Le "moment de passer de la parole aux actes": la COP16 sur la biodiversité s'ouvre en Colombie

Un indigène brésilien à la COP16 sur la biodiversité, au Pacific Event Center à Cali, en Colombie, le 20 octobre 2024. - JOAQUIN SARMIENTO / AFP
Avant le début des pourparlers ce lundi 21 octobre entre délégués des quelque 200 pays présents en Colombie, une cérémonie d'ouverture avec discours officiels lance dimanche la 16e conférence de l'ONU sur la biodiversité de Cali (sud-ouest).
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Gutteres, devrait de nouveau tirer le signal d'alarme sur l'urgence de la préservation des terres, des océans et des espèces vivantes, indispensables à l'humanité.
"Connexion vitale à la nature"
Le président de gauche colombien, Gustavo Petro, entend saisir cette occasion pour que la Colombie, pays parmi les plus riches en biodiversité, prenne la tête de la mobilisation mondiale pour la nature.
Et sa ministre de l'Environnement Susana Muhamad, qui endosse la présidence de cette Convention des nations unies sur la diversité biologique (CBD), espère que les débats déboucheront sur des solutions concrètes à sa clôture le 1er novembre.
"Il y a eu beaucoup de discussions au niveau mondial sur l'impact du changement climatique et de l'urgence à décarboner. Mais il n'y a jamais eu la même attention sur le besoin de protection de la nature, de reconnaître notre connexion vitale à la nature, de la voir comme notre notre alliée car nous faisons partie intégrante de la nature", a-t-elle déclaré cette fin de semaine en amont des débats.
La COP16 de Cali est le premier rendez-vous de la communauté internationale depuis l'adoption en 2022, lors de la COP15, d'une feuille de route sans précédent pour sauvegarder la nature. Mais l'application de cet accord de Kunming-Montréal avec d'ambitieux objectifs à l'horizon 2030 n'avance pas assez vite.
Les pays s'étaient engagés à présenter d'ici la COP16 une "stratégie nationale biodiversité" reflétant leur part des efforts pour tenir les 23 objectifs mondiaux fixés : protéger 30% des terres et mers, restaurer 30% des écosystèmes dégradés, réduire de moitié les pesticides et le taux d'introduction d'espèces exotiques envahissantes, ou mobiliser 200 milliards de dollars par an pour la nature.
"Une COP populaire"
Mais les détails de ces mécanismes, cruciaux pour responsabiliser les pays, restent à adopter. À Cali, il s'agira de démontrer que les promesses seront tenues. Et de donner une nouvelle ambition à la grande COP sur le climat qui s'ouvre dans trois semaines en Azerbaïdjan.
L'Union européenne, partenaire majeur dans l'organisation de la COP16 sur la biodiversité, espère que ce forum sera le moment de "passer de la parole aux actes", selon son ambassadeur dans le pays.
"Nous partageons l'ambition de la Colombie de faire de cette réunion internationale une COP populaire, une COP pour la population", a déclaré dimanche à l'AFP l'ambassadeur Gilles Bertrand.
"L'UE et ses pays membres sont convaincus que la conservation de la nature et de la biodiversité se fait avec les gens", a plaidé Gilles Bertrand.
Un sommet sur la biodiversité sous la menace de la guérilla
Un autre défi, sécuritaire, plane également sur cette COP colombienne. Cali est placée en état d'alerte sous la menace d'une guérilla. La plus grande faction dissidente de la défunte guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), qui rejette l'accord de paix historique signé en 2016, est en guerre ouverte avec le gouvernement. Elle a recommandé aux "délégués de la communauté nationale et internationale de s'abstenir d'assister" à la COP16, promettant qu'elle serait un "fiasco".
Les 12.000 participants, dont 140 ministres et sept chefs d'État, sont sous la protection d'environ 11.000 policiers et soldats colombiens, soutenus par du personnel de sécurité de l'ONU et des États-Unis.
Gustavo Petro, a assuré que la sécurité serait "garantie", même s'il a avoué ce week-end être un peu "nerveux".
Des policiers en nombre sont visibles dimanche à l'aéroport et dans le centre-ville de Cali, aux abords des hôtels des délégations, de la zone verte le long d'une rivière où se dérouleront de nombreux événements publics, et de la zone dite bleue où se tiendront les débats, quadrillée par les forces de l'ordre où délégués et journalistes sont strictement fouillés à l'entrée.
La Colombie, pays de nombreux peuples autochtones, entend leur laisser prendre une large part aux débats.
"Nous avons passé beaucoup de temps à nous diviser et nous avons oublié que la Terre mère nous appelle à l'aide. J'espère que les accords qui seront trouvés seront guidés par la nature et pas par l'économie. Car pourquoi être riche si nous n'avons pas d'endroit où vivre", a déclaré Carlos Ignacio, représentant de l'association AKTenamit du Guatemala.