"Le médecin n'a pas pris son cas au sérieux": elle porte plainte contre le Samu après la mort de sa mère

Le 21 août 2020, Yolande, 65 ans, se plaint de douleurs au thorax. Après de brefs examens à l'hôpital, elle est renvoyée à son domicile. Mais son état de santé se dégrade et elle appelle alors le Samu.
Les échanges téléphoniques sont glaçants. "J'ai des douleurs plus fortes", entend-on dire Yolande à l'assistante de régulation, dans l'enregistrement des échanges que BFMTV a pu consulter. Elle suffoque et se plaint mais son interlocutrice s'agace. "On va se calmer", lui dit-elle.
"Putain, parlez dans le téléphone"
L'appel est transféré à un médecin du Samu. Mais lui aussi se montre impatient et méprisant avec la patiente. "Il faut vous calmer, vous n'avez pas 36.000 médicaments à prendre...", lui lance-t-il.
Après plusieurs minutes d'échange, Yolande a du mal à s'exprimer à cause des douleurs. Le médecin s'énerve, jusqu'à se montrer insultant. "Si vous ne parlez pas dans le téléphone on ne peut pas s'entendre. (...) Mais putain, mais parlez dans le téléphone", entend-t-on dans l'échange.

Le praticien semble alors sous-estimer le danger. Il lui envoie une ambulance. Mais lorsqu'elle arrive sur place une heure plus tard, il est déjà trop tard. Yolande est morte chez elle.
"Elle ne méritait pas ça, de mourir comme un chien sur le sol de la cuisine", confie Laura avec colère.
Pour elle, sa mère a donné tous les signaux du danger qu'elle encourrait. "Dans toute sa douleur, elle a donné des clefs pour que ce médecin puisse diagnostiquer un infarctus. Ce médecin n'a pas pris la bonne décision."
"Un manque d'humanité"
"L’ambulance est arrivée de manière tranquille, je pense que le médecin n’a pas pris le cas de ma mère au sérieux", juge-t-elle.
Laura se demande comment un tel drame a pu arriver à sa mère. "Pourquoi il n'a pas cru ma mère? C’est l’incompréhension. Il y a un manque d’humanité chez certaines médecins."
"Ce drame aurait pu être évité. Surtout qu'il y a eu un précédent, je pense à une jeune femme, Naomi Musenga, qui est morte dans des conditions un peu similaires. (...) Quelle leçon a été tirée du passé?", dénonce-t-elle, en faisant référence à cette jeune femme morte en 2017, quelques heures après avoir appelé le Samu et qui n'avait pas été prise au sérieux par les opératrices téléphoniques.
En plus de l'attitude du médecin du Samu, Laura François dénonce la décision de l'hôpital de Meaux d'avoir laissé partir sa mère, prise en charge la veille par les urgences.
"Maman n'aurait jamais eu à appeler le Samu si les médecins de l'hôpital de Meaux ne l'avaient pas fait sortir (la veille) à 3h30 du matin. Chacun doit assumer sa part de responsabilité", estime-t-elle.
Une enquête préliminaire ouverte
Les deux soeurs ont porté plainte le 21 octobre 2021 pour homicide involontaire et omission de porter secours contre le Samu de Seine-et-Marne et contre le Grand hôpital de l'Est parisien. Une enquête préliminaire a été ouverte en mars.
De son côté, le directeur du Samu du département reconnaît une "exaspération injustifiée" du médecin régulateur, mais estime que "la continuité de la prise en charge n’en a pas été affectée".