Quand Le Foll agacé ne veut pas répondre à la presse sur la déchéance de nationalité

La déchéance de nationalité empoisonne le débat public depuis plus de deux mois. Le projet de révision constitutionnelle arrive à l'Assemblée vendredi, et la déchéance de nationalité sème la zizanie à gauche, mais aussi à droite, à tel point que des voix s'élèvent pour conseiller à François Hollande d'y renoncer.
Lors du compte-rendu du conseil des ministres, la presse a voulu savoir mercredi midi si la déchéance de nationalité ne concernerait que les binationaux ou tous les Français condamnés pour terrorisme. Le porte-parole du gouvernement voulait rester sibyllin sur ce sujet, alors que Manuel Valls devait encore rencontrer des députés socialistes mercredi après-midi.
Face à l'insistance de plusieurs journalistes, Stéphane Le Foll a répondu sèchement: "Il y a des moments où chacun doit avoir un peu de respect". "Je vous ai répondu", s'est-il borné à répéter tout en renvoyant à un communiqué tout aussi évasif.
"Je n'ai pas à préciser ces choses-là car c'est le Premier ministre qui (les) présentera de manière définitive au début du débat", a-t-il asséné. Et de préciser: "Maintenant la responsabilité est au Parlement".
Cet échange tendu a duré plus de cinq minutes. A un journaliste qui argumentait en expliquant qu'il ne voulait pas écrire de choses fausses, le ministre de l'Agriculture a répliqué: "Si c'était la règle qui s'appliquait à chaque fois que vous écrivez des choses"...
"Plus de malentendu du groupe PS avec le gouvernement"
Il faut croire que si le point presse avait eu lieu quelques heures plus tard, l'atmosphère aurait été plus détendue: mercredi après-midi, le président du groupe PS à l'Assemblée, Bruno Le Roux, a jugé qu'il n'y avait "plus de malentendu avec le gouvernement" sur la formulation de l'application de la déchéance de nationalité, et a estimé qu'une "très large majorité" des députés PS voteraient la révision constitutionnelle.
Le Premier Ministre a annoncé aux députés que le mot apatride serait retiré de la loi d'application de la réforme constitutionnelle, selon les informations de BFMTV.
La veille, le groupe PS de l'Assemblée avait exigé du gouvernement la suppression de ce passage sur l'interdiction de l'apatridie qui "renvoie forcément à la binationalité", selon son président Bruno Le Roux.
De nombreux députés PS restent cependant opposés au principe même de l'inscription de la déchéance de nationalité (qui existe déjà dans le code civil) dans la Constitution et ont déposé des amendements, notamment pour une "déchéance nationale" qui priverait les personnes condamnées de nombreux droits sans leur ôter la nationalité. Cet amendement porté par Olivier Faure a été cosigné par 78 députés, soit plus d'un quart du groupe.