Pour sauver la Sécu, changeons d’optique, pas de lunettes

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L’exemple des lunettes illustre le faux débat français sur la Sécurité sociale et les déficits publics. La Sécu est en danger, mais personne ne veut rien changer. Deux logiques s’opposent : le déficit ou le déremboursement – une logique étatiste, une logique libérale. Soit la Sécurité social ne rembourse plus les lunettes ; soit elle les rembourse de moins en moins. Cela fait 2 options mais 0 solution pour rétablir les comptes sociaux. En réalité, il faut sans doute réduire le périmètre des prestations, mais aussi en finir avec les abus et cela concerne tous les Français – changer un peu moins de lunettes et un peu plus d’optique…
-> Sécu : dérembourser l'optique ?
Ce à quoi les Français sont très attachés, c
Sûrement pas – et il est étonnant que la Cour des comptes le propose, même à mots couverts. Le problème, c’est que l’universalité est déjà atteinte: 1 Français sur 5 renonce à se faire soigner par manque d’argent. De fait, en moyenne, la Sécurité sociale ne rembourse plus que 50% des dépenses courantes de santé. Donc l’inégalité est patente : ceux qui ont le moins de revenus sont les moins bien soignés. Pour sortir du cercle vicieux, il faut absolument instaurer une couverture complémentaire pour tous. Le gouvernement a raison de vouloir le faire.
Ce que dit la Cour des comptes, c
C’est un pari libéral. La concurrence est salutaire mais la santé n’est pas vraiment un marché. Aujourd’hui, la Sécurité sociale ne rembourse presque rien sur les lunettes – donc les mutuelles gouvernent déjà le secteur et les prix ont quand-même explosé. En fait, la Sécu a bloqué le montant du remboursement mais les prix des verres et des montures sont libres. Les opticiens font des marges énormes et ils font croire que pour une paire, ils vous en offrent 2 ou 3 sur le dos des mutuelles. C’est tout le système de santé qui en pâtit parce que la gratuité n’existe pas : ce qu’on ne paie pas dans le magasin, on le paie en cotisation. C’est une illusion… d’optique.
Le rapport de la Cour des comptes recommande aussi de diminuer les séjours à l'hôpital et les frais d'analyses médicales. Est-ce que ce sont des pistes intéressantes ?
Il faut accepter l’idée que pour sauver l’essentiel, on doit réduire certaines dépenses. Mais c’est aux professionnels de la santé de faire les choix, pas aux comptables. Ce qu’il faut aussi rappeler, c’est que par-dessus tous les abus et les mauvaises habitudes, le déficit de la Sécu vient du chômage : moins il y a d’emploi, moins il y a de cotisations et de CSG, donc plus le gouffre se creuse. Ça veut dire que pour soigner la Sécurité sociale, il faut guérir la France du chômage. C’est un horizon assez lointain. Pour regarder aussi loin, il vaut mieux avoir de très bonnes lunettes…