EuroMillions: le second tirage qui fait grincer des dents

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Jusqu'alors, les inconditionnels du produit phare de la FDJ devaient attendre le vendredi pour remplir leur grille. Dorénavant, ils pourront aussi jouer à l'Euromillions le mardi. Chaque semaine, plus de 3.5 millions de Français - les plus gros joueurs et les plus gros gagnants d'Europe - tentent leur chance, avec à la clé des pactoles parfois pharamineux. Le record de gains tricolore est de 100 millions d'euros empochés par un groupe d'une quinzaine d'amis vivant dans les Bouches-du-Rhône, en 2009. C'est cette même cagnotte qui est mise en jeu ce mardi 10 mai.
Mais ce second tirage est-il réellement un cadeau fait aux habitués ? Rien n'est moins sûr.
Un impôt supplémentaire
Pour le sociologue spécialiste des jeux, Michel Pinçon, la décision s'apparente purement et simplement à un impôt supplémentaire : « La Française des Jeux est une société publique dont le principal actionnaire est l'Etat. Une partie des gains partent dans ses caisses. Ce qui fait qu'on a bien un impôt, et qui n'est pas négligeable. Ceci dit, ce n'est pas une si mauvaise chose que cela, puisque c'est de l'argent qui abonde les finances publiques ». En 2010, la FDJ a reversé environ 2 milliards et demi à l'Etat.
« Les joueurs vont perdre deux fois plus... »
Une partie des recettes des jeux (6%) est également reversée aux buralistes qui vendent les grilles. Mais pourtant, eux non plus ne semblent pas voir d'un oeil si bienveillant la multiplication des tirages. Emmanuelle, qui tient un bureau de tabac dans le 14e arrondissement de Paris, est dubitative: « Les joueurs vont dépenser deux fois plus, ils vont y croire deux fois plus et ils vont perdre deux fois plus. Ça ne va rien leur apporter. Nous on vend du rêve, mais à un moment on a envie de leur dire qu'il faudrait peut-être arrêter, qu'ils ont déjà beaucoup perdu. Mais après ils font ce qu'ils veulent ».
« Ils utilisent les gogos de notre espèce »
Pire, les habitués de l'EuroMillions eux-mêmes ne donnent pas tous l'impression d'aimer cette nouveauté. Philippe, par exemple, qui dit jouer au moins une fois par semaine, estime que « sous couvert d'augmenter nos chances de gagner, ils vont continuer à ruiner un peu plus les gens faibles, dans la panade, qui n'ont pas d'autres solutions. Ils utilisent les gogos de notre espèce. C'est de l'escroquerie, ce sont des maquereaux ». Ce qui n'empêchera pas Krina, une serveuse parisienne, de succomber à la tentation : « Ce que ça va changer ? Je vais dépenser encore plus ! Mais personne ne m'oblige et j'ai l'espoir de gagner. Si on ne joue pas, de toutes façons, on ne peut pas gagner ».