BFMTV
Education

Un schizophrène recruté par l'Education nationale

Un homme de 26 ans, échappé d'un hôpital psychiatrique en Irlande, s’est fait embauché comme prof dans un lycée à Digne-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence).

Un homme de 26 ans, échappé d'un hôpital psychiatrique en Irlande, s’est fait embauché comme prof dans un lycée à Digne-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence). - -

Un homme de 26 ans, évadé en novembre d'une unité psychiatrique d'Irlande du Nord, a enseigné pendant près d'un mois dans deux établissements scolaires des Alpes-de-Haute-Provence avant d'être démasqué. Témoignages et explications.

A Digne-les-Bains (Alpes-de-Haute-Provence), dans le lycée Pierre Gilles de Gennes, la direction s'est aperçue que le professeur qu'elle avait engagé en qualité de vacataire, le 3 janvier dernier, était en fait un imposteur. Lewis Alexander Mawhinney avait poignardé en septembre 2007 un jeune homme dans un ascenseur de Belfast. Présenté comme un « schizophrène dangereux » par la justice nord-irlandaise, Mawhinney avait été interné fin 2008 sur décision judiciaire pour une durée indéterminée. Il s'est échappé en novembre avant de trouver refuge dans les Alpes-de-Haute-Provence.

La proviseure : « Je n’ai rien remarqué d’"anormal" »

Comme au collège Borrely de Dignes, où il a également enseigné l'allemand jusqu'au 25 janvier, Mawhinney s'était présenté au lycée Pierre Gilles de Gennes pour effectuer un remplacement. Et lors de l'entretien préalable, il n'avait éveillé aucun soupçon, explique Pascale Garrec, la proviseure du lycée : « Je n’ai rien remarqué d’"anormal". Ce n’était pas un boute-en-train, il était très sérieux, mais enfin, il y a plein de gens comme ça ! Un jeune homme ordinaire… »

« La procédure de recrutement des vacataires a été respectée », a expliqué une porte-parole de l'Académie d'Aix-Marseille. Pour pallier l'absence de professeurs titulaires, le rectorat a puisé dans son « vivier de candidatures » composé de lettres spontanées et de curriculum vitae déposés auprès de ses services. Mawhinney, qui possédait les diplômes requis pour le poste, a ainsi été choisi. Il a passé avec succès un entretien avec un inspecteur pédagogique régional qui a vérifié son aptitude à enseigner.
Parallèlement, le rectorat a demandé un extrait de casier judiciaire qu'il a reçu ce mardi, soit une semaine après avoir relevé le vacataire de ses fonctions.

« Mais quand il a dit qu’il travaillait pour les services secrets britanniques… »

Comment s'est-elle rendu compte que le professeur d'allemand était un peu "dérangé" ? « Il a dit très sérieusement à ma collègue qu’il travaillait pour le MI-5, les services secrets britanniques, à plusieurs reprises, de manière très rapprochée. C’est ce qui nous a un peu interpelés. Donc j’ai alerté ma hiérarchie et les services de police. Il a été établi qu’il n’était pas des services secrets, bien sûr et qu’il souffrait de troubles psychiatriques. On a pris toutes les dispositions très rapidement, pour que la situation soit réglée au plus vite. »

Une élève : « Il n’avait pas l’air méchant »

Marie, une élève de terminale, connaissait ce professeur et le côtoyait le midi à la cafeteria du lycée : « il était toujours tout seul, ne parlait pas trop, regardait les gens bizarrement, mais il n’avait pas l’air méchant. Il était toujours habillé "classe", en costard et chaussures pointues ; on n’aurait jamais pensé ça. Vus ces antécédents, il aurait pu poignarder quelqu’un comme ça, quand ça lui prenait… »

« Par chance, il ne s’est rien passé, mais… »

Choquée par cette histoire, la présidente de la FCPE des Alpes-de-Haute-Provence, Annie Moutier, ne cache pas sa colère et son inquiétude : « Par chance, il ne s’est rien passé ; la proviseure a réagi très vite. Mais ça interpelle, on se dit qu’il aurait pu se passer quelque chose et on est très en colère quand on voit que l’éducation nationale ne remplit pas sa fonction. On est en train d’appauvrir le service public, donc on va peut-être petit à petit avoir moins confiance dans le système. »