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Politique

"La loi n'est pas si précise que ça": les frais de mandat des maires de nouveau au cœur des débats

La maire de Paris Anne Hidalgo à Paris le 8 mai 2023.

La maire de Paris Anne Hidalgo à Paris le 8 mai 2023. - LUDOVIC MARIN / POOL / AFP

Les frais de mandat des maires, entre représentation et nécessité, continuent d'échauder le débat public. En raison du cadre juridique toujours flou, la question de sa suppression se pose aujourd'hui.

Alors que les prochaines éléctions municipales approchent à grands pas, le sujet des frais de mandat des maires s'est de nouveau invité dans le débat public à l'issue de révélations sur les dépenses des édiles parisiens, en particulier d'Anne Hidalgo.

Cette nouvelle salve de polémiques a mis en lumière le cadre juridique flou et le manque d'encadrement de la gestion des frais. "La loi n'est pas si précise que ça. On peut même dire qu'elle n'est pas très précise du tout et les gouvernements se sont toujours refusés à établir une liste des frais admissibles en raison de la diversité des situations", observe Eric Verlhac, directeur général de l'Association des maires de France.

En complément de leurs indemnités, qui sont fixées selon un taux plafond en application de l'article 3 de la loi n°2015-366, les édiles peuvent "se voir rembourser, de le part de leur collectivité, de certains frais", rappelle le Centre National de la Fonction Publique Territoriale, dans une fiche explicative.

Il en existe différents types. D'abord de représentation ou de déplacement, les plus utilisés, mais également des frais de garde ou d'assistance, des frais liés à une situation de handicap ou des frais engagés pour des dépenses d'assistance de secours.

Pas de précision sur les dépenses

L'indemnité pour frais de représentation est réservée aux maires et présidents d'intercommunalités, à l'exception des communautés de communes, souligne l'Association des maires de France. "Votée par le conseil sur les ressources ordinaires de la commune, cette indemnité ne correspond pas à un droit mais à une simple possibilité. C’est donc au conseil que revient, au vu de ces ressources, la décision d’octroyer, ou non, au maire l’indemnité pour frais de représentation. C’est également lui qui en fixe le montant", précise l'AMF.

Cette indemnité recouvre l'un des principaux points de crispation car la loi ne précise pas quelles dépenses peuvent être couvertes par cette allocation. Pour le ministère de l'Intérieur, néanmoins, ces frais doivent couvrir uniquement les dépenses personnelles du maire liées à ses fonctions et à l’intérêt communal.

Le conseil municipal peut ainsi autoriser un maire à acheter un costume pour une cérémonie de gala où il représente sa ville, l'essentiel étant "de justifier ensuite l'achat pour que cette indemnité ne soit pas considérée comme un complément de rémunération", poursuit Eric Verlhac.

D'une centaine d'euros à plusieurs milliers

Ces montants peuvent aller d'une centaine d'euros à plusieurs milliers d'euros par mois. À Hesdin, commune de 2.200 habitants dans le Pas-de-Calais, le conseil municipal a limité les frais de représentation de son maire à 300 euros par mois. Certains maires, comme à Marcoussis (Essonne) ont, de leur côté, décidé de ne pas en avoir. À l’autre extrême, à Paris, ville au statut particulier, le plafond annuel est fixé à 19.720 euros pour la maire de la capitale.

En pratique, les services financiers de la collectivité ou le conseil municipal lui-même sont en charge de la vérification. Mais comme les collectivités s’administrent librement, tant que la dépense est légale, le contrôle reste assez limité. Le plus souvent, ce sont les chambres régionales des comptes qui, au cas par cas, mettent en lumière d’éventuelles irrégularités.

Faute de référentiel clair, comme c'est le cas pour les parlementaires, la question des frais de représentation des maires se pose dans de nombreuses communes, où c'est généralement l'opposition qui, faute d'avoir pu éclaircir des achats jugés suspects, tire la sonnette d'alarme.

Une suppression évoquée

Si l'Observatoire de l’éthique publique a appelé à "améliorer la transparence et renforcer le contrôle sur l’ensemble des indemnités et rémunérations perçues par les élus locaux", d'autres optent pour des solutions plus radicales. Pour Ian Brossat, il est ainsi nécessaire de "supprimer totalement" les frais de mandat.

Une position partagée par Jeanne d’Hauteserre, maire du VIIIe arrondissement. "Je comprends que dans la conjoncture actuelle de la société, il faille retirer ces frais, car les concitoyens y voient là privilèges", a indiqué l'élue auprès du Parisien.

Arthus Vaillant et Alizé Boissin