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"Goma s'apprête à tomber": que se passe-t-il en RDC après l'offensive du M23 et de l'armée rwandaise?

Des hommes armés dans une rue de Goma, RD Congo, le 27 janvier 2025

Des hommes armés dans une rue de Goma, RD Congo, le 27 janvier 2025 - AFPTV / AFP

Des tirs d'artillerie lourde ont été entendus dans la grande ville de l'est de la République démocratique du Congo, alors que le mouvement M23 et l'armée rwandaise tentent de s'en emparer.

Une situation extrêmement tendue. Goma, grande ville de l'est de la République démocratique du Congo à la frontière avec le Rwanda, est ce lundi 27 janvier à la merci du M23 et de l'armée rwandaise. Cette situation intervient après plusieurs jours de combats et d'escalade diplomatique, aboutissant à la convocation par le Kenya d'une rencontre entre Félix Tshisekedi, président du pays, et Paul Kagame, dirigeant du Rwanda, dans les deux jours à venir.

"Goma s'apprête à tomber", a déploré le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, condamnant fermement l'offensive. Samedi, Emmanuel Macron a appelé à la "fin immédiate de l'offensive du M23 et des forces rwandaises ainsi qu'au retrait de ces dernières du territoire congolais."

Le groupe armé antigouvernemental du M23 ("Mouvement du 23 mars") et 3.000 à 4.000 soldats rwandais, selon l'ONU, combattent les Forces armées de la république démocratique du Congo (FARDC) dans la région depuis plus de trois ans. Dimanche, les combats se sont tenus aux portes de Goma, capitale provinciale de plus d'un million d'habitants et presque autant de déplacés.

En début de soirée, des rafales ont résonné dans les rues, selon des journalistes de l'AFP. Lundi matin, des tirs d'artillerie lourde ont également été entendus et la frontière entre les deux pays a été fermée.

Début d'une guerre?

Selon un communiqué l'armée uruguayenne dans un communiqué, qui participe à la mission des Nations unies mobilisée sur place, quelques unités FARDC ont commencé à se rendre en remettant leurs armes à des Casques bleus à Goma. Cette mission s'était engagée dans les combats contre le M23 au côté des FARDC.

Des soldats rwandais et des combattants du M23 ont pénétré dans la ville dimanche, selon plusieurs sources onusiennes et sécuritaires.

Le président kényan William Ruto a annoncé dans un communiqué réunir "dans les prochaines 48 heures" un sommet extraordinaire de la Communauté des États d'Afrique de l'Est (EAC) en présence des présidents congolais Félix Tshisekedi et rwandais Paul Kagame. Une médiation RDC-Rwanda sous l'égide de l'Angola a échoué en décembre faute d'entente sur les conditions d'un accord.

Kinshasa a accusé dimanche le Rwanda de lui avoir "déclaré la guerre" en envoyant de nouvelles troupes alors que l'ONU a appelé Kigali à retirer ses forces de la région. Entre 500 et 1.000 hommes, selon des sources onusiennes à l'AFP.

Kigali a répliqué dans la soirée conserver une "posture défensive durable" au vu des combats représentant "une menace sérieuse à la sécurité du Rwanda", selon son ministère des Affaires étrangères.

"Sanctions ciblées"

Après une réunion d'urgence, le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné dimanche soir le "mépris éhonté" de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de la RDC.

Mais si plusieurs de ses membres ont clairement pointé du doigt Kigali, la déclaration commune réclame le retrait des "forces extérieures" sans les nommer explicitement, faisant référence toutefois à un rapport d'experts des Nations unies ayant mis en lumière la présence des forces rwandaises.

Alors que de plus en plus de pays accusent le Rwanda, la ministre congolaise des Affaires étrangères Thérèse Kayikwamba Wagner a réclamé pendant le Conseil "des sanctions ciblées" contre les dirigeants militaires et politiques rwandais ainsi qu'un "embargo total sur les exportations de tous les minerais étiquetés comme rwandais".

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a également clairement mis en cause Kigali en appelant "les Forces rwandaises de défense à cesser de soutenir le M23 et à se retirer du territoire de la RDC".

Les États-Unis se sont déclarés prêts à employer "tous les outils" disponibles contre ceux qui alimentent le conflit. L'Union européenne a appelé le M23 à "arrêter son avancée" et le Rwanda à "se retirer immédiatement". L'Union africaine (UA) a réclamé "la stricte observation du cessez-le-feu convenu entre les parties" fin juillet.

Bombardements

Dimanche, un drone rwandais a ouvert le feu sur des positions congolaises à environ 6 kilomètres de Goma, faisant au moins deux blessés parmi les paramilitaires, ont indiqué à l'AFP des sources sécuritaires et onusiennes. Des bombardements ont touché le camp de déplacés de Rusayo, dans la périphérie de Goma, selon plusieurs sources humanitaires qui n'ont pas donné de bilan.

Treize soldats sud-africains, malawites et uruguayen, déployés au sein de la force régionale d'Afrique australe (SAMIRDC) et la Monusco ont été tués dans des combats contre le M23 ces derniers jours, ont annoncé samedi les autorités des trois pays.

Le Rwanda a indiqué avoir "évacué" vendredi son dernier diplomate à Kinshasa. La RDC avait de son côté annoncé samedi rappeler ses diplomates à Kigali "avec effet immédiat".

Goma avait été brièvement occupée fin 2012 par le M23 ("Mouvement du 23 mars"), né cette année-là et vaincu militairement l'année suivante. Dans l'est de la RDC riche en ressources naturelles, les conflits s'enchaînent depuis plus de trente ans. Les dernières violences ont encore aggravé une crise humanitaire chronique dans la région. Selon l'ONU, 400.000 personnes ont été déplacées par les combats depuis début janvier.

Les Nations unies ont évacué certains de leurs personnels de Goma. Les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne ont appelé leurs ressortissants à quitter la ville tant que l'aéroport et les frontières sont ouverts.

https://twitter.com/Hugo_Septier Hugo Septier avec AFP Journaliste BFMTV