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Corée du Sud

"Nous devons nous battre": la femme devenue le symbole de la révolte en Corée du Sud raconte "sa peur"

An Gwi-ryeong, la femme politique sud-coréenne qui a arraché son arme à un soldat pendant l'intervention des militaires au Parlement.

An Gwi-ryeong, la femme politique sud-coréenne qui a arraché son arme à un soldat pendant l'intervention des militaires au Parlement. - Jung Yeon-je

An Gwi Ryeong, porte-parole du Parti démocratique de Corée, est devenue un symbole de la révolte politique en Corée du Sud après avoir été filmée mardi 3 novembre en train de s'opposer à un soldat après la déclaration de la loi martiale dans le pays. Elle raconte ces événements.

An Gwi-ryeong, une femme politique sud-coréenne qui a arraché son arme à un soldat pendant l'intervention des militaires au Parlement, lors de la tentative d'imposition de la loi martiale, a confié jeudi 5 décembre avoir eu "peur" mais n'avoir aucun regret d'avoir lutté pour la démocratie.

À la stupeur générale, le président a décrété la loi martiale mardi soir et tenté de museler le Parlement en y envoyant l'armée, avant de faire volte-face six heures plus tard sous la pression des députés et des manifestants.

"N'avez-vous pas honte?"

Malgré le bouclage de l'Assemblée nationale par des centaines de militaires et de policiers, 190 députés ont réussi à se faufiler dans le bâtiment dans la nuit de mardi à mercredi, parfois en escaladant les clôtures, et à tenir une séance extraordinaire.

Pendant ces heures sous haute tension, An Gwi-ryeong, une ancienne vedette de télévision devenue porte-parole du Parti démocrate (opposition), a fait face à un soldat, tentant de lui arracher son arme.

"N'avez-vous pas honte?", lui a-t-elle lancé lors de la brève altercation, dont la vidéo s'est rapidement répandue sur internet. De nombreux commentaires ont salué son attitude courageuse face à l'autoritarisme.

"J'ai senti que si cet assaut réussissait, il n'y aurait pas de retour en arrière", a-t-elle dit.

"S'ils étaient entrés et avaient empêché le vote, ce n'est pas seulement la loi martiale qui n'aurait pas été levée, mais cela aurait aussi été la fin de notre démocratie", a-t-elle expliqué.

Une procédure de destitution engagée contre Yoon

Elle a admis avoir eu "peur", mais avoir été inspirée par le courage de ses concitoyens qui s'étaient rassemblés par milliers devant le Parlement pour manifester. "La peur à ce moment était contrebalancée par la conviction que cet endroit devait être défendu", a-t-elle confié.

"La Corée du Sud a une fière histoire qui l'a vue parvenir à la démocratie par la détermination de ses citoyens", a dit An Gwi-ryeong, dans une allusion au passé autoritaire du pays. "Je crois profondément que cet esprit est inscrit dans l'ADN du peuple coréen", a-t-elle ajouté.

L'opposition a engagé une procédure de destitution contre le président Yoon Suk Yeol, l'accusant d'avoir tenté d'instaurer la loi martiale pour empêcher des poursuites contre lui-même et sa famille.

"Ne pas baisser la garde"

An Gwi-ryeong a dit ne pas exclure qu'il tente une nouvelle fois de se maintenir au pouvoir. "Il semble ne pas considérer tout cela comme un échec total", c'est pourquoi "nous ne devons pas baisser la garde", a-t-elle insisté.

"Nous devons tenir face à la tyrannie de l'administration Yoon jusqu'à la fin. Nous devons nous battre ensemble, et nous soutenir les uns les autres", a-t-elle conclu.

Yoon Suk-yeol, élu de justesse en 2022 et qui n'a jamais disposé de majorité au Parlement, avait pointé du doigt une "dictature législative" et accusé les élus de l'opposition de bloquer "tous les budgets essentiels aux fonctions premières de la nation".

Six partis d'opposition ont déposé mercredi une motion de destitution, accusant le dirigeant d'avoir "gravement violé la Constitution et la loi". Cette motion sera soumise au vote samedi à 19 heures (10 heures GMT), selon l'agence de presse Yonhap.

Jeanne Bulant avec AFP Journaliste BFMTV