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Société

Energies renouvelables : ça va coûter cher au contribuable, selon la Cour des comptes

L’Etat a trop privilégié le développement du solaire au détriment d’autres énergies, selon la Cour des comptes.

L’Etat a trop privilégié le développement du solaire au détriment d’autres énergies, selon la Cour des comptes. - -

La Cour des comptes critique, dans un rapport publié jeudi, la politique de l’État en faveur des énergies renouvelables. Selon les Sages, l'objectif en la matière est trop élevé et va nécessiter d'importants surcoûts à la charge du contribuable et du consommateur.

Les dépenses publiques en faveur des énergies renouvelables coutent extrêmement cher, et en plus elles ne sont pas efficaces ! La Cour des Comptes, dans un rapport dévoilé jeudi, dresse un constat sévère de la politique de l’Etat vis-à-vis des énergies renouvelables. L’objectif, déjà, paraît très ambitieux : les énergies « propres » devront représenter 23% de la consommation d’ici 2020, alors qu’elle n’en représente aujourd’hui que de 13,1%. L'effort à faire représente donc « globalement six à sept fois ce qui a été réalisé » lors des sept années précédentes, relève la Cour des comptes. En gros, il va falloir augmenter franchement les investissements. Le hic, c’est que cela coûte déjà très cher : entre 2005 et 2011, le coût de la politique de soutien mise en place par les pouvoirs publics a représenté 14,3 milliards d'euros en cumulé pour le contribuable et le consommateur. D’ici la fin de la décennie, le consommateur aura payé un surcoût de 40 milliards d’euros.

« Le consommateur y perd forcément »

« Pour le moment le consommateur y perd forcément, explique Nicolas Goldberg, spécialiste énergie pour la société de conseil Columbus. Le renouvelable s'achète 4 à 8 fois plus cher que l'électricité classique, donc oui, le consommateur paie la montée en puissance du renouvelable. Mais sur le long terme, quand les tarifs baisseront lorsque les énergies renouvelables seront matures, là le consommateur pourra potentiellement y gagner. Mais il faut choisir les filières dans lesquelles on peut être compétitif. On a fait certains choix malencontreux de créer une filière de zéro alors que d'autres pays avaient déjà de l'avance. L'exemple classique c'est le solaire, alors que l'on pouvait faire les investissements sur d'autres filières, comme la biomasse par exemple ». Voilà un autre problème pointé du doigt par la Cour des comptes. L’Etat a trop privilégié le développement du solaire au détriment d’autres énergies. L'électricité photovoltaïque capte près des deux tiers de la part dévolue aux renouvelables et ponctionnée sur les factures d’électricité des ménages, alors qu'elle ne produit que 2,7% de l'électricité « verte » en France.

« On a plus fait dans le m’as-tu-vu plutôt que dans l’efficacité »

« Il faut réduire la voilure, demande Lucas Léger, spécialiste des énergies renouvelables à l'Institut de recherche économique et fiscal, un think-tank libéral. Il y a eu un gros lobbying du photovoltaïque et de l’éolien pour des énergies très peu efficaces, notamment l’éolien qui produit très peu et revient très cher. On a plus fait dans le m’as-tu-vu plutôt que dans l’efficacité alors que nos finances publiques ne nous le permettent pas. Et ça ne permet pas non plus de réduire la facture du consommateur. Ça n’a aucune cohérence ».

« 125 000 emplois créés »

Réduire la voilure ? Surtout pas répond Jean-Louis Bal, président du syndicat des énergies renouvelables (SER, représente 480 entreprises du secteur) : « Il n’y a pas que des coûts, mais aussi des bénéfices et notamment de la création d’emploi. Si on attend les objectifs de 2020 sur le renouvelable, on pense qu’on va créer 125 000 emplois, ce qui est loin d’être négligeable. On va réduire le déficit commercial de 3,5 milliards, c’est-à-dire environ 5% de l’actuel déficit. Et il y a les effets sur les émissions de gaz à effets de serre eux aussi très conséquents ». La Cour des comptes ne remet d’ailleurs pas en cause la politique française en matière d’énergies renouvelables. Message principal: « Il faut redoubler d'efforts pour améliorer le rapport coût-efficacité de chacun des dispositifs d'aide existants et savoir arbitrer sur les soutiens aux différentes filières ». Autre conseil : réorienter les aides « vers les filières les moins coûteuses au mégawattheure produit » (éolien terrestre, biomasse, etc.) tout en veillant aux avantages industriels qu'elles procurent à la France.

Philippe Gril avec Matthieu Moulin