Une semaine de drames et de tension entre la communauté noire et la police américaine

- - PAUL J. RICHARDS / AFP
Même Donald Trump en est resté sans voix, tant la société américaine a été tétanisée par des événements qui menacent profondément sa cohésion. Mardi dernier, puis mercredi, deux noirs tués. Nouvelles victimes de bavures policières en Louisiane et dans le Minnesota. Jeudi, pour les venger, un noir tue avec une arme de guerre cinq policiers blancs à Dallas en expliquant: "je suis en colère, je veux tuer des blancs".
La question raciale n’est pas L’UN des principaux problèmes de la société américaine. C’est LE principal problème. Depuis toujours. Toujours sous-jacent. Le feu qui couve sous la cendre. Vendredi matin le quotidien à sensation New York Post titrait "Civil War" (guerre civile), comme si l’incendie que tout le monde redoutait venait de se déclarer.
Pourquoi maintenant? Deux facteurs contribuent à rouvrir aujourd’hui la blessure raciale: les vidéos et les armes. Sans vidéo, il n’y a pas de bavure. La multiplication des smartphones permet de rendre publics des drames qui sans image passeraient inaperçus. Les réseaux sociaux amplifient. Smartphones, Twitter et Facebook sont devenus les mégaphones surpuissants des colères d’aujourd’hui. Avec aussi leurs défauts. Les deux vidéos des bavures de la semaine ne montrent que l’issue fatale et scandaleuse. Pas les faits des secondes qui précèdent qui pourraient expliquer (sans évidemment l’excuser) la nervosité des policiers.
La peur des policiers
Mais ces vidéos aussi imparfaites soient elles sont utiles. Leur multiplication est un progrès. On ne peut pas en dire autant de la multiplication des armes à feu. A-t-on assez dit que les victimes des deux bavures étaient armées ? Oui, les victimes. En Louisiane l’arme était dans la poche de la victime et ne représentait pas une menace directe pour les policiers mais il y avait une arme. Qui avait été brandie quelques minutes plus tôt ce qui avait déclenché l’intervention de la police. Dans le Minnesota la victime avait une arme dans la boîte à gants et dans la vidéo sur Facebook on entend le policier visiblement affolé répéter "je lui avais dit de ne pas approcher sa main (de cette arme)".
Question de secondes, question de centimètres, le policier a eu peur de cette arme, il a tiré. Quatre fois. Quatre fois de trop mais la peur du policier américain face à la prolifération des armes est une réalité quotidienne.
Il y a sans doute des policiers racistes mais il y a surtout des policiers qui ont peur. Et des noirs qui, ayant peur des policiers, ont tendance à s’armer davantage. Le risque d’engrenage est terrible. L’Amérique ne pourra pas à court terme régler son problème racial. Elle ne peut pas, et ne doit pas limiter la libre circulation des vidéos. Mais elle peut et doit limiter la libre circulation de ces armes qui, décuplant la peur, risquent de réveiller les vieilles blessures et les vieux démons.
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