L'UE reporte sa décision sur l'aide aux plus démunis

La France a obtenu mardi un report de la décision sur la suppression du programme européen d'aide alimentaire aux plus démunis qui, selon les associations caritatives, fait planer la menace d'une "crise humanitaire" en Europe. /Photo d'archives/ REUTERS/E - -
La présidence polonaise de l'Union européenne, constatant le désaccord persistant entre partisans et adversaires de la disparition de ce programme, a annoncé ce report et des propositions de compromis pour la prochaine réunion des ministres de l'Agriculture des Vingt-Sept, en octobre.
Avant la réunion, le ministre français de l'Agriculture, Bruno Le Maire, avait plaidé pour ce report afin de laisser aux Etats membres le temps de s'entendre sur une solution permettant de maintenir ce programme doté d'une enveloppe de 500 millions d'euros par an.
Celui-ci reposait initialement sur une distribution des stocks agricoles européens mais leur baisse ces dernières années a contraint la Commission a acheter certains produits de base dont elle ne disposait plus en suffisance, ce à quoi s'opposent l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la Suède, le Danemark, les Pays-Bas et la République tchèque.
Ces pays font valoir qu'en l'absence de stocks, la politique sociale relève non de la Commission mais des Etats membres et, au printemps, une décision de la justice européenne leur a donné raison en limitant aux stocks annuels le volume d'aide que Bruxelles peut distribuer aux associations.
Pour 2012, celles-ci ne se verraient donc attribuer que 113 millions d'euros sur les 500 millions prévues dans le budget.
En France, les banques alimentaires, la Croix-Rouge, les Restos du Coeur et le Secours populaire français ne recevraient que 15,9 millions d'euros sur les 78 millions attendus.
"Personne ne peut comprendre aujourd'hui qu'en pleine période de crise, alors que vous avez des millions de personnes touchées par le chômage, des millions de personnes en France qui sont touchées par la pauvreté, l'Europe dise 'on arrête l'aide aux plus démunis'. Il en est hors de question", a dit Bruno Le Maire à la presse.
"Ce n'est pas parce qu'il y a eu une décision juridique que la politique ne peut pas reprendre ses droits et dire, oui (...) on doit trouver des solutions européennes", a-t-il ajouté.
RESPONSABILITÉ POLITIQUE
Le ministre a fait valoir que cette aide devait continuer d'être financée sur le budget européen afin de maintenir une garantie financière sur plusieurs années pour les associations qui distribuent des repas aux plus démunis.
Il a demandé à la Commission européenne de faire des propositions transitoires en vue d'assurer le maintien du programme en 2012 et 2013, avant que sa pérennité ne soit assurée dans le cadre d'une refonte plus complète de la Politique agricole commune et des négociations sur le nouveau budget européen pluriannuel 2013-2020.
Mais le commissaire européen à l'Agriculture, Dacian Ciolos, a souligné que l'exécutif communautaire avait déjà fait des propositions et que celles-ci ne devaient le fait de n'avoir pas été approuvées qu'aux divergences entre Etats membres.
"La Commission a fait tout ce qu'il fallait faire pour assurer la continuité de ce programme à court terme et à long terme", a insisté le commissaire roumain.
"Le problème n'est pas d'attendre une semaine ou deux ou trois de plus. L'important c'est que les ministres assument leur responsabilité politique pour trouver une solution. Les solutions sont là, c'est la volonté politique qui manque", a-t-il expliqué, tout en rappelant que la Commission avait proposé des solutions juridiques en 2008 puis en 2010.
Une enveloppe de 2,5 milliards d'euros a par ailleurs été prévue dans les propositions de la Commission pour le budget 2013-2020 et elle ne demande que l'approbation des Vingt-Sept.
Les associations françaises d'aide alimentaire qui bénéficient de ce programme s'étaient réunies lundi pour manifester leur inquiétude face aux pertes annoncées de financement, qualifiant le conseil des ministres européens de l'agriculture de "dernière chance pour le PEAD".
Sans ces fonds, 130 millions de repas ne seront plus distribués en France, avaient-elles estimé, redoutant une "crise humanitaire dès 2012".
Avec Chine Labbé à Paris, édité par Yves Clarisse