Fâcherie entre Ferrand et Larcher autour de l'affaire Benalla: "Ça tourne au grotesque"

Richard Ferrand et Gérard Larcher - LUDOVIC MARIN / AFP
Ça ne discute plus, ça boude, ça chicane. Ce mercredi, le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand a déclaré qu'il irait "seul" à une conférence prévue vendredi, à Créteil, avec son homologue du Sénat Gérard Larcher. Une manière, pour le proche d'Emmanuel Macron, de "marquer" son mécontentement après la saisine de la justice, par le Bureau du Sénat, sur les cas de trois hauts responsables de la présidence de la République, dans le cadre de l'affaire Benalla.
Vendredi dernier, déjà, Richard Ferrand avait boycotté une conférence commune qu'il devait tenir avec Gérard Larcher devant des étudiants à Lille. C'était au lendemain de l'adoption du rapport rédigé par Philippe Bas et ses deux co-rapporteurs de la commission d'enquête sur l'affaire Benalla. Un document qui a achevé de distendre, jusqu'à nouvel ordre, les liens entre les têtes des deux assemblées.
"Marquer le coup"
Sur Europe 1, le président de l'Assemblée nationale a dit avoir "téléphoné" à son homologue du palais du Luxembourg pour lui dire, en amont, "écoutez président voilà, vous irez à Lille tout seul et moi j'irai à Créteil tout seul". Une version des événements révélée en amont par L'Express.
Vendredi, l'ancien ministre de la Cohésion des territoires doit se rendre à la faculté de droit de Créteil pour débattre de "la démocratie représentative" et "participative". La présidence du Sénat a confirmé à l'AFP que Gérard Larcher ne s'y rendrait pas, mais qu'il serait à Toulouse pour le congrès de France urbaine.
"Il faut bien marquer le coup lorsqu'on a le sentiment profond qu'une procédure démocratique est utilisée à des fins politiciennes. On ne peut pas faire semblant d'être dans une coopération joyeuse lorsqu'il y a un coup de canif dans la confiance qui est mis. Mais il ne faut pas parler de guerre", a plaidé le député du Finistère ce mercredi.
"Franchement, ça intéresse qui?"
Si les sénateurs du groupe LaREM souscrivent à la riposte choisie par Richard Ferrand, d'autres trouvent que ce n'est "pas au niveau". "Il ne faut plus s'étonner que les Français se détournent des politiques. Là ça tourne au grotesque", raille un élu centriste pourtant défavorable à l'adoption du rapport Bas - donc plutôt conciliant vis-à-vis de ses collègues macronistes.
"Franchement, ça intéresse qui les querelles entre Ferrand et Larcher? D'autant que là, avec le 'package' législatif qui va découler du grand débat national, on va arriver sur des plaques de verglas. Et le gouvernement aura besoin de tout le monde, y compris au Sénat", poursuit-il auprès de BFMTV.com. Et d'espérer que "la raison va rapidement reprendre le dessus".
"Il faut rester zen"
Richard Ferrand, lui, estime que "la franchise des actes" est préférable à "l'hypocrisie des faux-semblants". Son camarade François Patriat, patron des sénateurs LaREM, approuve cette méthode.
"Il faut être ferme sans être belliqueux. Il faut rester zen. On ne peut pas, comme l'a fait Philippe Bas, d'un côté dire qu'il faut défendre le Sénat, ses institutions, etc, et de l'autre en faire un usage politicien comme il l'a fait", estime-t-il.
Le sénateur centriste cité plus haut voit les choses d'un regard amusé: "Philippe Bas a fait son show avec la commission d'enquête, maintenant il remet ça avec les violences du samedi 16 mars, avec Castaner et Belloubet qui passent au gril. Il est devenu auto-entrepreneur en auditions."
Le Sénat a choisi jeudi dernier de saisir la justice non seulement du cas de l'ancien collaborateur de l'Élysée Alexandre Benalla, mais aussi de ceux de trois hauts responsables de la présidence: le secrétaire général de l'Élysée Alexis Kohler, le directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, Patrick Strzoda, et le général Lavergne, chef du GSPR. Une décision vécue comme une déclaration de guerre par la majorité présidentielle.