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Société

Surendettement : le « fichier positif » est-il la solution ?

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Désormais, contracter un crédit vous fera automatiquement entrer dans le « fichier positif » voulu par Jean-Marc Ayrault. S’il doit permettre d’éviter le surendettement, certains critiquent déjà un procédé inadapté, voire un fichage généralisé.

C’est l’une des mesures annoncées mardi par Jean-Marc Ayrault dans le cadre de son grand plan de lutte contre la pauvreté : au-delà de la hausse du RSA, de l’allocation jeunes ou encore de la construction de places d’hébergement d’urgence, le Premier ministre souhaite mettre en place un fichier positif contre le surendettement. Dans cette sorte de répertoire géant seront enregistrés nom et adresse de l’emprunteur avec la liste de tous les crédits contractés, crédits à la consommation comme immobiliers. Il devrait permettre de lister entre 25 et 27 millions de Français et les banques auront l’obligation de consulter ce registre avant d’accord un crédit.

« Stopper un petit peu les crédits revolving »

Pour Mickaël, 42 ans et en situation de surendettement, c’est une bonne chose. « Ça va stopper un petit peu les crédits revolving, car une personne en surendettement ne pourra pas l’avoir » espère-t-il, lui qui est tombé dans le piège. « C’est de l’argent facile, en plus ils font des offres alléchantes, vous remboursez dans deux ou trois mois, voire en 2013, vous avez l’argent, vous le dépensez en bien ou en mal, mais au moment où il faut le rembourser, vous n’avez pas assez de salaire ».

« Eviter des drames humains »

Muguette Dini, sénatrice UDI du Rhône, a publié un rapport sur le crédit et le surendettement en juin dernier. Elle estime que ce fichier peut être « un des éléments qui peut aider à éviter des drames humains ». « Pouvoir dire à certaines personnes "non, on ne peut pas vous accorder ce crédit", socialement ce sera utile entre les 800 000 familles qui sont surendettées, et celles qui en sont à la limite, que nous ignorons, et qui sont donc dans un stress terrible ».

« Ça ne règle pas le problème »

Mais pour Franck Lambert, le secrétaire national du Syndicat national autonome de la Banque de France, le fichier n'est pas adapté aux réalités d'aujourd’hui et « ne règle pas le problème ». « Quand on voit l’évolution de la typologie du surendettement, on a constaté que, par le passé, les gens avaient trop de crédits par rapport à ce qu’ils pouvaient rembourser. Aujourd’hui, un certain nombre de personnes déposent des dossiers simplement parce qu’elles ont pris des crédits juste pour payer les retards de charges courantes. Donc c’est plus un problème d’adéquation des ressources avec les charges, on a notamment beaucoup de retraités qui déposent des dossiers alors qu’on en avait beaucoup moins avant ».

« C’est complètement disproportionné »

Sans parler des risques de fichage, qui inquiètent Reine-Claude Mader, la présidente de l'association de consommateurs CLCV (Consommation Logement Cadre de Vie). « Je suis contre parce que dans ces fichiers, on répertorie toutes ces personnes, quel que soit votre revenu, qui ont un crédit, explique la militante associative. En plus quand vous aurez cette énorme machine mise en place, comme cela existe dans certains pays, on rajoutera les dettes de téléphone, les dettes de loyer, et à partir de ce moment-là, vous allez avoir des personnes dont toute la vie va être enregistrée. Je trouve que c’est complètement disproportionné par rapport à ce qu’on voulait faire ».

M. Chaillot avec Benjamin Smadja