BFMTV
Politique

Pourquoi François Hollande a reporté la PMA

Les Coulisses de la Politique, de Jean-François Achilli, du lundi au vendredi à 7h20 sur RMC

Les Coulisses de la Politique, de Jean-François Achilli, du lundi au vendredi à 7h20 sur RMC - -

François Hollande a-t-il reculé ? La PMA ne fera pas partie du texte de loi sur le mariage pour tous, discuté le 29 janvier à l’Assemblée. Un report pour ne pas fâcher ceux qui vont manifester dimanche contre le mariage gay ? Pas sûr.

La PMA, c’est un peu le sujet de trop, celui qui fait peur, qui divise, y compris au sein même de la gauche. Pour bien comprendre de quoi il est question, la PMA désigne les techniques, telles que la fécondation in vitro, le transfert d’embryons ou l’insémination artificielle, qui permettent une procréation hors processus naturel. Elle est autorisée de manière encadrée pour les couples mariés hétéros. La procréation médicalement assistée est autorisée pour tous en Espagne ou en Belgique, il n’y a aucun problème, alors qu’en France, seules les femmes hétérosexuelles, en couple depuis au moins deux ans, peuvent y recourir mais pour des raisons thérapeutiques. Et c’est son éventuelle extension aux couples de lesbiennes qui heurte les opposants au mariage pour tous, qui vont défiler dans trois jours, alors que des femmes vont se faire inséminer notamment à Bruxelles, les mamans Thalys…

Le PS était divisé sur l’opportunité de voter cette PMA tout de suite ?

Plutôt oui. Un tiers des députés socialistes s’est opposé le 19 décembre dernier au dépôt d’un amendement PMA au projet de loi mariage pour tous. La question ne fait pas l’unanimité. François Hollande lui-même tient à son engagement de campagne numéro 31, autorisant le mariage gay et l’adoption, mais il ne concernait pas la procréation médicalement assistée. Mercredi matin, réunion à 9h15 à Matignon. Jean-Marc Ayrault a tranché : cette PMA sera portée par le gouvernement, et non plus par les députés, mais plus tard, dans le cadre du projet de loi sur la famille qui sera présenté en conseil des ministres en mars. Et tant pis si les Verts, les communistes, ou l‘association LGBT râlent. Bruno Le Roux, le président du groupe PS qui bataille pour le texte depuis des mois, marque un point : la PMA un temps menacée, sera bel et bien inscrite à l’agenda législatif 2013. Si tout va bien.

Le gouvernement a voulu jouer l’apaisement avec la manif de dimanche

Mais pas seulement. Tout d’abord, la mesure présentait un risque d’inconstitutionnalité. Parce qu’elle aurait été autorisée pour des femmes fertiles mais homos, alors qu’elle ne concerne aujourd’hui que les femmes hétéros infertiles. Il y avait donc inégalité devant la loi et un risque de rejet comme la taxe à 75%. Autre souci : autoriser la PMA pour les couples de lesbiennes, c’était la porte ouverte à la gestation pour autrui interdite en France. Puisqu’un couple de femmes fertiles peut avoir un enfant, un couple d’hommes pouvait donc réclamer le même droit, en faisant porter l’enfant par une femme hors du couple. Le sujet immanquablement viendra sur la table. François Hollande, qui ne veut pas d’un deuxième camouflet, veut aller vite avec le texte mariage pour tous, qui lui n’est pas inconstitutionnel, les sages de la rue de Montpensier se sont déjà penchés sur la question en 2011.

Le texte ensuite séduit au centre, mais aussi quelques rares UMP

Il devrait être voté, malgré les manifs. Y ajouter la PMA l’aurait fragilisé, avec un risque de durcissement des débats. Enfin, oui, cela fera un sujet en moins pour tous ceux qui vont descendre dans la rue dimanche, mais qui manifesteront quand même, PMA ou pas.

Ça n’empêchera pas une forte mobilisation. Y a-t-il un risque pour le gouvernement ?

Vous allez voir. Il pourrait y avoir un demi-million de personnes dans la rue, mais dès dimanche soir, les responsables socialistes, les ministres, vont écumer les plateaux télés pour dire que le gouvernement ne reculera pas, bien au contraire. Le chef de l’Etat va chercher à tourner cette mobilisation à son avantage. François Hollande qu’une large partie de l’opinion accuse d’indécision ou de mollesse, va trouver là l’occasion de montrer ses muscles, sa détermination à aller au bout d’une réforme sociétale, qui fera son chemin, comme le PACS.

Ecoutez ici les Coulisses de la Politique de Jean-François Achilli de ce jeudi 10 janvier

Jean-François Achilli