"Vous seriez tous morts": à presque 100 ans, cette rescapée d'Auschwitz raconte "l'usine de la mort"

Quatre-vingts ans plus tard, raconter pour ne pas oublier. Ce lundi 27 janvier, le monde commémore les 80 ans de la libération d'Auschwitz-Birkenau en Pologne, où des cérémonies, sur le site même de cet ancien camp nazi allemand, doivent réunir une cinquantaine de survivants.
Sous la porte d'entrée historique de Birkenau, ils vont prendre part à une cérémonie officielle à partir de 16h, aux côtés de dizaines de dirigeants, dont le roi Charles III et le président français Emmanuel Macron, ainsi que le chancelier et le président allemand, Olaf Scholz et Frank-Walter Steinmeier.
"L'usine de la mort"
"Cette année, nous nous concentrons sur les survivants et leur message", a déclaré à Pawel Sawicki, porte-parole du musée d'Auschwitz. "Il n'y aura pas de discours d'hommes politiques", a-t-il souligné.
Selon les organisateurs, il pourrait s'agir du dernier grand anniversaire réunissant un groupe important de survivants. Ce matin depuis le Mémorial de la Shoah à Paris, Emmanuel Macron a appelé à "ne rien céder à l'antisémitisme sous toutes ses formes".
Parmi les survivants figure Ginette Kolinka, l'une des dernières rescapées de l'Holocauste encore en vie, qui va fêter ses 100 ans le 4 février prochain. L'ancienne déportée, qui a passé 17 mois à Auschwitz, s'occupe depuis de nombreuses années à raconter l'histoire de sa déportation dans les collèges et lycées.
"Vous auriez été juive, à votre âge, vous seriez tous morts. On a tué tous les jeunes qui avaient moins de quinze ans", dit-elle, filmée par BFMTV au collège Édouard Herriot de Maisons-Alfort, dans le Val-de-Marne.
Et Ginette Kolinka après avoir expliqué son passage au camp de Drancy et le voyage en train jusqu'en Pologne, se remémore son arrivée à Auschwitz: "D'être comme ça devant des femmes que je ne connaissais pas, à me faire enlever les poils du sexe, pour moi ça a été terrible ça."
"Papa et mon petit frère sont montés sur les camions. Quand est-ce qu'on va les revoir? La réponse: c'est 'vous ne les reverrez plus'. Quoi la cheminée? C'est une usine? Eh bien non Ginette, c'est l’usine de la mort", ajoute-t-elle.
Devant des dizaines d'élèves silencieux et horrifiés par le récit de la survivante, cette dernière termine son récit sous les applaudissements de son auditoire. "C’est moi qui vous applaudit, parce que maintenant vous avez une mission, c’est de raconter ce que vous avez entendu", termine-t-elle.
Poutine et Netanyahu absents?
Le camp a été créé en 1940 dans des baraquements d'Oswiecim, dans le sud de la Pologne occupée, dont le nom a été germanisé en Auschwitz par les nazis. Les 728 premiers prisonniers politiques polonais y sont arrivés le 14 juin de cette année-là.
Le 17 janvier 1945, face à l'avancée des troupes soviétiques, les SS forcent 60.000 prisonniers émaciés à marcher vers l'ouest dans ce qu'on appellera la "Marche de la mort".
Du 21 au 26 janvier, les Allemands font sauter les chambres à gaz et les fours crématoires de Birkenau et se retirent. Le 27 janvier, les troupes soviétiques arrivent et retrouvent 7.000 survivants.
Le jour de la libération du camp a été proclamé par les Nations unies comme Journée de commémoration de l'Holocauste. Jusqu'à l'invasion de l'Ukraine en 2022, une délégation russe avait toujours assisté aux cérémonies anniversaires, mais depuis trois ans elle n'y est plus invitée, décision des organisateurs fermement critiquée par Moscou.
Des rumeurs sur la possible participation du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu aux cérémonies ont également suscité la controverse. L'année dernière, la Cour pénale internationale a émis un mandat d'arrêt à l'encontre dirigeant, soupçonné de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre.