Début des premières élections pluralistes en 20 ans en Birmanie

Dans un bureau de vote, à Rangoun. Les Birmans sont appelés aux urnes ce dimanche pour les premières élections pluralistes organisées depuis 1990 dans leur pays. Le scrutin, présenté par la junte comme une étape historique vers la démocratie et boycotté p - -
par Aung Hla Tun
RANGOUN (Reuters) - Les bureaux de vote se sont ouverts sous une étroite surveillance militaire dimanche en Birmanie qui organise ses premières élections pluralistes depuis 20 ans.
Ces élections parlementaires et régionales présentées par la junte comme une étape historique vers la démocratie devraient se traduire par une facile et large victoire de l'armée au pouvoir.
Le scrutin, boycotté par la Ligue nationale pour la démocratie (LND) du prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, met aux prises deux puissants partis, soutenus par les soldats et virtuellement sans opposition.
Par la voix de leur secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, les Etats-Unis ont qualifié ces élections parlementaires de tronquées. "Nous assistons aujourd'hui à des élections tronquées en Birmanie qui démontrent une nouvelle fois les abus de la junte militaire", a déclaré Clinton dans une allocution prononcée à Melbourne où elle participe à des entretiens diplomatiques et de défense avec l'Australie.
Les Américains, les Britanniques, mais également des gouvernements asiatiques ont émis des doutes sur la transparence de ces élections et rappellent que leur crédibilité est entachée par le fait que 2.200 prisonniers politiques dont Suu Kyi sont toujours en détention.
Ces élections ne devraient toutefois pas entraîner de nouvelles sanctions de la part des Occidentaux. Elles pourraient en revanche aider à réduire l'isolement de la Birmanie en Asie à un moment où sa voisine la Chine accroît ses investissements dans l'exploitation du gaz naturel et d'autres ressources minières de l'ancienne colonie britannique.
"LA BIRMANIE RESTERA UNE DICTATURE"
A Rangoun, des unités de la police anti-émeutes ont pris position près de bureaux de vote quasiment vides et patrouillaient dans les rues à bord de camions militaires. La presse étrangère et les observateurs extérieurs n'ont pas été autorisés à suivre le déroulement du vote.
Ces élections sont les premières pluralistes depuis celles de 1990 lorsque l'opposition démocratique l'avait très largement emporté. Le résultat avait été ignoré par les militaires au pouvoir depuis 1962.
"Après ces élections, la Birmanie sera encore une dictature militaire exactement comme elle l'est aujourd'hui", estime David Williams, directeur du Centre pour la démocratie constitutionnelle à l'université de droit d'Indiana.
Le Parti de la solidarité et du développement de l'Union (USDP), paravent au pouvoir militaire, présente 27 ministres en exercice et a largement dominé la campagne électorale. Il brigue la totalité des 1.158 sièges mis aux voix.
Son seul véritable rival est le Parti de l'unité nationale (NUP), autre expression politique de l'armée, qui se présente dans 980 circonscriptions.
Six partis ont déposé des plaintes auprès de la commission électorale affirmant que plusieurs centaines de fonctionnaires ont été contraints de voter par avance pour l'USDP.
De plus, 25% des sièges sont réservés pour les généraux en service. Ce qui signifie que l'armée a besoin simplement de remporter 26% des sièges restants pour être assurée de contrôler les deux assemblées législatives.
Au total, 35 partis sont en lice dans ces élections parlementaires et dans les scrutins pour désigner les 14 assemblées régionales, mais aucun n'a réussi à présenter des candidats dans toutes les circonscriptions en raison de droits d'inscription élevés pour participer.
L'internet fonctionnait à peine au cours week-end en Birmanie, certains accusant la junte de provoquer des coupures du réseau pour contrôler l'information.
Pierre Sérisier pour le service français