«Taxe Nutella» : faut-il taxer l’huile de palme?

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Après la bière et les boissons sucrées, voici l'huile de palme. La commission des Affaires sociales du Sénat a adopté mercredi ce qu’on appelle déjà « l’amendement Nutella » au projet de budget de la Sécu. Visant à augmenter de 300% la taxe sur l'huile de palme, il doit constituer un signal, « non à destination des consommateurs, mais à destination des industries agroalimentaires pour qu'elles substituent à ces huiles de nouvelles compositions plus respectueuses de la santé humaine », a souligné Yves Daudigny (PS), auteur de l'amendement et rapporteur de la commission.
Du cholestérol à la déforestation
Omniprésente dans notre alimentation (biscuits, plats préparés, viennoiseries, et bien sûr pâte à tartiner), l'huile de palme est devenue la première huile végétale consommée dans le monde. De composition stable, économique pour les producteurs, sa culture intensive entraîne pourtant une déforestation massive dans plusieurs pays, et beaucoup d’industriels se contentent d’écrire « huile végétale » en oubliant de rappeler qu’elle favorise le cholestérol et bouche les artères.
Chaque année, la France consomme 126 000 tonnes d'huile de palme à usage alimentaire, soit 2 kg par habitant et par an. Avec une hausse de 6 centimes d’euro par kilo de Nutella, la mesure pourrait rapporter 40 millions d’euros.
« L’industrie alimentaire n’en a pas mis là où elle devait »
Le nutritionniste Jean-Michel Cohen voterait « sans ambiguïté » pour cette taxe, explique-t-il. « L'huile de palme est mauvaise pour la santé, car elle fait partie des huiles qui contiennent beaucoup d’acide gras saturés qui bouchent les artères des gens », juge-t-il. « L’industrie alimentaire s’est jetée dessus parce qu’elle était bon marché, mais elle n’en a pas mis là où elle devait, mais partout, en remplaçant progressivement toutes les huiles par celles-là pour faire des économies. Et à force d’acheter des produits dans lesquels il n’y avait que de l’huile de palme, les gens en avaient une trop grande consommation, donc à ce titre on essaye de la limiter ». Selon le praticien, les conséquences pour la santé des Français pourraient être importantes : « On sait que si on fait ça, on limite les accidents cardiovasculaires et peut être des maladies beaucoup plus graves ».
« Ce sont les consommateurs qui vont payer »
Pour la sénatrice UMP du Val-de-Marne Catherine Procaccia, en revanche, l’huile de palme n’a aucune raison d’être plus taxée qu’une autre. Elle a d’ailleurs voté contre l’amendement à la commission des Affaires sociales du Sénat. « Si on mange un pot de pâte à tartiner par jour, ou des brioches, ce n’est pas bon pour la santé, donc c’est surtout la consommation que l’on fait de ces produits qui pose problème. Ce qu’il faut, c’est ne pas manger trop de produits gras ». Elle estime aussi que le citoyen en fera les frais. « On est en train de taxer la bière, l’huile, tout, au détour d’amendements ! C’est quand même nous, les consommateurs, qui allons payer, car ce n’est pas vrai que cette taxation n’aura pas de répercussion sur le prix des produits ».