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Parlement

Budget 2023: de la macronie aux oppositions, les enjeux d'une séquence politique explosive

L'Assemblée nationale le 4 octobre 2022

L'Assemblée nationale le 4 octobre 2022 - Christophe ARCHAMBAULT / AFP

L'examen du projet de loi de finances démarre ce lundi. Les débats s'annoncent sous très haute tension, alors que tous les bancs de l'hémicycle sont sous pression. L'exécutif doit affirmer son autorité, tout en respectant sa volonté de dialogue. Le RN et la Nupes jouent, eux, leur crédibilité.

Le marathon parlementaire du budget 2023 commence ce lundi après-midi dans l'hémicycle dans une ambiance hautement inflammable. Si l'exécutif joue gros et devra très probablement avoir recours au 49.3, les autres groupes parlementaires sont eux aussi attendus au tournant.

• Le gouvernement: un 49.3, loin de sa nouvelle méthode de dialogue

Bruno Le Maire et Gabriel Attal, les deux locataires du ministère de l'Économie, ont bien tenté d'arrondir les angles dans une Assemblée nationale sans majorité absolue via les dialogues de Bercy. Sans convaincre.

De quoi rendre quasi certain le recours au 49.3. Cet article de la Constitution permet de suspendre l'examen d'un texte et de l'adopter, moyennant l'engagement de la responsabilité du gouvernement.

Trois options sont sur la table: l'utilisation de cet outil à la fin de la première partie des débats le 19 octobre. De quoi permettre au gouvernement de montrer qu'il aura jusqu'au bout tenté d'échanger avec tous les bancs de l'hémicycle. Mais plus de 3500 amendements ont été déposés, laissant augurer de très longs débats et un calendrier compliqué à tenir, rendant peu probable cette option.

Seconde piste: mener les débats le plus longtemps possible et dégainer le 49.3 si les discussions n'avancent plus. La méthode vise à dire que le gouvernement aura fait tout son possible, et rejeter la responsabilité du blocage sur les oppositions.

Dernière possibilité sur la table: utiliser le 49.3 dès les premiers jours de débat. Si la manœuvre vise à éviter de faire durer les débats, elle donne aussi du grain à moudre aux adversaires du gouvernement qui pourraient pointer du doigt une absence de débat parlementaire.

Officiellement, le gouvernement refuse d'avancer tout calendrier précis.

"J'attends beaucoup du débat, mais encore faut-il qu'il y ait un débat qu'il n'y ait pas d'obstruction et de volonté de blocage", a avancé Gabriel Attal ce lundi sur France inter.

• Les LR: tentés de surjouer l'opposition en pleine lutte interne

Le gouvernement mise sur les 60 députés LR pour parvenir à dialoguer avec une partie de l'hémicycle dans les prochains jours. Malgré leur franche opposition publique à Emmanuel Macron, les élus de droite ont voté quasiment tous les textes depuis le début de la mandature. Annie Genevard, la numéro 2 des LR, a dit oui à 96% des textes. Éric Ciotti, candidat à la présidence des LR, a voté, lui, en faveur des 82% des projets de loi.

Mais le contexte interne pourrait peser lourd. En pleine course pour la présidence du parti, la tentation de monter sa différence avec la macronie pour convaincre les militants LR est importante.

De quoi inquiéter certains à droite qui refusent de s'opposer au gouvernement sur plusieurs mesures porteuses pour leur électorat, comme l'augmentation du nombre de policiers et de gendarmes.

• La Nupes: rester unis après une rentrée cauchemardesque

Pris dans la tempête médiatique, entre l'affaire Adrien Quatennens et le cas de Julien Bayou, la Nupes voit arriver avec soulagement le projet de loi de finances et devrait bien faire front commun. Les écologistes, les socialistes et les insoumis présenteront séparement un contre-budget.

Pour montrer un visage uni, toute la Nupes se réunira sous la banderole de La France insoumise dimanche 16 octobre pour une "marche contre la vie chère" - malgré des frictions après un tweet de Jean-Luc Mélenchon - et tenter une démonstration de force dans la rue. De quoi espérer donner plus de portée à leur opposition dans l'hémicycle.

Certains députés socialistes, opposés à la Nupes, pourraient cependant vouloir faire entendre leur propre partition, et potentiellement voter pour certains articles du texte.

• Le RN: montrer que le parti est crédible sur les finances de la France

Marine Le Pen a déjà prévenu: ses 88 députés voteront contre le budget, qu'elle voit comme "le marqueur d'une politique" contestée par son parti.

Soucieuse de marquer sa crédibilité en matière budgétaire, souvent vue comme son point faible, la présidente du groupe RN va avoir à cœur de montrer que ses députés sont au niveau. Le parti a joué la carte de la sobriété en ayant déposé moins de 300 amendements. Ils sont issus du programme présidentiel de Marine Le Pen et seront défendus par les nouveaux visages à la tête bien faite qu'affectionne le parti.

Jean-Philippe Tanguy, dont la sortie "Silence pour la France" avait fait les beaux jours des réseaux sociaux, Thomas Ménagé et Philippe Lottiaux, le tombeur d'Éric Zemmour aux dernières législatives dans le Var, devraient prendre la lumière dans l'hémicycle.

Une fois adopté, avec ou sans 49.3, le budget devrait viser à contenir le déficit public à 5% du PIB, tout en permettant notamment une augmentation du revenu des enseignants et la création de 10.000 postes de fonctionnaires.

Marie-Pierre Bourgeois