Le caoutchouc et après?

140 sites industriels, 9 milliards d'euros de chiffre d'affaires. La filière du caoutchouc est un acteur de poids en France. Le syndicat national du caoutchouc et des Polymères, le SNCP fêtait récemment ses 150 ans. Un grand rassemblement ou il a été beaucoup question d'enjeux environnementaux.

Imaginez un monde sans caoutchouc. Pas d'automobile, pas d'avion, ni de train. Pire: pas de boules de loto! Le caoutchouc est partout: dans les joints de pacemaker, dans les entraînements de pâle d'hélicoptère, dans nos montres et même dans la fusée Ariane. Un monde sans caoutchouc, impossible! Le caoutchouc, c'est vert aussi. Le caoutchouc naturel représente 42 % de la production mondiale avec 11 millions d'hectare de plantation d'Hévéa.

Des polymères bio-sourcés

En France ce sont 45.000 salariés qui y travaillent pour l'essentiel dans l'industrie automobile. Une industrie qui change et qui reste encore très dépendante des énergies fossiles. Pour faire face à la flambée des prix et pour poursuivre l'activité, les professionnels n'ont pas d'autre solution que d'innover. Gérard Duhesme, vice-président du SNCP et directeur des sites de Michelin est persuadé qu'il y a de la place pour une industrie performante en France. La clé sera peut-être les polymères bio-sourcés. La recherche est en tous cas lancée avec le projet Bioproof fraîchement validé dans le cadre du Grand Emprunt.

2,5 millions d'euros d'investissement par Oseo afin de financer la mise en place d'un laboratoire de recherche. Les parrains: Michelin et Hutchinson. 15 PME vont y travailler ensemble. Cinq ans de travaux seront nécessaires pour trouver des produits de substitution, quelques pistes sont déjà avancées: le noir de carbone pourrait être remplacé par du bois carbonisé. Pourquoi pas des huiles venues de la nature? Il ne faut pas croire que tout viendra du jour au lendemain. Il faut garantir des caractéristiques identiques et évidemment ne pas empiéter sur les ressources agricoles. De nouveaux polymères verront peut-être le jour dans 10 ou 15 ans.

Le recyclage qui s'organise

Et le pneu vert? Le mot est employé mais est-il si green? Ces pneus ont la particularité de résister mieux au mouvement. Moins de dépenses d'énergie donc moins de consommation de carburant et moins de CO2. C'est une étape mais on est loin de "l'intégralement durable". Et faire du neuf avec du vieux? Là encore, l'industrie du caoutchouc y réfléchit. Depuis 2004, une filière de recyclage existe. Avec ce caoutchouc recyclé, il est possible de réaliser des terrains de sport, des aires de jeux pour les enfants. Ce caoutchouc broyé se révèle un très bon combustible dans les cimenteries. De la poudre de caoutchouc est fréquemment utilisée dans le domaine industriel.

La recherche a pour le moment encore ses limites: impossible de reconstituer la matière d'origine avec des résidus de pneus. Retour vers le futur mais à quel horizon? La profession cherche toujours à innover même si les contraintes sont lourdes. Pour preuve Reach. Son objectif: évaluer les risques liés à l'usage d'environ 30.000 substances chimiques afin de limiter les risques. Bruxelles veille.

1,6 millions de véhicules en 2030

Les perspectives d'avenir obligent à trouver des solutions. La demande de pneumatique va devenir exponentielle: 800 millions de véhicules dans le monde à l'heure actuelle et le double en 2030. Les pays émergents sont très demandeurs. C'est aussi tout le paradoxe de ces enjeux durables: chercher des produits plus respectueux de l'environnement quand certains ont envie encore de consommer voire de surconsommer. L'après-pétrole n'est pas encore tout à fait pour demain.

Nathalie Croisé de BFM Business