égyptienne est annoncée pour les 26 et 27 mai. C’est la troisième élection présidentielle de l'histoire de l'Égypte, après celle de 2005 et celle de 2012. Une large majorité de la population applaudit la répression implacable et sanglante que mène contre les islamistes le gouvernement installé par l'armée après la destitution de Mohamed Morsi, le seul président jamais élu démocratiquement en Egypte. Au total, plus de 1 400 manifestants pro-Morsi ont été tués par les policiers et les soldats en dix mois, et plus de 15 000 de ses partisans ont été emprisonnés, selon les organisations de défense des droits de l'homme.

La rédaction