Manuel Valls: "Je respecte les manifestants" contre la loi Travail

Le Premier ministre face aux interrogations de la jeunesse. BFMTV a pu interroger en exclusivité le chef du gouvernement, Manuel Valls, et lui soumettre les questions de trois jeunes Français, préoccupés par la situation politique et sociale du pays.
Alors qu'une sixième journée de mobilisation contre la loi Travail a eu lieu mardi, la contestation sociale ne faiblit pas. Mais malgré la grogne de la rue, Manuel Valls a décidé de faire passer le texte de loi à l'Assemblée nationale grâce à l'utilisation de l'article 49.3. S'il assure "respecter les manifestants", le Premier ministre assume son choix, qui a déconcerté une partie de la population. Et notamment les jeunes, en première ligne dans la mobilisation contre la mesure gouvernementale.
49.3, chômage, renouvellement de la classe politique: BFMTV a invité trois vingtenaires à poser leurs questions sur les sujets qui les concernent et les préoccupent à Manuel Valls, qui s'est prêté à l'exercice, dans la cour de Matignon.
Léa, 25 ans, socialiste: "Le passage en force est le signe des pouvoirs faibles. Ce n'est pas moi qui le dis, c'était François Hollande il y a dix ans. Aujourd'hui, vous avez utilisé le 49.3 pour faire passer une loi sociale, sans écouter la colère de la rue. Comment avez-vous pu en arriver là?"
Manuel Valls: "Il ne s'agit pas d'un passage en force. Le texte a été discuté, négocié, avec les syndicats réformistes. Mais c'est vrai qu'à l'Assemblée nationale, il y a une minorité, notamment au sein du groupe socialiste, qui voulait bloquer ce texte. Je comprends toutes les oppositions, ceux qui ne sont pas d'accord, ceux qui auraient aimé que les choses se passent autrement. J'écoute, c'est d'ailleurs pour cela que ce texte a beaucoup évolué depuis le début. Mais à un moment, quand il y a blocage, soit on recule et on abandonne le texte, c'est ce que je ne souhaitais pas, soit on avance, et on avance aussi en utilisant les armes de la démocratie".
Flavie, 25 ans, manifeste pour la première fois cette semaine: "J'ai un bac +5 en communication et marketing digital, j'ai mis un an et demi pour trouver un contrat professionnel, et je ne suis même pas sûre d'avoir un CDI ou un CDD derrière. Alors dites-moi, honnêtement, qu'est-ce qui va mieux?"
Manuel Valls: "Ce sont ces interpellations qui me touchent le plus. Moi aussi j'ai des enfants, qui sont jeunes, qui ont l'âge de ceux qui m'interpellent. La loi Travail portée par Myriam El Khomri vise à réduire la possibilité d'être embauché en CDD, pour favoriser le CDI. Et puis aujourd'hui nous avons une baisse du chômage des jeunes. Elle n'est pas suffisante, mais nous amorçons une baisse du chômage en général et une baisse du chômage des jeunes. Ce qui est vrai, c'est que quand on a obtenu un diplôme, et que l'on arrive pas à trouver un boulot, c'est là qu'il y a la désespérance. D'une manière générale, oui, ça va mieux pour le pays. Quand vous avez le retour de la croissance, une baisse du chômage, le retour de la consommation et de l'investissement, oui, ça va mieux. En même temps, je suis parfaitement conscient que pour des millions de mes compatriotes, c'est encore très difficile".
Lucas, 22 ans, participe à Nuit Debout, place de la République: "Face à une classe politique qui ne se renouvelle jamais, des têtes que l'on voit constamment -depuis que je suis jeune je vois les mêmes calvities à l'Assemblée nationale- vous vous êtes battus pour le non-cumul des mandats, que pensez-vous d'une mesure qui pourrait éviter les renouvellements des mandats, et qui empêcherait de voir constamment les mêmes personnes?"
Manuel Valls: "D'abord, il n'y a pas que des chauves à l'Assemblée nationale. Et ça se renouvelle, regardez au gouvernement. Myriam El Khomri, Najat Vallaud-Belkacem, Emmanuel Macron, ont moins de 40 ans. Mais il faut du renouvellement. Le non-cumul des mandats, c'est moi qui l'ai porté, comme ministre de l'Intérieur, à l'Assemblée nationale. Il va s'appliquer à partir de 2017, et il va incontestablement changer la vie politique française. Et moi je suis favorable aussi au non-cumul dans le temps".