Covid-19: que sont les anticorps monoclonaux, traitement étudié contre le virus?

Particules du SARS-CoV-2 isolées d'un patient - HANDOUT / NATIONAL INSTITUTE OF ALLERGY AND INFECTIOUS DISEASES / AFP
"De nouveaux traitements antiviraux sont maintenant disponibles. Ce sont des anticorps monoclonaux qui bloquent spécifiquement l’entrée du virus dans les cellules", écrit l'Académie de Médecine, dans un communiqué publié lundi dernier. Développés actuellement par plusieurs laboratoires dans le monde, l'un de ces traitements aux anticorps monoclonaux est actuellement examiné par l'Agence européenne du médicament, et semble prometteur pour lutter contre l'épidémie de Covid-19.
Les anticorps monoclonaux anti-SARS-CoV-2 "ont fait l’objet de deux essais randomisés contre placebo en double aveugle, qui ont démontré une diminution significative de la charge virale et une diminution du risque d’hospitalisation chez les patients à risque de forme sévère", explique l'Académie de Médecine. "Les résultats d’autres études encore non publiées confirment l’intérêt de ces traitements, notamment en cas de foyer épidémique à l’hôpital et en maison de retraite."
• Que sont les anticorps monoclonaux?
Le principe de ce traitement est d'injecter au patient des anticorps contre la maladie, produits en amont, afin que son corps en produise à son tour. "L'idée est d'aller chercher les anticorps les plus performants et de les produire en laboratoire - donc ce sont bien des anticorps artificiels - et de stimuler, par une injection, une immunité passive", expliquait fin janvier sur BFMTV Yves Coppieters, médecin épidémiologiste.
"Si vous vous faites infecter ou si vous vous faites vacciner, vous développez une immunité active, avec toute une série d'anticorps naturels. Ici c'est simplement de donner un type d'anticorps neutralisants particuliers, produits en laboratoire", ajoutait-il.
Dans notre organisme, "les anticorps sont les protéines de défense que notre système immunitaire produit lorsqu’il est exposé à un micro-organisme infectieux", détaille le site d'informations médicales Vidal. "Les anticorps reconnaissent précisément un virus ou une bactérie, s’y attachent et le signalent ainsi au reste du système immunitaire qui va se charger de l’éliminer".
Ce système est utilisé depuis plusieurs années pour d'autres pathologies, comme la lutte contre le cancer. "C'est une approche classique qu'on utilise dans d'autres maladies comme l'hépatite B par exemple, où on peut utiliser des anticorps après le contact avec le virus, donc c'est une piste à étudier", déclarait fin janvier sur BFMTV, Christian Rabaud, infectiologue au CHRU de Nancy
• Comment les utiliser contre le Covid-19?
L'utilisation de ce traitement contre le Covid-19 ne s'adressera pas à tous. L'Académie de Médecine recommande ainsi de ne le fournir qu'aux "patients âgés ou atteints de comorbidités" qui "risquent de développer des formes sévères de Covid-19", et donc d'être hospitalisés, voire admis en réanimation. Le traitement serait destiné, aux "personnes fragiles qui débuteraient la maladie, pour leur empêcher d'avoir des complications", déclare Yves Coppieters.
"C'est fait pour s'adresser à un patient en début de maladie avant que le virus n'ait fait ses dégâts", explique Christian Rabaud. Avec le Covid "on sait qu'il y a une phase très virologique, où le virus se multiplie, puis ensuite il y a des désordres qui font la gravité de la maladie. Là il semble trop tard pour compter sur l'effet des anticorps monoclonaux. Donc c'est vraiment quelqu'un à haut risque qui viendrait de se contaminer, avec les anticorps on empêche quelque part le virus de pouvoir s'implanter et de faire des dégâts".
Comme le précise l'Académie de Médecine, ce type de traitement est autorisé et utilisé "depuis 2 mois aux États-Unis et au Canada, plusieurs milliers de patients ayant été traités et une tolérance très satisfaisante. Certains pays européens, comme l’Allemagne récemment, ont permis l’accès à ces traitements", explique-t-elle. L'ancien président américain Donald Trump avait d'ailleurs reçu début octobre ces anticorps, créés par l'entreprise Regeneron, lorsqu'il avait été brièvement hospitalisé après avoir été contaminé.
Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal avait annoncé sur BFMTV fin janvier que des recherches étaient en cours pour développer ce traitement en France.
• Quelles limites?
L'un des premiers blocages concernant ce remède au Covid-19, c'est son prix, pouvant atteindre plusieurs milliers d'euros par patient. Selon Le Monde, c'est ce coût qui "nécessite en effet de cibler les populations les plus à risque", et de ne pas traiter l’ensemble des individus qui présenteraient un test positif. D'après le quotidien, les perfusions nécessaires pour l'administration des anticorps pourraient également poser un problème logistique, car elles nécessitent un créneau de plusieurs heures.
"Il est tout à fait logique de se lancer dans cette recherche, et de faire attention aussi aux effets délétères qu'elle pourrait poser, sur ce virus et sur un potentiel à aider le virus à muter", souligne Christian Rabaud. "C'est quelque chose avec lequel il faut être prudent, mais sur lequel il faut travailler."
