Le jeûne du ramadan n'est pas toujours respecté

Après l'agression, à Lyon, d'un homme tabassé pour ne pas avoir pratiqué le jeûne du ramadan, enquête sur ces hommes et femmes qui choisissent de ne pas suivre le rituel. Un musulman sur trois serait dans ce cas en France.

Selon la dernière enquête en date, réalisée en 2009 par l'IFOP, seuls 70% des musulmans de France suivraient intégralement le ramadan. Parmi les 30% restants, certains, peu pratiquants, décident en effet de ne pas pratiquer le rituel. D'autres, les plus nombreux semble-t-il, choisissent une pratique «allégée ». Par exemple en décidant de pas suivre le jeûne. Un moyen souvent de simplifier leur vie quotidienne pendant cette période, tout en évitant de froisser leur entourage. Rares sont ceux qui acceptent d'en parler librement, le sujet restant tabou pour beaucoup. D'autres assument leur choix sans complexe.

Elodie a 18 ans. Elle ne suit pas le ramadan, voilà comment elle s'organise:

« Je mange en cachette. j'ai un placard dans ma chambre avec une clé dans lequel je cache des petits trucs: des petits chocolats, des bonbons, des petites sucreries. Et quand j'ai faim je mange en cachette dans ma chambre. Je le dis à certaines copines, pas à toutes en fait. Après elles vont me juger par rapport à ce que je fais. J'en connais plein, elles font semblant de faire le ramadan. Après quand elles sortent de chez elles, elles vont se maquiller, s'habiller bizarrement... Après, quand elles rentrent, elles mettent le voile. J'en connais plein »

Sabrina a 25 ans. Elle suit le ramadan. Ce qui ne l'empêche pas de comprendre ceux qui font le choix de s'y soustraire:

« Il y a plein de personnes qui le font certes, et d'autres personnes qui ne le font pas et qui font croire peut-être qu'elles le font. Mais chaque personne fait en fonction de ce qu'elle peut faire. Si on a vraiment soif on peut boire, c'est pas dramatique en soi. Dire qu'on fait pas le ramadan c'est sortir un peu de ce moule là de musulman qui font le ramadan, et certaines personnes ne l'assument pas forcément. Dans une famille de la deuxième génération d'immigrés, c'est vrai qu'on est plus imprégné. Et puis plus les générations arrivent et moins elles sont concernées par tout ça. C'est vrai que c'est plus occidentalisé, plus européanisé »

Dounia Bouziar est anthropologue, spécialiste de l'Islam. Elle confirme que certains musulmans, surtout des jeunes, ont tendance à pratiquer un « ramadan allégé »:

« C'est vrai qu'il y a toute une quantité de jeunes qui croient sincèrement en Dieu, qui ont vraiment envie de faire cet exercice, le ramadan. Mais qui ne vont pas forcément dire effectivement qu'ils prennent deux verres d'eau pour mieux tenir le coup. Ils sont sincères dans leur démarche et c'est vrai que la pression du clan est encore importante. Les jeunes ne vont pas forcément le dire à leurs parents ».

Tareq Oubrou est l'imam de Bordeaux et président de l'Association des imams de France. Il explique que l'Islam ne condamne pas l'absence de pratique du ramadan:

« La pratique c'est un acte spirituel, individuel, éminement volontaire et libre et on n'a pas à dissuader les gens et à chercher une quelconque agressivité à leur égard s'ils ne pratiquent pas telle ou telle prescription islamique. Tant qu'on a la foi, tant qu'on ne remet pas en cause le Coran, et bien on est pleinement musulman et totalement musulman »