Jihad: les deux ados toulousains ont été récupérés

Le père, desespéré, de l'un des deux lycéens, partis faire le jihad. - -
Leur voyage, qui aurait pu se terminer dans un bain de sang, s'est arrêté à temps. Les jeunes toulousains Y., 15 ans, et A., 16 ans, qui avaient quitté l'école pour aller combattre en Syrie en début d'année, ont été récupérés par leurs familles.
A. est rentré dimanche en France, "avec son circuit familial", comme l'a révélé Europe 1, et Y. est encore entendu à Istanbul, en Turquie, par les autorités locales, où son père, qui était jusqu'à présent en plein désarroi, l'a rejoint. Tous deux devraient rentrer très prochainement, selon des sources proches du dossier.
"C'est vraiment une très bonne chose", a réagi le proviseur du lycée des Arènes, Denis Demersseman, évoquant le choc que le départ des deux élèves avait causé dans l'établissement. Y. et A, élèves de seconde générale dans ce lycée toulousain, se sont envolés le 6 janvier pour la Turquie, avec l'intention de rejoindre en Syrie la cohorte de jeunes Français qui combattent au côté des jihadistes. Ont-ils réalisé leur voeu de franchir la frontière? Avec quelles complicités éventuelles sont-ils partis? Les enquêteurs devraient rapidement les entendre à ce sujet.
Un "lavage de cerveau" dénoncé par le père de Y.
Ces départs, révélés seulement une dizaine de jours plus tard, ont mis en lumière le nombre grandissant de candidats européens au jihad, français mais aussi belges ou britanniques. C'est surtout l'âge de Y. et A. qui avait choqué, ainsi qu'une certaine "désanctuarisation" de l'école, soulignait encore lundi une source proche du dossier.
Selon son père, Y., élevé dans une famille musulmane dans le respect des autres et présenté comme un lycéen sans histoires et même plutôt bon élève, a subi un "lavage de cerveau" en quelques semaines sur internet. Ni la famille, ni l'école n'ont rien vu venir. Quant à A., il est décrit comme un lycéen au parcours tortueux, bien connu de la police toulousaine.
Y. se serait servi de la carte bancaire de ses parents pour acheter un billet d'avion pour lui-même et A. sur Turkish Airlines. Le jour de leur départ, deux appels anonymes auraient excusé les adolescents auprès de leur école. Les deux jeunes auraient été en contact avec un troisième homme en Turquie, qui aurait lui aussi affirmé vouloir rejoindre les jihadistes en Syrie et que les autorités turques avaient déjà à l'oeil, indique une source proche de l'enquête.
Un mystérieux "troisième homme"
La police turque, alertée, aurait tenté d'intercepter Y. et A. le 7 janvier, selon cette source. Mais ils auraient réussi à s'envoler pour Hatay, à la frontière turco-syrienne. Le 18 janvier, le "troisième homme" aurait, dans une conversation sur portable, déclaré qu'il se trouvait en compagnie des deux jeunes Toulousains et qu'ils s'apprêtaient à intégrer un camp d'entraînement. Le 19 janvier, presque deux semaines après leur départ, le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, indiquait que les deux adolescents étaient sans doute encore en Turquie.
Le ministre promettait de tout faire pour les retrouver. On ignore les circonstances précises dans lesquelles Y. et A. ont été récupérés. Pour le ministre de l'Intérieur, l'afflux de jihadistes français vers la Syrie, qui n'a pas eu d'égal en Afghanistan, dans les Balkans ou au Mali et qui s'est encore accéléré ces dernières semaines, constitue "le plus grand danger auquel nous devons faire face dans les prochaines années". La grande crainte réside dans le retour en France de ces individus aguerris.
Près de 250 français ou étrangers vivant en France combattraient en Syrie, une centaine seraient en transit pour s'y rendre, 150 auraient manifesté leur volonté d'y aller et 76 en seraient revenus. Vingt-et-un y seraient morts, dont deux demi-frères Toulousains de 30 et 22 ans tués à quatre mois d'intervalle. Mais, au total, ce seraient près de 700 individus qui auraient été ou seraient plus ou moins impliqués. Cependant, la France n'est pas seule concernée. Le phénomène touche tous les pays d'Europe, mais aussi l'Australie, le Canada, les Etats-Unis et les pays du Maghreb.