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Politique

Reconnaissance sans repentance : les mots justes de François Hollande

Hervé Gattegno

Hervé Gattegno - -

François Hollande a rendu hommage hier, dans un communiqué, aux victimes de la répression policière à Paris le 17 octobre 1961, contre une manifestation pour l’indépendance de l’Algérie. François Hollande a (enfin) trouvé les mots justes.

Le choix de la forme – un communiqué de 3 lignes – montre que l’Elysée n’a pas voulu théâtraliser à l’excès cette reconnaissance officielle. Il n’empêche que c’est un événement. Pour la 1ère fois, c’est la France qui admet l’existence d’une « répression sanglante» contre ces manifestants innocents, pacifiques. François Hollande l’avait déjà fait, l’an dernier, mais il n’était que candidat, pas encore élu. Et ses prédécesseurs, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, avaient dénoncé, eux, des actes imputables à l’Etat colonial, mais jamais en rapport avec la guerre d’Algérie. François Hollande a rompu ce silence trop long et trop lourd. Il a eu raison.

En quoi cette reconnaissance est-elle aussi importante ? Est-ce qu’elle peut contribuer à apaiser les relations entre l’Algérie et la France ?

Sans doute. En Algérie et en France, beaucoup d’historiens, d’associations et tous les partis de gauche attendaient ce geste. Certains espéraient une forme de repentance. François Hollande n’est pas allé jusque-là. Il me semble qu’il a eu raison aussi. Les faits et l’histoire doivent primer sur les jugements moraux. La France fait un pas vers l’établissement de la vérité sur cette période. Si les Algériens acceptent d’en faire autant sur les atrocités qui ont eu lieu aussi chez eux, le temps des mea culpa pourra venir ensuite. La priorité, c’est d’ouvrir les archives. Des deux côtés de la Méditerranée.

Le président de la République doit se rendre en Algérie en décembre. Est-ce qu’on peut penser qu’il a voulu amadouer les autorités algériennes avec ce communiqué ?

Oui. C’est d’abord une affaire de principe, mais pas seulement. En fait, le geste de François Hollande a un triple intérêt.
1. Symbolique : parce que (contrairement à ce que disent Christian Jacob et une partie de l’UMP) c’est bien la police parisienne qui s’est déshonorée dans le massacre de 1961 et pas seulement le préfet Maurice Papon. C’est donc bien un crime qui engageait l’Etat. Et un crime contre des Français puisque, ne l’oublions pas, l’Algérie était française à ce moment-là.
2. Politique : c’est évidemment un signe d’apaisement envers l’Algérie, et aussi envers tous les Algériens de France dont les enfants sont souvent français.
3. Stratégique : l’Algérie a une influence forte dans la région du Sahara, en Libye, au Mali, et sur la question des otages. C’est un allié potentiel qui joue un rôle essentiel. On ne peut pas s’en passer.

D’un mot, François Hollande a aussi accordé un long entretien au journal Le Monde daté de ce jeudi sur sa vision de l’Europe…

C’est un texte fumeux, embrouillé, qui sous des formules ambitieuses mais un peu creuses, donne de l’Europe une vision surtout technocratique. Hormis le fait qu’il évoque une série de nouvelles instances de décision qui vont se réunir régulièrement, il n’en ressort pas grand-chose de concret. C’est le contraire de ce qu’il faudrait faire pour redonner un souffle démocratique au projet européen. Autant François Hollande a su trouver, sur le sujet algérien, quelques mots bien pesés, autant son plaidoyer européen est surtout bien pesant. C’est sans doute plus facile d’avoir des idées claires sur le passé que sur l’avenir.

Pour écouter le Parti Pris d'Hervé Gattegno de ce jeudi 18 octobre, cliquez ici.

Hervé Gattegno