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Jacqueline Sauvage fait appel de sa condamnation pour le meurtre de son mari violent

L'entrée de la cour d'assises du Loiret à Orléans.

L'entrée de la cour d'assises du Loiret à Orléans. - Google StreetView

Condamnée mardi à dix ans de réclusion criminelle pour le meurtre de son mari violent, cette femme de 65 ans fait appel du jugement des assises du Loiret. Un verdict critiqué par certaines associations de défense des femmes et certains juristes pour sa sévérité.

Dix ans de réclusion criminelle pour avoir tué de trois coups de fusil, le 10 décembre 2012, un mari alcoolique, violent et incestueux. Ce verdict rendu mardi par la cour d'assises du Loiret, eu égard aux circonstances, à savoir l'emprise morale et la violence exercées par la victime sur sa famille, choque tant les proches de sa veuve que les associations. L'avocat de la défenderesse n'a pris qu'une demi-heure de réflexion avant d'interjeter appel. Cette femme et ses enfants, délivrés par la mort de leur tyran domestique, ont pendant les audiences raconté un véritable calvaire.

Coups, viols, agressions sexuelles: un effroyable huis clos

"Mon père est décédé et, pour moi, c'est un soulagement", déclarait l'une des filles, violée à 16 ans. Avec sa mère, femme battue pendant 47 ans de vie commune, elle a été la proie des sévices du tyran familial, un entrepreneur d'une société de transport mort à 65 ans. "Il était sans pitié, c'était plus fort que lui", a ajouté sa sœur aînée. "Il m'a détruite intérieurement, je n'arrive pas à tourner la page", a ajouté la troisième. Toutes trois ont été violées, battues comme l'était leur mère. Leur frère, également victime des violences de son père, s'est suicidé la veille du jour où leur mère finalement tué son mari.

Au cœur de l'audience du vendredi 24 octobre, la présidente de la Cour Catherine Paffenhoff a en revanche longuement questionné la passivité de l'épouse face à ce mari tyran, gros consommateur d'alcool, la non-dénonciation des coups, des incestes. "On avait peur de lui, il nous terrifiait", a répondu l'une de ses filles.

Faudrait-il instaurer une "présomption de légitime défense"?

"Redéfinir la notion de légitime défense", tel est en substance le credo de maître Janine Bonaggiunta interrogée par Le Parisien. L'avocate avait défendu Alexandra Lange, autre femme battue qui avait tué son mari, mais qui à la différence de Jacqueline Sauvage avait été acquittée en 2012. La juriste fait valoir l'exemple du droit canadien qui instaure "une présomption de légitime défense". "En France, les critères de la légitime défense fonctionnent contre un homme qui va vous attaquer dans la rue, un cambrioleur qui vous menace, mais pour une femme qui, d'une certaine manière, est attaquée en permanence", fait-elle valoir.

Plusieurs associations, telles "Une femme, un toit" ou la "Fédération nationale solidarité femmes" pointent une mauvaise information des professionnels de santé, comme des magistrats. Cette fédération rappelle aussi l'existence de "violences femmes info", qui au 3919 offre une écoute anonyme et gratuite aux victimes de toutes les formes de violences.

David Namias